Menaud, maître-brasseur

Menaud, brasserie et distillerie artisanale, a été baptisée ainsi en hommage au personnage du célèbre roman Menaud, maître draveur de Mgr Félix-Antoine Savard, qui fut curé de cette paroisse où s’agitent les colonnes d’un alambic tout neuf.
Photo: Marie-France Coallier Le Devoir Menaud, brasserie et distillerie artisanale, a été baptisée ainsi en hommage au personnage du célèbre roman Menaud, maître draveur de Mgr Félix-Antoine Savard, qui fut curé de cette paroisse où s’agitent les colonnes d’un alambic tout neuf.

Détour par la région de Charlevoix où l’activité brassicole connaît un essor, notamment grâce aux produits de la toute jeune Menaud, distillerie et microbrasserie. Inaugurée il y a moins d’un an, l’entreprise offre vodka et gin maison ainsi qu’une sélection de bières savoureuses qui ne restent pas longtemps dans les fûts.

Au bout de la route 138, juste avant d’arriver à La Malbaie, se trouvent le petit village de Clermont et son petit parc industriel où se sont installés les cofondateurs de Menaud, une brasserie et distillerie artisanale baptisée en hommage au personnage du célèbre roman Menaud, maître draveur de Mgr Félix-Antoine Savard, qui fut curé de cette paroisse où s’agitent les colonnes d’un alambic tout neuf.

« On a choisi de faire de l’alcool à partir des grains mêmes — un alcool fabriqué du grain à la bouteille, comme on dit », explique le cofondateur Martin Brisson, également connu comme sculpteur dans sa région. La distillerie, c’est son rayon : il supervise la production d’une vodka et d’un délicat gin aux herbes boréales qui se déguste à sec, sans glace ni tonic.

Le distillateur se procure son seigle et son blé à la ferme Harvey de L’Isle-aux-Coudres : « Tu te rappelles, dans le film Pour la suite du monde de Pierre Perreault, on voit Grand Louis labourer son champ ? Ce sont ses petits-fils qui cultivent toujours la terre » et qui ancrent encore plus l’entreprise dans son terroir. Le grain est moulu en une farine avec laquelle on fait la « soupe » qui sera fermentée, puis déversée dans le gros alambic pour une première distillation, puis une deuxième et une troisième dans le plus petit alambic ; les résidus de céréales sont ensuite récupérés par les éleveurs de brebis de Charlevoix, qui s’en servent pour nourrir leurs bêtes. Pour le gin, 14 aromates sont nécessaires pour développer ce goût floral et épicé. Comme la vodka, ce gin est vendu sur place, à Clermont, et dans les succursales de la SAQ.

RyePA, Stout

 

En ce vendredi après-midi tranquille, un ouvrier d’une entreprise voisine traverse la porte dans ses habits de travail, cruchon à la main. « Je l’ai lavé — il est propre ! » dit-il en tendant le récipient à Martin Brisson. La petite et moderne usine de production n’a ouvert ses portes que l’hiver dernier au public, or les résidents et travailleurs de la région ont vite adopté les recettes et les lieux — le salon de dégustation a sa petite scène, le stationnement à l’entrée a été converti en terrasse avec petit foyer, le terrain séparant l’usine de la rue de la Rivière est désormais une petite houblonnière où grimpent les lierres de Cascade, Willamette et Nugget dont les inflorescences sont quasiment prêtes à être récoltées.

À la tête du département brassicole se trouve Valérie Bergeron, biologiste de formation, brasseuse par passion. Elle aime les bières fortes en général et les bières sures l’été — sa gose à la salicorne est d’un admirable équilibre. Nous jetons plutôt notre dévolu sur l’Évolution, une IPA de seigle (RyePA) assaisonnée de poivres vert et noir.

Belle robe brunâtre, légère mousse, 6,6 % d’alcool bien masqués par les arômes francs des poivres. « L’idée de cette bière est de retrouver le contraste entre les houblons, un peu agrumes, lime et pamplemousse, donc une bouche relativement douce, et une finale piquante. » Sont utilisés un peu de Cascade et du Loral en poudre de lupuline, mais Menaud innove ici en utilisant une nouvelle variété de houblon, le Sasquatch, que l’on compare au Cascade avec une petite touche d’agrume (lime, pamplemousse).

« Il s’agit du premier houblon de souche canadienne » développé par une entreprise britanno-colombienne nommée Hops Connect et commercialisé depuis l’automne dernier, précise la brasseuse. « Ils pensent avoir trouvé un houblon sauvage qui n’est pas une hybridation d’un houblon colonial et l’ont cultivé ; il est disponible sur le marché depuis l’année dernière, mais n’est arrivé qu’en très petites quantités au Québec. »

Ça tombait bien, chez Menaud, on brasse en très petites quantités… pour l’instant. Lors de notre visite, il ne restait plus aucune des bières embouteillées durant la belle saison. « On s’est fait dévaliser ! » rigole Martin Brisson. L’usine est déjà toute prête pour accueillir des fermenteurs de 4000 litres qui devraient être installés au courant de l’année prochaine et qui permettront d’honorer la soif des amateurs de Clermont et du reste de la province.

Car avant même que la brasserie et distillerie inaugure son usine, il était possible de découvrir les premières recettes de Valérie Bergeron, brassées en sous-traitance par Oshlag et disponibles sous la marque Drav — encore une référence à Mgr Savard. Une American Pale Ale (Drav APA, 4,9 % d’alcool), une India Pale Ale (Drav IPA à 6 %) et une India Session IPA (Drav ISA à 3,7 %) ont fait leur apparition chez les détaillants l’été dernier et, si vous passez dans la région charlevoisienne, vous pourrez toujours dénicher quelques canettes de la nouvelle Drav S25, un stout vanille-café brassé spécialement pour souligner le 25e anniversaire du Casino de Charlevoix. « Ce sont les gens du Casino qui sont venus nous voir, explique Valérie. Ils appréciaient notre recette de dry stout et voulaient une bière similaire »

La brasseuse a penché du côté sucré (sweet stout) avec cette version au lactose et à la vanille de son dry stout au café ; au salon de dégustation, ce stout était doux, assez sec, bien parfumé, tandis que la version en canette est nettement plus sucrée. Sur une base de malt chocolat pâle et d’un peu de blé, la brasseuse n’utilise que du houblon amérisant East Kent Golding « pour couper dans le sucre sans avoir trop de notes fruitées, seulement quelques gentilles petites notes florales, l’idée étant de mettre l’accent sur les saveurs du malt » et du café.

Menaud distillerie et microbrasserie

1, rue de la Rivière, Clermont

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