Les villes se réjouissent des nouvelles règles en matière d’expropriation

La perspective de pouvoir procéder à des expropriations à moindre coût réjouit les municipalités, qui réclamaient depuis des années que le régime d’expropriation soit réformé comme s’apprête à le faire la ministre des Transports et de la Mobilité durable, Geneviève Guilbault, avec le dépôt d’un projet de loi.
Ce texte visant à modifier la Loi sur l’expropriation prévoit notamment que les indemnités devront être calculées en fonction de la valeur marchande du bien exproprié et non sur la valeur au propriétaire ou selon les revenus qu’un propriétaire pourrait en tirer dans le futur, révélait La Presse mardi.
« Pour nous, c’est de la musique à nos oreilles. C’est quelque chose que l’on demande depuis très longtemps. Ça va nous donner de l’oxygène, nous donner les moyens de nos ambitions quand il est question d’acquérir des terrains », a déclaré mardi la mairesse Valérie Plante, en marge de la tenue de l’Agora de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM).
Elle a cité le cas du prolongement de la ligne bleue, qui a forcé la Ville de Montréal et le gouvernement du Québec à payer trois à quatre fois le prix anticipé pour les expropriations. « C’est de l’argent qu’on pourrait mettre ailleurs. » Elle a rappelé que le Québec était la seule province canadienne à avoir un régime basé sur la valeur potentielle d’un site. « Alors, on est très satisfaits. C’était la chose à faire. »
Maire de Varennes et récemment élu à la présidence de l’Union des municipalités du Québec, Martin Damphousse était lui aussi soulagé par les changements de règles prévus en matière d’expropriation. À cet effet, M. Damphousse a cité l’exemple du règlement de contrôle intérimaire adopté en juin 2022 par la CMM afin de mettre à l’abri du développement immobilier des golfs de la région métropolitaine et de les convertir en espaces verts ou en milieux naturels.
« Mais il y a plusieurs entreprises propriétaires de golfs qui aimeraient évaluer les terrains en fonction d’un futur zonage. Très souvent, ces espaces ont un zonage parc ou golf, mais les propriétaires estiment que la valeur marchande doit se faire en fonction d’un futur zonage. Donc, ils parlent de 300, 400 ou 500 millions, a-t-il expliqué. La nouvelle loi sur l’expropriation vient définir que c’est en fonction de la valeur réelle d’aujourd’hui. Juste là, la différence est majeure. »
Des impacts sur l’attractivité économique
De son côté, l’Institut du développement urbain du Québec (IDU), qui représente les promoteurs immobiliers, estime que l’expropriation est un « pouvoir exorbitant » qui porte atteinte aux droits des propriétaires.
« Exproprier, c’est d’abord confisquer. L’exproprié est dépouillé de son bien contre son gré. Et même s’il avait été d’accord pour vendre son bien, le moment où il est exproprié n’est pas nécessairement celui où il aurait choisi de vendre pour en obtenir le meilleur prix ou les meilleures conditions », souligne une analyse réalisée par le Cercle juridique de l’IDU en septembre dernier.
Selon son président-directeur général, Jean-Marc Fournier, le vocabulaire change d’une province à l’autre, mais les systèmes d’indemnisation sont équivalents dans toutes les provinces. « Si Québec réduit la valeur de l’indemnisation et donc la valeur du droit de propriété, cela pourrait réduire l’attractivité économique du Québec, fait valoir M. Fournier dans un courriel. Au minimum, le gouvernement devrait faire faire une analyse indépendante des conséquences de ce choix avant de procéder au vote sur le projet de loi. »