William, Kate et Harry, les pions de la reine

Une caricature célèbre montre Elizabeth II en tenue régalienne, diadème et médailles, dans une salle d’opérations de la Royal Air Force lors du Blitz, en 1940. La souveraine déplace à sa guise des pions à l’effigie des membres de sa famille. C’est bien vu. En effet, lors des Jeux olympiques, la souveraine a mis William, Kate et Harry au centre de l’échiquier, sous la lumière des projecteurs.
Le trio s’est divisé la tâche de représentation selon ses affinités personnelles. William a passé la quinzaine à soutenir les athlètes britanniques à la natation, à l’athlétisme, au cyclisme, à l’aviron et au judo. Kate, elle, a adressé le même sourire bienveillant aux gymnastes, aux joueurs de tennis et aux athlètes de la voile. Quant à Harry-le-tombeur, il a été partout où il y avait de jolies filles, à commencer par le vélodrome et le terrain de volleyball de plage.
Le sport est un terrain familier pour les « Junior Royals ». William, qui a pratiqué le water-polo au pensionnat d’Eton, est un grand amateur de football. Kate a été capitaine de l’équipe de hockey du collège privé de Marlborough et joue en double au tennis. Harry a décroché un diplôme de moniteur de rugby.
Pas question, en revanche, d’entendre leur voix. Les journaux ont dû se contenter de joyeux clichés, et les collectionneurs de potins en ont été pour leurs frais. Pourtant réputée pour la qualité de ses silences, la reine a été la seule à s’exprimer en public. Projeté au cours de la cérémonie d’ouverture, son « Good Evening Mr. Bond » a valu tous les discours du trône. Clap final.
Pour une femme de sa génération, Sa Majesté, âgée de 86 ans, est très attentive au visuel, à la symbolique de sa fonction. « Elle est experte en angles et en caméras », a déclaré le cinéaste Danny Boyle, chorégraphe en chef de la grand-messe du 27 juillet, révélant qu’une seule prise de vue avait été nécessaire. Le chef de l’État a repris à son compte la réflexion du publicitaire Jacques Séguéla, conseiller de l’image de François Mitterrand : « Le message, c’est la télé, puisqu’elle est le premier des médias. Or la télé est émotion, donc le message est émotion. »
Certes, la dynastie Windsor ne s’est jamais aussi bien portée, sa popularité dépassant toutes les autres institutions du pays. Mais, au cours de son long règne, Elizabeth II a appris qu’il ne faut rien tenir pour acquis, que l’existence de la monarchie dépend de son image publique.
La mobilisation des jeunes du clan à l’occasion des JO participe d’une stratégie médiatique destinée à rendre la monarchie plus familière, donc populaire, dans le cadre des festivités en 2012 marquant le jubilé de diamant. Dans son entrevue au Times, le prince Albert de Monaco a évoqué « un côté délicat, que vous ne voyez jamais en d’autres circonstances, et qui ne peut que rapprocher la famille royale britannique de ses sujets ».
Bigre, il faut le reconnaître, quand le Palais veut communiquer, il sait comment s’y prendre.