Survivre au Magic Kingdom de Disney World

À Magic Kingdom, l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt et qui arrivent avant l’ouverture des portes.
Photo: Gary Lawrence À Magic Kingdom, l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt et qui arrivent avant l’ouverture des portes.

« Have a magical day ! », dit la préposée au stationnement, vers 8 h 15 du matin. «Yeah, sure, right», ai-je envie de lui répondre, appréhendant ce qui m’attend.

 

La veille, ma douce et moi avions étalé la carte du Magic Kingdom comme l’auraient fait deux hauts gradés avant une invasion, planifiant la progression de nos troupes (un garçonnet de huit ans et une rejetonne de quatre ans) sur cet immense territoire de 43 hectares. Objectif : conquérir le plus d’avant-postes ludiques suivant les intérêts de chacun (lire : ceux des mouflets).

 

Pour ce faire, il n’y avait pas 36 solutions : une organisation quasi militaire, des fantassins qui marchent au pas et des visites orchestrées comme autant de rafles, dès potron- minet : dans les parcs thématiques de Disney World, l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt… et qui arrivent avant l’ouverture des portes.

 

Après avoir peaufiné le plan d’attaque grâce au soutien logistique d’une gentille préposée à l’accueil, nous pénétrons dans l’enceinte. Première cible : le château de Cendrillon… devant lequel une employée récolte des pommes de route encore fumantes. « Ça, c’est le château de la madame qui ramasse le caca », de lâcher sèchement fifille. Bonjour la magie : rien à voir avec frérot qui, quatre ans plus tôt, avait eu les yeux illuminés devant ce Neuschwanstein de carton-pâte.

 

Une fois esquivé le piège du salon de coiffure du château, d’où les fillettes ressortent comme si on les avait enduites de barbapapa, cap sur Fantasyland, fief du château de la Belle et la Bête, qui abrite un joli resto aménagé comme une salle de bal. Mais il y a foule, alors au-delà de la taverne de l’imbuvable Gaston, c’est la grotte d’Ariel qui a finalement l’heur d’ébahir fifille - mais aussi fiston, quand l’hideuse Ursula s’est pointé le bout du tentacule.

 

Grâce à nos Fast Pass - un must, même si c’est cher -, pas d’attente, à condition de se présenter à l’heure, et ce, dans une quinzaine d’attractions parmi les plus courues. Seul hic : il faut chaque fois trouver la distributrice de ces « billets d’accès rapide », et dès qu’on réserve une place, on ne peut récidiver qu’avant d’avoir « consommé » celle-ci.

 

Pour maximiser ses chances d’en voir encore plus, un parent-planton fait le pied de grue dans la file d’un manège avec la troupe, tandis qu’un parent-éclaireur court chercher les Fast Pass pour toute la smala. Grâce à une application et au Wi-Fi gratuits, on a même accès à une carte interactive avec géolocalisation, ainsi qu’à des informations en temps réel sur la durée du temps d’attente à chaque attraction sur son téléphone multifonction.

 

Petit hic pour coordonner l’avancée des escadrons : deux cartes différentes du Magic Kingdom sont en circulation ce jour-là. Une tentative de l’ennemi pour brouiller les pistes ? Qu’importe, nous l’avons déjoué pour abattre à bout portant les extraterrestres fluos du jouissif Buzz Lightyear Space Ranger Spin et ensuite naviguer sur la rivière de la Jungle Cruise - dont le « guide », fort éloquent, rappelait étrangement l’obèse qui devient fou dans Full Metal Jacket. Décidément, les références militaires ne nous lâchent pas d’une semelle cloutée.

 

Auparavant, nous avons affronté les stupéfiants hologrammes fantomatiques de la Haunted Mansion, effectué une convaincante incursion dans le monde de la flibuste avec Pirates of the Caribbean, puis initié les jeunes moussaillons aux montagnes russes du Barnstormer, taillé sur mesure pour eux.

 

Quand vient l’heure de rassassier les troupes - vers 14 h, après le repli de contingents d’affamés replets -, nous avons même droit à des sandwichs aux légumes grillés sur pain de blé avec crudités à l’un des restos de Tomorrowland, ce secteur aux splendides décors rétro-futuro-kitsch. Et puisque les portions sont trois fois le double de ce que l’estomac lambda peut encaisser, la facture n’est pas trop salée, contrairement aux plats.

 

La journée tire à sa fin et les batteries sont un peu à plat. Tant pis pour Splash Mountain, l’équivalent format géant des pitounes de La Ronde : pas envie d’être trempé dans l’air climatisé du monorail qui nous ramènera bientôt au stationnement. Et puis, c’est que fifille tient mordicus à se faire croquer le portrait avec Raiponce, Cendrillon et surtout Belle, « ma préférée parce que non seulement elle aime les livres, mais en plus, elle tombe amoureuse d’une bête, comme toi », me dit ma douce.

 

- D’ailleurs, il est 19 h 30, peut-on rentrer à l’hôtel, maintenant, madame la maréchal ?

 

- Nein, il reste la parade nocturne : c’est à 21 h et il faudrait déjà prendre place le long du parcours…

 

- Ach zo. Mais près de la sortie, hein ? Parce que si on est coincés dans un bouchon en partant, je ne réponds plus de moi…

 

Dès le dernier char allégorique passé - celui en forme de Stars Stripes surmonté d’un aigle et portant l’inscription « To honour America » -, nous levons le camp sans encombre après avoir quadrillé le terrain de long en large, même si nos effectifs auraient bien aimé demeurer stationnés sur place durant toute la nuit.

 

Bien sûr, nous n’avons pas tout vu, mais nous avons vu tout ce que nous voulions voir, même un peu plus. Et tout compte fait, ce sont davantage les deux jeunes fantassins - et aussi un peu leurs parents - qui furent conquis.

 

 

Collaborateur

 

L’auteur était l’invité de Visit Florida, Visit Orlando et Disney World.

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