Les municipalités en action face à la pénurie de logements
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Municipalités
Dans les villes de Terrebonne et de Mascouche, dans Lanaudière, la pénurie de logements atteint de nouveaux records. Seulement 0,1 % des logements privés locatifs étaient inoccupés en 2021 dans la MRC, selon les plus récentes données de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL). Et cette situation est loin d’être un cas d’exception au pays.
« Au Canada, on a observé une croissance de la population très forte dans les dernières années, mais on observe que la construction n’a pas suivi le rythme de la croissance de la population, note Jean-François Perrault, économiste en chef à la Banque Scotia. On parle d’un déficit [de logements] très important. On parle de dizaines ou de centaines de milliers d’unités [manquantes] en fonction de la ville. Il y a eu un sous-investissement marqué dans l’habitation sociale, poursuit l’expert. C’est un problème qui va prendre plusieurs années à se régler. »
Le gouvernement fédéral a récemment annoncé l’investissement de 4 milliards de dollars sur cinq ans pour créer 100 000 nouveaux logements au pays. En février, l’UMQ a de son côté adopté la Déclaration municipale sur l’habitation, qui propose des pistes d’action pour le gouvernement du Québec comme le déploiement d’une nouvelle programmation de 4500 nouveaux logements sociaux par année dans la province. Le thème de la pénurie de logements occupera d’ailleurs une part importante des assises de l’UMQ, qui se tiendront les 12 et 13 mai prochains, avec le grand forum L’habitation d’abord. Entre abordabilité, accessibilité et équité.
Selon Jean-François Perrault, qui figure parmi les panélistes du forum, les municipalités ont d’ailleurs un rôle de premier plan à jouer dans la résolution de la crise. « La construction de nouveaux logements, c’est essentiellement une question de responsabilité municipale. On parle de réglementation, de la rapidité à laquelle on approuve les choses, de règles de zonage. Donc, le gros frein à la construction, c’est davantage au niveau municipal qu’à d’autres paliers du gouvernement », observe celui qui note qu’une pression contre le développement immobilier est souvent exercée par les citoyens sur les élus municipaux. « On ne veut pas avoir de tours d’habitation à côté d’une maison, on ne veut pas avoir plus de trafic, on ne veut pas avoir toutes sortes de choses, illustre l’économiste. S’il y avait ce désir d’accepter plus de gens (dans son quartier), il y aurait plus de facilité à accommoder la croissance de la population. »
Réduire les préjugés
Dans la ville de Mascouche, de fait, le maire Guillaume Tremblay et son équipe ne chôment pas afin de résoudre la grande pénurie de logements dans leur municipalité. « Au niveau local, on a le pied dans le plancher pour avoir davantage de logements abordables et de logements sociaux avec la densification des secteurs », dit celui qui prévoit la construction de 6500 nouveaux logements sur le territoire d’ici 2040.
La Ville de Mascouche est d’ailleurs en train de réviser son plan d’urbanisme, se réjouit le maire. Incluant une consultation citoyenne, le nouveau plan sera en vigueur dès 2023. Plusieurs règlements pourraient ainsi être assouplis, illustre M. Tremblay, concernant l’agrandissement de maisons ou le rétrécissement des espaces entre les bâtiments. Le maire de Mascouche propose aussi de donner le droit de premier refus à la Ville, permettant à celle-ci d’acquérir des propriétés aux mêmes prix et conditions que ceux contenus dans une offre d’achat afin de créer des logements sociaux.
« La crise est telle qu’il faut “sortir de la boîte” de tout ce qu’on est habitués [de faire], croit Guillaume Tremblay. Il faut permettre aux villes de se déployer rapidement, de faire preuve d’innovation sur le plan du logement, revoir les règles d’urbanisme. Mais il va peut-être falloir accepter, collectivement, d’avoir du logement social, abordable », note le maire, qui propose une campagne promotionnelle pour réduire les préjugés contre les logements sociaux.
Pénurie de main-d’œuvre
« Maintenant, mon souhait c’est que le gouvernement du Québec travaille très rapidement en collaboration avec le fédéral pour nous assurer d’avoir ces sommes le plus vite possible pour nos groupes qui font du logement abordable », plaide Guillaume Tremblay.
Enfin, un autre problème pointe également à l’horizon. Même si des fonds sont injectés dans l’industrie de la construction, qui bâtira tous ces logements avec la pénurie de main-d’œuvre ?
« Comme dans d’autres industries, il y a une pénurie de main-d’œuvre dans l’industrie de la construction, observe de son côté Jean-François Perrault. Même si l’on voulait accélérer le rythme de construction de façon marquée, est-ce bien possible ? On peut au moins essayer, répond-il, en formant des gens dans le domaine de la construction et en repensant les politiques dans le domaine de l’immigration pour favoriser des gens qui ont des aptitudes dans le domaine de la construction. »
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