À la rencontre du « beau monde » à vélo
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs
Alors qu’il vient de publier D’autres histoires à dormir dehors, récit passionnant de son nouveau périple de 20 000 kilomètres à deux roues, Jonathan B. Roy a sélectionné pour nous trois destinations où croiser du « beau monde » sur les pistes cyclables d’Asie du Sud-Est et d’Amérique du Sud. Morceaux choisis.
Taïwan, paradis du cyclotourisme
Au début de son périple en Asie du Sud-Est, Jonathan B. Roy a vécu à Taïwan la première rencontre marquante de ses nouvelles aventures à deux roues. Lancé à l’assaut du mont Wuling, l’un des plus hauts sommets de l’île tropicale, avec ses 55 kilos de bagages, le Québécois fait la connaissance de Liu Wenxiong, dit Luke, un entrepreneur taïwanais de 50 ans lui aussi mordu de vélo et de voyages. Ils roulent quelques kilomètres ensemble, avant de se revoir un peu plus tard à Taipei.
« Il m’a pris sous son aile pendant la semaine où j’étais là. C’est aussi la seule fois où quelqu’un a proposé de rouler avec moi pour me reconduire à vélo et être sûr que tout se passe bien lors de mon départ », confie en entrevue le cyclovoyageur, alors convaincu de revoir un jour son compagnon de route. Le destin cruel en a décidé autrement, et le malheureux Luke est décédé, emporté par un arrêt cardiaque, un jour seulement après le départ de Jonathan pour la Chine.
En dépit de cette disparition tragique, l’aventurier garde de beaux souvenirs de son passage à Taïwan, qu’il décrit dans son livre comme un paradis du cyclotourisme. « Les Taïwanais sont super accueillants. Les pistes cyclables sont incroyables, et il y a une piste qui fait tout le tour de l’île », explique-t-il. « C’est vraiment une belle destination pour le vélo. Quand on me demande conseil, je recommande toujours d’aller à Taïwan. »
Le Chili, terre d’aventures
C’est un parcours qui fait rêver tous les cyclotouristes en quête de sensations fortes. Alors, forcément, quand il a pris la route de la fameuse Carretera Austral au Chili, Jonathan B. Roy s’est vite aperçu qu’il n’était pas le seul à avoir des projets fous en tête. Il tombe sur un Slovène qui a prévu de marcher de Ushuaïa jusqu’en Alaska, en poussant un chariot chargé de bagages durant trois ans. Il salue surtout pas mal de confrères prêts à avaler les kilomètres par centaines pour ajouter un circuit mythique à leur tableau de chasse.
« En temps normal, je peux croiser un cycliste une fois par mois, ou une fois toutes les deux semaines », détaille l’animateur-producteur de la websérie Le bon monde de la Route verte. « Mais dans la Carretera, je pouvais voir jusqu’à huit à dix cyclistes par jour. » Alors qu’il roule avec son complice allemand Freddie Fritz, avec qui il a déjà partagé la route au Tadjikistan et au Myanmar, Jonathan tombe sur Davide Pasqualetto, dit Pasco, un Italien de 26 ans qui s’est lui aussi donné pour mission de pédaler jusqu’au bout de cette route mythique.
« La première fois que je l’ai vu, il était endormi, dans toute sa splendeur, sur le bord du chemin. Après ça, on a pédalé ensemble pendant trois semaines », raconte Jonathan. « C’est devenu mon super grand ami. Je l’ai revu plusieurs fois, et je lui ai rendu visite chez lui à Turin. Le vélo, ça fait ça. Le fait de partager des repas et des feux de camp sur la route, ça accélère la création de liens d’amitié. Comme avec Luke, je savais déjà après deux jours que j’allais revoir Pasco. »
L’Uruguay, la belle surprise
Le pays où les gens sirotent du maté en marchant (contrairement aux Argentins qui le dégustent assis, nous apprend Jonathan) ne figurait pas forcément en tête des destinations qu’il souhaitait parcourir à vélo. « Il n’y a pas de montagnes en Uruguay. C’est un pays agricole avec de petites collines, et moi j’adore gravir des sommets », explique-t-il. Comme il devait se rendre au Brésil, après être passé par l’Argentine et le Chili, Jonathan n’a eu d’autre choix que de traverser l’Uruguay.
À défaut de montagnes à grimper, l’ex-juriste converti aux joies du cyclotourisme a trouvé sur place des gens incroyablement accueillants. Dans le petit village de Montes, Jonathan sympathise avec les membres d’un club de vététistes qui l’adoptent rapidement autour d’un barbecue. Le Québécois se retrouve également à raconter, en espagnol, ses exploits autour du monde à quelque 250 élèves de l’école primaire locale.
« Tout le monde était tellement excité de me recevoir », commente-t-il. « Les pays qui n’ont pas de tourisme ne tiennent pas ça pour acquis. Ils ne sont tellement pas habitués à voir des voyageurs qu’ils sont super heureux de t’accueillir. Leur bonheur est également décuplé de pouvoir partager leur culture », ajoute Jonathan, qui est reparti de Montes le coeur lourd, mais avec plein de cadeaux dans ses sacoches, dont une calebasse de maté.
Les carnets de route d’un increvable cyclovoyageur

« Que reste-t-il à faire après avoir pédalé la moitié du globe ? » demande Jonathan B. Roy dans la préface du second volet de ses Histoires à dormir dehors. On peut penser qu’il n’a pas mis bien longtemps à trouver la réponse. Un an après avoir posé ses sacoches en Malaisie, à l’issue d’un périple de 14 mois et 18 000 kilomètres qui lui a inspiré son premier livre, publié en 2018, le Québécois n’a pas tardé à se remettre en selle pour laisser derrière lui un emploi éphémère de juriste et une vie de bureau sans doute un peu trop pépère.
Cette fois, ce sont 20 000 kilomètres qui l’attendent au départ de Kuala Lumpur, pour sillonner deux continents, l’Asie du Sud-Est, puis l’Amérique du Sud. Dans chaque pays qu’il traverse, l’auteur ne manque pas de mettre à profit son sens aigu de l’observation pour dresser des portraits touchants de personnes qu’il croise sur sa route, à Taïwan, au Japon, au Chili, au Paraguay ou en Bolivie. Agrémentés de superbes photos et de savoureuses anecdotes, ses carnets de route sont aussi l’occasion de nous révéler des coutumes et des traditions parfois étranges, comme ces sanctuaires de bouteilles en plastique honorant la mythique Difunta Correa en Argentine.
Au passage, Jonathan B. Roy partage ses émotions de cyclotouriste, du bonheur de pédaler seul dans des paysages époustouflants aux moments plus difficiles où le moral tombe à plat à force de lutter contre les éléments ou contre une sévère intoxication à l’eau contaminée. Finalement, c’est la pandémie qui a eu raison de son road trip, une fois rendu au Pérou. Mais l’increvable voyageur a déjà prévu de remonter sur son vélo, pour coucher de nouvelles histoires sur le papier, comme il nous l’a confié. « Je me verrais bien aller en Afrique, où je n’ai jamais pédalé, ou prendre le temps d’aller explorer les Balkans plus en profondeur. »
D’autres histoires à dormir dehors
Jonathan B. Roy, Vélo Québec éditions, Montréal, 2023, 312 pages
Ce contenu spécial a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.
