Vers des quartiers plus denses dans le Grand Montréal
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Grand Montréal
La révision du Plan métropolitain d’aménagement et de développement du Grand Montréal (PMAD) doit permettre aux 82 municipalités de la grande région de Montréal de se donner des cibles pour parvenir à une occupation plus durable de leur territoire. Au menu, des quartiers résidentiels plus denses, mais aussi plus diversifiés et plus conviviaux pour les résidents.
La densification plus rapide que prévu de la population aux abords des grandes infrastructures de transport collectif, dans des quartiers TOD (pour Transit-Oriented Development ou développement orienté vers le transport collectif, en français), donne un élan aux élus de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM). Maintenant que la cible de concentrer 40 % de la croissance des ménages à proximité des stations de métro et du REM, de même que des réseaux rapides par autobus, est atteinte, les élus de la grande région de Montréal appuient sur l’accélérateur. Ainsi, 60 % de la croissance démographique attendue d’ici 2031 devra s’y concentrer, et cette cible pourrait être haussée dans le cadre de la révision du PMAD. « On est très ambitieux », reconnaît Guillaume Tremblay, maire de Mascouche. « Le dernier PMAD, entré en vigueur en 2012, comportait déjà des objectifs ambitieux, ajoute l’élu, qui fait partie du comité de révision du plan. Mais on a démontré, les 82 villes ensemble, qu’on est capables d’atteindre de pareils objectifs. »
Créer des milieux de vie
Un des objectifs qui orientent la révision du PMAD est de créer des milieux de vie denses qui permettent d’accélérer la transition écologique. « On ne veut pas densifier le tissu urbain simplement pour le densifier », dit Philippe Rivet, chef d’équipe Habitation et Monitoring à la CMM. « On veut encourager une densification réfléchie, dans le sens où on veut créer des milieux de vie complets, caractérisés par une mixité d’activités et d’usages, pour permettre aux gens d’y habiter et d’y travailler tout en ayant accès à un maximum de services en transport actif ou collectif », explique le fonctionnaire. « Ça veut dire des espaces verts, une accessibilité piétonne, des pistes cyclables, du transport collectif, des écoles et des infrastructures culturelles », ajoute le maire de Mascouche, qui souligne qu’il faudra la collaboration des 82 municipalités du territoire pour que le plan fonctionne.
Le consensus entre les municipalités du Grand Montréal paraît d’autant plus important qu’à peine 35 % des logements du territoire présentent une bonne accessibilité piétonne aux commerces et aux services. À l’extérieur de la ville de Montréal, cette proportion chute radicalement.
Construire en hauteur
La demande de logements augmentera aussi de façon sensible au cours des prochaines années. Selon les estimations de la CMM, 460 000 nouveaux logements devront être construits sur le territoire du Grand Montréal pour assurer une plus grande abordabilité du logement d’ici 2030, ajoute le maire de Mascouche.
Selon Philippe Rivet, les municipalités du territoire disposent de l’espace nécessaire pour intégrer tous ces nouveaux logements, sans devoir s’étendre et empiéter sur les terres agricoles. « Avec nos partenaires, on a relevé les espaces vacants et à redévelopper sur l’ensemble du territoire. Ce qu’on constate, notamment dans les aires TOD, c’est qu’il y a suffisamment d’espace pour accueillir la croissance, mais ça demande la mise en place de cibles de densification ambitieuses », dit-il.
Pour y arriver, il faudra donc construire en hauteur et faire preuve de créativité, affirme Guillaume Tremblay. « On n’est plus à l’ère du bungalow, où on construisait 20 logements par hectare. On est davantage dans le 100, 150, 200 logements par hectare, souligne l’élu. Il est clair que ces maisons-là devront être construites de manière verticale, et non horizontale. »
De nombreux espaces présentent un fort potentiel de densification et permettraient de créer des milieux de vie complets, indique Philippe Rivet. « C’est le cas des centres commerciaux, notamment. Plusieurs se trouvent à proximité du transport collectif, fait-il remarquer. Leurs espaces sont souvent sous-utilisés, et ils offrent des occasions de densification intelligente qu’on ne peut pas laisser passer. »
Mixité sociale et logements abordables
Parmi les défis qui attendent les municipalités du Grand Montréal, ceux de la mixité sociale et de la construction de logements abordables se démarquent. Il faut plus de logements sociaux pour aider les ménages les plus défavorisés, soutient Richard Ryan, consultant expert en habitation et conseiller municipal à la Ville de Montréal durant 12 ans, mais aussi des habitations que les citoyens de la classe moyenne auront les moyens d’habiter.
