Comment voyagerons-nous en 2021?

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs
Bien que le vaccin apporte une lueur d’espoir, voyager en 2021 présentera de nombreux défis. Quelques tendances qui se dessinent pour les prochains mois, en plus de la sécurité et de la flexibilité, deux des plus grandes préoccupations en ce début d’année.
Comment planifier un voyage, alors que nous ne savons pas de quoi demain sera fait ? « On ne sait pas du tout quelles destinations seront accessibles, observe Paul Arseneault, expert en tourisme et professeur de marketing à l’ESG UQAM. L’industrie aérienne aura souffert et ne pourra repartir comme avant. […] Ça veut dire que, oui, il y aura un boom pour certaines destinations québécoises. »
Son collègue Marc-Antoine Vachon, titulaire de la Chaire de tourisme Transat de l’ESG UQAM, abonde dans son sens. « On peut penser que l’été sera relativement semblable à celui de 2020. Les gens piaffent d’impatience. Avec les efforts soutenus qu’on fait actuellement, jumelés à la vaccination, on peut s’attendre à ce que la situation soit maîtrisée pour voyager dans la province, voire au Canada cet été. »
L’appel de la nature
En 2020, la SEPAQ a connu un « achalandage historique », souligne Simon Boivin, responsable des relations avec les médias. « Jamais autant de Québécois n’ont visité leurs parcs nationaux que lors de la dernière période estivale, avec un total de 4,8 millions de jours/visite, une hausse de 14 % par rapport à l’an passé. »
Sans grande surprise, le camping ainsi que les voyages en fourgonnette et en véhicule récréatif continueront de séduire les vacanciers. À une époque où l’expression « rester dans sa bulle » prend tout son sens, les sites de location de chalets comme WeChalet, Monsieur Chalets, Hébergia et autres Chalet à rabais ne risquent pas de voir le nombre de visiteurs diminuer.
« L’année dernière, il y a eu une très forte pénurie de matériel de plein air, se souvient Marc-Antoine Vachon. Les gens vont vouloir continuer à utiliser leur équipement et en profiter dans un autre endroit. Ça devient une belle raison de se déplacer : pour poursuivre la pratique du sport. »
Les petites villes, avec un accès facile à la nature, continueront de séduire davantage que les métropoles et les capitales cette année.
Le télétravail
Combiner travail et évasion n’est plus l’apanage des nomades numériques. Qu’ils soient travailleurs autonomes ou employés d’une entreprise, les travailleurs à distance revendiquent eux aussi des changements de décor. Même des lieux surtout connus pour leurs cures de déconnexion, comme le Spa Eastman, ont conçu des forfaits qui leur sont destinés en 2020 !
Dans un sondage réalisé par OnePoll pour Expédia en novembre 2020 auprès de 2000 Canadiens, dont 540 Québécois, 63 % des répondants ont pour leur part affirmé souhaiter travailler à partir d’un nouvel emplacement ou d’un lieu de vacances pendant quelques semaines. Détail intéressant, la moitié des parents québécois interrogés se sont dits prêts à laisser leur famille à la maison pendant une semaine ou deux pour travailler à distance, une forte majorité affirmant même qu’un séjour de télétravail pourrait améliorer leur relation avec leurs enfants. Les trois lieux où transporter son bureau qui font le plus rêver selon le même sondage ? La plage (40 %), un lac (36 %) et la montagne (31 %).
Jamais autant de Québécois n’ont visité leurs parcs nationaux que lors de la dernière période estivale, avec un total de 4,8 millions de jours/visite, une hausse de 14 % par rapport à l’an passé
« Il y a vraiment un effet rémanent, soutient Marc-Antoine Vachon. Ce ne sera pas la même proposition qu’actuellement, mais il restera des relents, ne serait-ce que pour travailler quelques jours dans son lieu de vacances, par exemple pour éviter les périodes de pointe sur la route lors des vacances de la construction. »
Deux mots-valises anglais qu’on risque de voir de plus en plus : workcation et teletravel.
