À Tokyo, l’épreuve de la chaleur

À bout de souffle, le front dégoulinant de sueur, plié en deux sur sa raquette entre les points : tel était le sort du joueur de tennis Daniil Medvedev lors de son match de mercredi matin contre l’Italien Fabio Fognini. Le Russe vivait mal l’humidité et la chaleur étouffante de Tokyo, et semblait bien peu disposé à s’éloigner des jets d’air frais.
Medvedev, qui haletait lorsque l’officiel Carlos Ramos lui a demandé s’il comptait terminer l’épreuve, s’est exclamé : « Je peux finir le match, mais je peux mourir. Si je meurs, vas-tu être responsable ? »
Que se passait-il dans le corps de cet athlète de haut niveau pour qu’il en arrive là ? Il souffrait des effets du stress thermique, note Éric Goulet, professeur en sciences de l’activité physique à l’Université de Sherbrooke.
« Au repos, l’humain produit [naturellement] de la chaleur pour maintenir une température corporelle d’environ 37 °C, explique le chercheur. En fonction des conditions ambiantes, l’organisme va s’adapter. À l’exercice — ou lorsqu’on est exposé à la chaleur —, tant que la température de la peau est plus élevée que la température ambiante, le corps peut s’adapter. »
Ce n’est pas le cas pour tous les athlètes des Jeux de Tokyo, qui font face à des températures perçues dépassant souvent celle du corps humain en raison de l’humidité. Et tout particulièrement ceux qui s’activent sur une longue période dans des lieux qui ne sont pas climatisés, comme au soccer ou au tennis.
Je peux finir le match, mais je peux mourir. Si je meurs, vas-tu être responsable?
Comment, exactement, la température élevée à Tokyo affecte-t-elle le corps des athlètes ? C’est le principe de convection — le transfert de chaleur entre deux substances adjacentes — qui entre en jeu ici : lorsque la peau est en contact avec de l’air chaud, le corps gagne en chaleur. Medvedev, en traînant à côté des jets d’air frais, utilisait ce même principe en sens inverse.
En temps normal, l’augmentation de l’afflux sanguin vers la peau va donc permettre au corps de se refroidir.
Mais si ce n’est pas suffisant (en raison d’une importante activité physique, par exemple), la transpiration se met de la partie. La chaleur supplémentaire se mélange alors à la sueur, et sous l’effet de cette énergie, celle-ci va changer de phase, passant de l’état liquide à l’état gazeux, explique le professeur Goulet. « C’est l’évaporation de ces gouttelettes qui va permettre la perte de chaleur. Mais si l’environnement est très humide, l’air est déjà saturé d’eau et va rendre difficile cette évaporation. »
Que faire, alors ? S’éponger le front avec une lingette mouillée ? Boire de l’eau froide pour aider le corps à s’apaiser ? Les sportifs le font déjà. Dans les conditions météo de Tokyo, ces soulagements sont brefs et négligeables. Medvedev, qui a finalement gagné son match de mercredi malgré ses souffrances, arrivera-t-il à supporter encore l’épreuve de la chaleur ?