Montréal 2005 - Michael Phelps en tête, tout le monde à l'eau

C’est en plongeon que le Canada entretient ses plus grands espoirs.
Photo: C’est en plongeon que le Canada entretient ses plus grands espoirs.

L'un des aléas de la présentation de championnats du monde dans une année postolympique réside dans l'absence de plusieurs grands noms. Avant de reprendre la longue préparation qui mène aux Jeux suivants, on en profite pour faire le vide, se reposer, passer du temps de qualité en compagnie de la petite famille, guérir les bobos qui guettent toutes les mécaniques si parfaites soient-elles.

À Montréal, il semble qu'on a pu éviter l'essentiel des dégâts, mais les Championnats du monde FINA 2005, dont le volet compétitif s'amorce demain, se dérouleront tout de même sans deux des trois plus grands noms de la natation planétaire, l'Australien Ian Thorpe dit la Thorpille et le Néerlandais Pieter van den Hoogenband dit VDH. Dans leurs sites Internet respectifs, le premier, qui a repris l'entraînement à temps plein, évoque un forfait essentiel à la prolongation de sa carrière, le second invoque une hernie.

Mais l'autre très grosse pointure, l'Américain Michael Phelps, sera, lui, au rendez-vous, et il a d'ailleurs déjà annoncé, pendant une visite à l'île Sainte-Hélène en mai, que les chronos, à commencer par les siens faut-il comprendre, allaient être rapides.

Coqueluche des Jeux d'Athènes où il a remporté huit médailles dont six d'or, Phelps, à 20 ans, détient quantité de records et sa... biographie, Beneath the Surface, a été récemment publiée. À Montréal, il est la tête d'affiche, qu'on ne verra cependant pas avant quelques jours puisque les épreuves de natation ne commencent que dimanche prochain.

Son parcours depuis Athènes s'est cependant un peu éloigné du conte de fées sportif traditionnel. En novembre dernier, il s'est fait pincer en état d'ébriété au volant sur une route du Maryland, ce qui lui a valu une amende en plus de se faire imposer de prendre part à des rencontres de Mothers Against Drunk Driving. Il doit aussi prononcer des allocutions dans des écoles sur les méfaits de la boisson. «Je reconnais que j'ai commis une erreur sérieuse, a-t-il alors dit. J'ai appris de cette erreur et je vais continuer d'apprendre pendant toute ma vie.» Phelps est toujours en probation, mais cela ne l'a guère ralenti dans la piscine: aux qualifications américaines pour ces championnats, en avril, il a raflé cinq titres, et en a gagné six lors d'une rencontre à l'université Stanford en mai.

À Montréal, Phelps sera accompagné de ses compatriotes Aaron Piersol, le roi du dos triple médaillé à Athènes, et Brendan Hansen, le maître de la brasse. On verra aussi l'Australien Grant Hackett, que personne n'approche sur 1500 m. Chez les dames, il faudra garder à l'oeil les Australiennes Leisel Jones et Jodie Henry, cette dernière auteure de trois marques mondiales à Athènes. De même, la Française Laure Manaudou, étonnante gagnante, à 17 ans à peine, du 400 m libre aux Jeux de 2004, la première femme de son pays à remporter l'or en natation.

Côté canadien, il ne faut pas s'attendre à des miracles. On se souvient du brouhaha qui avait fait écho aux contre-performances du Canada l'an dernier. Depuis, celui qui a présidé ces dernières années aux succès de l'équipe d'Australie, Pierre Lafontaine, a été rapatrié. Mais la reconstruction prendra un certain temps.

C'est de fait en plongeon que le pays hôte entretient ses plus fébriles espoirs. Ennuyé par des maux de dos, Alexandre Despatie ne s'est inscrit qu'au tremplin de 3 mètres, passant outre à sa spécialité qu'est la tour de 10 m, un geste qu'il a déclaré regretter aujourd'hui puisqu'il se sent en pleine forme. Despatie fera de nouveau face, entre autres concurrents, au Chinois Bo Peng, qui lui avait sifflé la médaille d'or à Athènes.

Émilie Heymans peut aussi songer au podium, et peut-être deux fois plutôt qu'une. Mais ce sont les éternelles Chinoises, Jingjing Guo et Wu Minxia, qui risquent fort de passer devant tout le monde. On pourra aussi admirer la vétérane Chantelle Newbery, d'Australie, première au 10 m en Grèce.

Chez les messieurs, une dernière occasion, selon toute probabilité, de voir à l'oeuvre le «vieux» (31 ans) champion russe Dmitri Sautin, sept fois médaillé en quatre Jeux olympiques. Il concourra en synchro cette semaine.

Au water-polo, on pourrait assister côté masculin à une revanche de la dernière finale olympique, qui avait vu la Hongrie vaincre in extremis la Serbie-Monténégro, 8-7, dans un affrontement rien moins qu'épique. Les connaisseurs soutiennent d'ailleurs que le coeur de l'équipe magyare, le colosse de 6 pieds 7 pouces Tamas Kasas — une espèce d'iceberg, en quelque sorte, puisque la partie immergée est largement plus considérable que l'émergée, mais à cette dimension, on l'appelle monsieur l'iceberg —, vaut à lui seul le détour. Les Russes possèdent aussi une formation redoutable.

Chez les dames, l'équipe canadienne s'était un peu déçue elle-même en terminant au septième et avant-dernier rang à Athènes, mais elle s'est depuis qualifiée pour la finale de la Ligue mondiale plus tard cet été. On dit le plus grand bien de sa gardienne de but de 19 ans format géant, Rachel Riddell. Les Italiennes, les Américaines et les Grecques seront particulièrement à surveiller.

En nage synchronisée, impossible de ne pas se tourner vers les deux Anastasia, Ermakova et Davydova, inséparables depuis six ans et ayant accédé à la plus haute marche du podium à Athènes. Par ailleurs, on a un sérieux faible pour la Française Virginie Dedieu, championne du monde en solo, qui évolue avec pas de pince-nez comme quand il y avait juste six piscines. L'équipe canadienne, formée en majorité de Québécoises, est en transition et c'est surtout Pékin 2008 qu'elle a dans sa lorgnette.

Enfin, la nage en eau libre est la seule discipline non olympique faisant partie des Championnats du monde FINA. Trois épreuves sont au programme tant chez les hommes que chez les femmes: 5, 10 et 25 km, cette dernière course durant entre cinq et six heures. On a hâte de voir ça. Nos sources agrippées à la bouée nous susurrent que l'Allemande Britta Kamrau et la Néerlandaise Edith van Dijk sont particulièrement redoutables, de même que l'Australien Brendan Capell. Les compétitions auront lieu au bassin d'aviron de l'île Notre-Dame, donc en eau pas vraiment libre, ce qui pourrait créer de l'inattendu.

Reste maintenant à savoir combien de spectateurs accourront pour applaudir toute cette belle jeunesse en action.

À voir en vidéo