Une plus grande planification
Les Québécois avaient l’habitude de préparer leurs escapades au Québec à la dernière minute, bien souvent en se fiant à la météo. Avec la ruée vers les destinations populaires et les règles mises en place par le gouvernement, la pandémie nous contraint à mieux préparer nos séjours. « Une bonne proportion des Québécois va désormais planifier ses vacances dans la province plus à l’avance, ce qui est différent de ce qu’on faisait avant », indique Marc-Antoine Vachon.
L’incertitude à propos des voyages plus lointains semble avoir eu l’effet contraire. S’appuyant sur l’analyse des données de recherche et les informations de l’Airlines Reporting Corporation, Expédia a constaté que les Canadiens ont réservé leurs vols en moyenne 22 jours avant le début des vacances en 2020, comparativement à une moyenne de 34 jours en 2019.
La pertinence des agents de voyages
La crise des derniers mois a mis en lumière le travail des agents de voyages, qui ont fait des pieds et des mains pour venir en aide à leurs clients au moment de l’annulation des vols. Dans un contexte où l’incertitude continue de régner, nombreux sont les voyageurs qui rechercheront leur expertise. « Si l’on présume que les gens ont plus besoin d’information que jamais, les agents de voyages auront un rôle très pertinent à jouer, croit Marc-Antoine Vachon. La pandémie a entraîné de nouveaux besoins auxquels l’industrie n’avait pas l’habitude de répondre. […] On voudra de l’information validée par un professionnel. »
Une plus grande conscience ?
Déjà bien présent depuis quelques années, le désir de pratiquer un tourisme plus responsable sera-t-il au cœur des préoccupations après cette année propice à l’introspection ? Difficile de prédire si « les bottines suivront les babines ». Dans son Travel Megatrend 2025, Skift entrevoit néanmoins une manière plus lucide d’appréhender le monde et une plus grande place accordée à l’émotion.
Alors que l’Organisation québécoise du tourisme durable vient d’être créée et que l’engouement pour le tourisme régénérateur, plus vert et plus intelligent, annonce un changement de paradigmes, les voyageurs se questionnent davantage à propos de leur « consommation » du voyage. La durée des séjours pourrait notamment être plus longue et les départs, moins fréquents.
Paul Arsenault entrevoit une plus grande ouverture pour un tourisme responsable après la pandémie, mais estime que le changement proviendra d’abord des destinations. « Si on propose une offre qui intègre cet aspect, elle sera mieux accueillie. » Il lui apparaît toutefois utopique d’imaginer une transformation radicale dans les habitudes de voyage. « Je ne suis pas convaincu que la réflexion collective arrivera à un meilleur tourisme au final. » Cependant, avec les mouvements d’inclusion lancés par des communautés comme Trippin, qui mettent en avant des histoires axées sur les enjeux sociaux et les frontières cultuelles, la tendance déjà bien amorcée du tourisme bienveillant, qui mise sur l’équilibre et le développement harmonieux des territoires, et la réflexion forcée des derniers mois, on peut espérer un tourisme plus conscient des liens qui nous unissent aux autres et à la planète.
En vrac
• La technologie à la rescousse : paiements, enregistrements et départs sans contact, applications mobiles, intégrations de conciergeries numériques… La technologie sera aussi une précieuse alliée en 2021.
• Toute la technologie du monde ne remplacera toutefois jamais le contact humain, et les entreprises qui l’ont compris tireront sans doute mieux leur épingle du jeu cette année. « Collectivement, on s’ennuie de l’être humain », dit Marc-Antoine Vachon. Rien ne remplace un bon service à la clientèle !
• Une plus grande flexibilité : « Il y a eu un travail important pour revoir les politiques de remboursements et d’annulations, observe Marc-Antoine Vachon. […] On peut penser que ça va rester quelques années. »
• Des voyages plus significatifs : en 2021, la priorité sera pour de nombreuses personnes de rendre visite à des proches et de concrétiser enfin ce projet de voyage auquel ils ont toujours rêvé.
Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.