La Villa Savoye en Lego

Elle en a vu de toutes les couleurs, malgré ses tonalités blanches dominantes: objet de désir pour riche couple dans les « années sandwich », envahie par les troupes nazies puis par l’armée américaine libératrice dans les années 40, menacée de démolition par des fonctionnaires municipaux à l’esprit étriqué vers 1960, puis érigée au rang de monument historique plus que respectable quelques années plus tard, la Villa Savoye, ce chef-d’oeuvre imaginé par l’architecte suisse Charles-Édouard Jeanneret, dit Le Corbusier, et construit dans la banlieue de Paris entre 1928 et 1931, connaît depuis quelques jours un nouveau point marquant de son histoire. Et pas le moindre!
Ce symbole de l’architecture moderniste vient en effet de faire son entrée dans la collection particulière de Lego Architecture. Au grand bonheur des adultes — ou des enfants âgés de 25 à 99 ans —, à qui est finalement destinée cette collection de modèles réduits architecturaux à remonter une brique en plastique à la fois.
Avec ses 660 pièces, la Villa Savoye, dont l’original fait rayonner son style moderniste international sur la rue de Villiers à Poissy, en France, à 30 kilomètres de Paris, vient agrandir une complexe série de Lego composée de l’opéra de Sydney, de la tour Burj Khalifa, de la Maison sur la cascade de Frank Lloyd Wright, de la Maison-Blanche ou encore de l’Empire State Building, pour ne citer que ceux-là.
C’est dans cette série, d’ailleurs, que des milliers d’internautes du monde entier, intéressés par le bâti, rêvent de voir entrer une réplique miniature d’Habitat 67, cette création cubique et originale de Moshe Safdie qui longe le Saint-Laurent, à Montréal.
C’est du moins ce qu’ils ont exprimé lors d’une consultation en ligne orchestrée par le fabricant de jouets qui planche toujours, a-t-on indiqué au Devoir cette semaine, sur la faisabilité de cette miniaturisation.
En apparence très simple, la Villa Savoye a toutefois été particulièrement difficile à faire passer des plans de l’architecte à la réalité d’une prairie en pente de la région parisienne, puisque son avant-garde, autant dans la structure que dans les formes, a bousculé les idées arrêtées et façons de faire des ouvriers chargés de lui donner vie.
Cela a entraîné des retards dans la livraison de cette résidence secondaire commandée à l’architecte par Pierre et Émilie Savoye, de richissimes assureurs français, et induit une augmentation des coûts de production.
Une complexité désormais facile à palper, du bout des doigts, en tentant de remonter les pilotis, les toits terrasses, les plans libres dégagés, les fenêtres en longueur et les façades libres qui ont façonné le travail de Le Corbusier et qui donnent toute la valeur à cette villa.