Les beaux-arts de la table

Immaculé, lumineux, immense. C’est la première impression qui frappe pour qui entre au pavillon Pierre Lassonde du Musée national des beaux-arts du Québec, inauguré au début de l’été et qui abrite le Tempéra.
Photo: Renaud Philippe Le Devoir Immaculé, lumineux, immense. C’est la première impression qui frappe pour qui entre au pavillon Pierre Lassonde du Musée national des beaux-arts du Québec, inauguré au début de l’été et qui abrite le Tempéra.

Immaculé, lumineux, immense. C’est la première impression qui frappe pour qui entre au pavillon Pierre Lassonde du Musée national des beaux-arts du Québec, inauguré en grande pompe au début de l’été. Son hall est assurément un écrin de choix pour le Tempéra Québecor, où la chef Marie-Chantal Lepage signe un menu élégant.

Le menu du midi propose trois assiettes thématiques — végétarien, mer et terre — comportant un quatuor de parts format entrées. Que choisir ? Un coup d’oeil aux tables voisines nous ayant appris que lesdites parts sont légères, je résous le dilemme et commande tout simplement les trois assiettes pour mon invité et moi. Une excellente décision.

Ab ovo (à partir de l’oeuf)

Le restaurant tire son nom d’une technique de peinture très ancienne basée sur l’émulsion. Bien des peintres du Moyen Âge et de la Renaissance ont employé des couleurs faites de pigments délayés à l’eau et liés à l’oeuf, ce qui donnait à leurs oeuvres un fini léger permettant de traverser le temps.

Ce n’est sans doute pas un hasard si les mets du Tempéra comportent nombre de mousselines et d’émulsions fines qui exaltent les saveurs… en douceur. À commencer par la mise en bouche proposée, une crème de légumes racines à la mousse de truffes où l’on a déposé une noix de beurre et quelques micropousses.

Pour accompagner un repas pris dans un environnement aussi épuré, un vin blanc s’impose. Intriguée par ce patronyme qui sonne si typiquement québécois, j’opte pour une bouteille de Bouchard Père fils 2014, un bourgogne aligoté de Beaune qui nous suivra jusqu’au dessert.

Classe de maître

Photo: Renaud Philippe Le Devoir
 

Commençons la visite et allons-y par thème, en gardant à l’esprit que le menu évolue constamment et que ce qui suit pourrait bien ne plus être à l’honneur dans les prochaines semaines…

Dans l’assiette végétarienne se trouvent de fraîches tranches de betterave « bonbon » assorties de cubes de melon d’eau et d’amandes au miel, agrémentées d’une émulsion aux herbes. J’apprécie tout particulièrement les tomates confites à la mayonnaise au cari et à l’écrasé de feta au citron, tandis que mon ami affiche sa préférence pour les tortellinis farcis de ricotta, parsemés de shiitakés confits, de sauce crémeuse à l’orange et d’huile d’olive. La salade de lentilles du Puy, abricots séchés, sésame et persil italien, nous laisse cependant indifférents.

L’assiette de la mer accueille deux croûtons surmontés de crevettes nordiques et de fromage fouetté au pamplemousse, une combinaison gagnante. L’esturgeon fumé et ses pommes de terre Raphaëlle en sauce gribiche (à base d’oeufs !) me plaît beaucoup, mais c’est le saumon snacké servi en sauce vierge grenobloise qui remporte la palme.

La salade proposée, le bok choy avec crème sure et noix de cajou, fait également l’unanimité : le légume a été délicatement grillé avec de la sauce hoison, ce qui lui confère une touche sucrée et une texture très agréable.

Enfin, l’assiette terre nous permet de découvrir une mousse de sanglier avec sa vinaigrette de bleuets sauvages : les baies sont si noires qu’elles évoquent le cassis ! Ce brave cochon sauvage se trouve toujours heureusement marié aux petits fruits des bois, alors c’est un régal. La sémillante roquette à l’huile de citron et copeaux de parmesan offre une pause végétale bienvenue.

La saucisse de cerf au bacon nappée de sauce au vin rouge déçoit un peu, pas tant au niveau de l’agencement des saveurs que de la température : c’est tiède, voire froid, un état qui convient nettement mieux à l’excellent tataki de boeuf qui figure à ses côtés. Avec son sucre d’érable râpé sur mousseline de céleri rave, c’est assurément la pièce maîtresse du trio d’assiettes que nous venons de découvrir.

La signature

 

Le petit gâteau au fromage, avec son crumble de chocolat et son coulis de fruits rouges, confirme que nous avons bien affaire à la chef Lepage. On reconnaît sa touche, bien que son art s’exprime mieux, à mon avis, dans les longs soupers gastronomiques que dans les formules lunch. Je devrai sans doute y retourner pour essayer la coupole de fruits de mer ou l’un de ces plats exubérants aux parfums insolites dont elle a le secret…

 

Tempéra Québecor

179, Grande Allée Ouest
Québec
418 644-6780


Les plus. La formule à partager est appréciée, permettant de goûter à plusieurs mets en petites portions. L’écrin lumineux donnant sur les plaines d’Abraham et sur la Grande Allée est revigorant.

Les moins. On souhaiterait une meilleure utilisation des légumineuses, qui semblaient un peu fades en comparaison des autres éléments du repas.

 

Coût du repas pour deux incluant alcool, taxes et service : 153 $.

Légendes

★ Je regrette de devoir vous en parler
★★ Pas mauvais, mais on n’est pas obligés de s’y précipiter
★★★ Bonne adresse
★★★★ Très bonne adresse
★★★★★ Adresse exceptionnelle pour la cuisine, le service et le décor

$ Le bonheur pour une vingtaine
$$ Une quarantaine par personne
$$$ Un billet rouge par personne
$$$$ Un billet brun par personne
$$$$$ Le bonheur n’a pas de prix

Tempéra Québecor

★★★ 1/2

179, Grande Allée Ouest, Québec, 418 644-6780, $$$ 1/2

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