Les Italo-Montréalais en deuil misent sur l’humour

L’élimination de l’Italie lors des qualifications a choqué les Italo-Montréalais, notamment le chef Stefano Faita.
Photo: Guillaume Levasseur Le Devoir L’élimination de l’Italie lors des qualifications a choqué les Italo-Montréalais, notamment le chef Stefano Faita.

La Coupe du monde de soccer qui est sur le point de débuter rassemblera les meilleures équipes de la planète… ou presque, diront les partisans de la communauté italienne de Montréal, qui n’ont pas encore digéré l’exclusion de leur équipe nationale pour la première fois depuis 1958. Dans la Petite Italie, l’absence de la Squadra Azzurra a heurté l’orgueil des Italo-Montréalais, mais pas leur sens de l’humour.

En temps normal, l’ambiance est électrique dans la Petite Italie à quelques jours du début de la Coupe du monde de soccer. Sur le boulevard Saint-Laurent, au sud de la rue Jean-Talon, les commerçants affichent leurs couleurs et des drapeaux italiens flottent à chaque coin de rue.

Pas cette fois, constate Ivano Vellone, qui nous accueille dans sa boutique de vêtements sportifs et d’uniformes Calcio. « Je ne sais pas si c’est parce que l’Italie n’y est pas, mais on ne sent aucune fièvre », observe-t-il à regret.

Cette année, les drapeaux tricolores ont été remplacés par une grande banderole rose qui surplombe le boulevard Saint-Laurent. « GO Tout le monde sauf la Suède GO », est-il écrit en lettres géantes, en guise de clin d’oeil aux tombeurs de l’Italie lors des qualifications du tournoi qui commence jeudi.

Campagne promotionnelle

 

« Quand l’Italie a été éliminée, tout le monde était vraiment triste », se souvient Cristina D’Arienzo, qui dirige la Société de développement économique de la Petite Italie et du marché Jean-Talon. « On s’est demandé ce qu’on pourrait faire et on a décidé de changer le négatif en positif. »

Son organisation a lancé une campagne de promotion humoristique qui a débuté par un coup d’éclat le 4 juin dernier : à deux jours de la fête nationale de la Suède, elle s’est offert une pleine page de publicité dans un quotidien suédois pour faire savoir que la communauté montréalaise appuiera tous les adversaires du pays scandinave.

Photo: Guillaume Levasseur Le Devoir «Tout le monde sauf la Suède», est-il inscrit sur la grande banderole rose qui surplombe le boulevard Saint-Laurent.

La banderole est ensuite apparue, tout comme une vidéo largement diffusée sur les réseaux sociaux. « En créant un nouvel ennemi, on veut donner aux Italiens une autre raison de suivre la Coupe du monde, mais aussi inviter les partisans de toutes les autres nationalités à venir regarder le soccer chez nous », explique Mme D’Arienzo.

Dans le quartier, la campagne de la SDC fait sourire, mais tous les commerçants rencontrés s’entendent pour dire que l’absence de l’Italie aura un impact réel sur leur chiffre d’affaires.

« Dans la Petite Italie, une Coupe du monde sans l’Italie, ce n’est pas une Coupe du monde », lance Stefano Faita, le volubile chef qui possède plusieurs restaurants dans le secteur.

« C’est sûr que, pour nous, économiquement, ce n’est pas super. Pendant la Coupe du monde, les gens viennent manger en famille et entre amis à toute heure du jour, dit-il. On n’aura pas la même énergie cette année. »

Cristina D’Arienzo rappelle qu’en 2006, lorsque l’Italie a remporté son quatrième titre de la Coupe du monde, près de 100 000 personnes se sont déplacées dans la Petite Italie pour festoyer. Une clientèle qui ne sera sans doute pas au rendez-vous cette année.

Vente au rabais

 

Sur Saint-Laurent, la boutique de soccer Evangelista Sports fourmille en cette fin d’avant-midi. Les clients scrutent les chandails des équipes nationales, qui partent comme de petits pains chauds à ce temps-ci de l’année.

« Sans l’Italie, on vend d’autres équipes, explique Carmelo Sansalone, l’un des gérants de la boutique. Pour la France ou la Colombie, je n’ai même pas le temps de mettre les chandails sur les cintres qu’ils sont partis. »

Les uniformes de l’Italie sont mis en évidence, comme d’habitude, mais les présentoirs sont pleins. Et, surtout, les chandails sont vendus au rabais.

« La dernière fois que l’Italie a été exclue de la Coupe du monde, j’avais encore les cheveux noirs », affirme Sergio Porcari, un bijoutier pince-sans-rire qui tient boutique depuis plus de 25 ans dans la Petite Italie.

Comme bien des Italo-Montréalais, il espère que l’Argentine l’emportera, puisque l’équipe d’Amérique du Sud compte plusieurs joueurs qui évoluent dans la ligue italienne, comme la vedette de la Juventus Gonzalo Higuaín.

Stefano Faita, lui, penche pour le Mexique. Mais il espère avant tout que la fête du soccer, qui rend son quartier si spécial tous les quatre ans, battra son plein malgré tout dans les prochaines semaines.

 

« Ce n’est pas parce que l’Italie n’est pas à la Coupe du monde qu’on n’est plus des partisans de soccer ! »

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