« On constate que 60 % des ménages de l’île de Montréal ne peuvent pas se payer, en ce moment, un logement sans gruger plus de 30 % de leurs revenus bruts », note-t-il. De façon très concrète, explique l’expert en habitation, un ménage dont le revenu annuel est de 100 000 $ à 110 000 $ ne peut pas trouver un logement sans devoir toucher aux autres postes de dépenses de son budget.
Comme pour confirmer l’ampleur du défi qui attend les élus, la part des logements sociaux et communautaires dans le stock total disponible a diminué dans la région ces dernières années. Et un ménage locataire sur sept (14 %) du Grand Montréal montre par ailleurs des besoins impérieux en matière d’habitation.
Pour Richard Ryan, une partie de la solution au problème du logement passe par les OBNL et les coopératives, comme Interloge, qui possède plus de 800 logements à l’heure actuelle. « Ce sont des appartements qui se louent très en dessous du prix courant », précise l’expert. Philippe Rivet ajoute que la CMM, dans le cadre de sa Politique métropolitaine d’habitation adoptée en 2022, a annoncé qu’elle désirait intégrer des cibles de logement social et abordable dans le cadre de la révision du PMAD.
Un développement intelligent
Pour que toutes ces bonnes intentions débordent de l’île de Montréal, ajoute le maire de Mascouche, les municipalités de l’ensemble du territoire devront pouvoir compter sur un réseau de transport collectif véritablement structurant. « On va contribuer à la densification urbaine, assure Guillaume Tremblay, mais en contrepartie, ça va prendre des investissements majeurs de la part du gouvernement du Québec pour permettre à nos résidents de ne plus avoir deux ou trois voitures dans leur cour, mais d’en avoir une et de pouvoir compter sur du transport en commun efficace. »
Le maire Tremblay parle en connaissance de cause. Le service de train qui relie sa municipalité au centre-ville de Montréal présente de nombreuses faiblesses, selon lui. « Pour le moment, le train, c’est quatre départs le matin et quatre le soir. Ça n’a aucun, aucun, aucun sens », soutient-il, tout en ajoutant que les travaux d’aménagement du REM ont fait mal aux adeptes du transport en commun. « À cause du tunnel modifié avec l’arrivée du REM, notre train ne se rend plus directement au centre-ville. Il faut faire un méchant détour. Ça nous prend 1 heure 45 minutes pour nous rendre au centre-ville en train. Ça incite les gens à prendre leur auto », observe le maire.
« La réflexion intelligente en matière de développement, c’est se dire qu’on fait un développement en fonction de la qualité de vie. On pense au bruit, aux déplacements et à l’utilisation des espaces dans les rues qu’on va développer », dit Nadine Viau, mairesse de Beloeil, dont la municipalité planifie en ce moment le développement des derniers lots résidentiels disponibles de son territoire.
« On a fait appel à la firme d’architectes de Pierre Thibault [l’un des fondateurs de Lab-École], explique l’élue. On veut créer des espaces qui n’ont jamais été considérés dans les plans d’urbanisme à Beloeil jusqu’à présent. On envisage d’intégrer, par exemple, des percées visuelles, autant vers les champs que vers les zones agricoles, les couchers de soleil et la montagne », raconte la mairesse.
Qu’est-ce qu’un TOD ?
TOD est l’acronyme de « Transit-Oriented Development », ou développement orienté vers le transport collectif, en français. Un TOD correspond à l’aire d’un kilomètre qui entoure une station de métro, de train de banlieue ou, bientôt, du Réseau express métropolitain (REM). Les secteurs situés dans un rayon de 500 mètres des réseaux rapides par autobus constituent aussi des TOD. La CMM souhaite que 40 % de la croissance démographique (60 % avec l’entrée en service du REM) se concentre autour de l’un ou l’autre des 159 TOD de son territoire d’ici 2031.Ce contenu spécial a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.