Pour l’amour du ciel!

Des raquetteurs sur le sentier des escarpements au parc du Mont-Mégantic.
Photo: Caroline Montpetit Le Devoir Des raquetteurs sur le sentier des escarpements au parc du Mont-Mégantic.

Au-dessus de nous, un ciel clair. La constellation d’Orion tend son arc dans l’espace, avec, accrochée à sa ceinture, sa nébuleuse où cogite une nouvelle génération d’étoiles. Dans l’oeil du télescope, monté dans le froid de janvier, la lune nouvelle dévoile ses cratères. Nous sommes dans le parc national du Mont-Mégantic, là où depuis des décennies des scientifiques observent le ciel pur du Québec, loin de la pollution lumineuse des grandes villes.

Cet hiver, chaque samedi, le parc organise une sortie aux flambeaux dans les sentiers de raquette, précédée d’un souper trois-services et suivie d’une soirée d’astronomie à l’Astrolab du parc, petit musée dédié à l’astronomie où est diffusé (en 20 minutes !) un film sur l’histoire du Big Bang…

C’est sur le sommet du mont Mégantic que l’observatoire scientifique — « Le plus petit des grands observatoires du monde », souligne le directeur Pierre Goulet —, a été construit au milieu des années 1970.

Deux décennies plus tard, le parc du Mont-Mégantic était créé. Si l’observatoire scientifique demeure fermé au grand public, le parc compte un observatoire populaire où il tient des soirées d’observation pour tous durant l’été. L’Astrolab, animé par Sébastien Giguère, le coordonnateur scientifique et responsable de l’éducation, tient pour sa part des activités toute l’année.

De son côté, le parc offre des kilomètres et des kilomètres de sentiers de randonnée de raquette, de marche et de ski de fond. Depuis quelques années, un nouveau secteur y a été ouvert, celui de Franceville, par lequel on peut longer la crête qui entoure la montagne et contempler les plaines avoisinantes à perte de vue.

Situé en retrait des grandes routes qui ont porté la colonisation du Québec, celle du fleuve, par exemple, ou celle liant Montréal à New York, la région du Mont-Mégantic a connu un développement tardif.

En fait, ce sont des colons venus d’Écosse, puis de France, qui en ont assumé les premiers développements, alors que le territoire relevait de la compagnie britannique British American Land Corporation (BALCO).

Après avoir fait cartographier la région par David Thompson, au XIXe siècle, la BALCO s’est demandé qui pourrait bien la coloniser, sans route ni facilité : « Ils se sont dit : « On n’a rien qu’à envoyer les Écossais. »»

«On va aller chercher les Écossais, on va leur faire croire que c’est un super-beau territoire, car de toute façon ils sont en train de mourir de faim en Écosse », explique Camille Antoine Ouimet, responsable du service de la conservation et de l’éducation au parc. « Ce sont vraiment des Écossais qui sont venus ici pour essayer de survivre et travailler à l’exploitation forestière. »

Ainsi, pendant trois décennies, on ne parlera que le gaélique dans la région.

 

Ce sont donc les Écossais, puis les Français par la suite, qui ont donné leurs noms aux villages voisins de Scotstown et de Nantes, ainsi, bien sûr, qu’au secteur de Franceville.

Le village de La Patrie, pour sa part, doit son nom à l’effort de rapatriement des Canadiens français partis travailler dans les usines de textile dans le nord-est des États-Unis.

« [Les politiciens] ont voulu rapatrier les Canadiens français au Québec. Il y a eu l’Acte de rapatriement. Et dans la même mouvance, des territoires ont été désenclavés pour que les gens reviennent et prennent possession d’une terre ».

Parallèlement, des religieux ont recruté des Français, auxquels on a aussi fait miroiter des terres cultivables extraordinaires, « où il n’y avait plus qu’à mettre des semis », poursuit M. Ouimet.

Dans la réalité, le froid des hivers et la faible qualité de la terre, pierreuse et pleine de souches, a eu raison de ces colons qui ont finalement quitté la région, souvent vers Montréal. « Même parmi les Écossais, il y en a plusieurs qui sont allés ailleurs. Et, tranquillement, il y a vraiment eu un retour en masse des Canadiens français », poursuit-il.

Ceux-ci vont jusqu’à changer le nom de certains sites : Lingwick sera rebaptisé Sainte-Marguerite-de-Lingwick ; le mont Victoria deviendra le mont Saint-Joseph ; et un sanctuaire portant son nom, où on célèbre encore occasionnellement des messes et qui a été récemment restauré, sera érigé par les catholiques.

Avant ou après la balade aux flambeaux, on peut donc arpenter le territoire sauvage du parc, où des cougars sont soupçonnés de circuler. On peut même y passer une ou plusieurs nuits dans les refuges et les chalets rustiques nouvellement construits, ou encore, pour plus de confort, dans les EXP, ces nouvelles constructions fenestrées développées par la SEPAQ, où on peut coucher en pleine nature, avec chauffage, eau chaude et foyer compris.

 

En été, les EXP du parc du Mont-Mégantic permettent même d’observer les étoiles au lit, puisque les toits y sont percés de puits de lumière, malheureusement recouverts de neige actuellement.

Les randonnées aux flambeaux se tiennent chaque samedi jusqu’au 28 mars, puis les 4, 5 et 6 mars, durant la relâche scolaire.

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