Des travaux de dynamitage suscitent des inquiétudes à Laval

Des résidents de Sainte-Dorothée s’inquiètent de travaux de dynamitage qui commencent lundi dans le cadre d’un immense projet immobilier, qui soulève par ailleurs des inquiétudes quant à l’avenir réservé à ce quartier de l’ouest de l’île de Laval reconnu pour sa tranquillité et ses espaces verts.
Du 24 janvier au 31 mars, des travaux de dynamitage auront lieu sur l’ancien champ d’exercice du golf Le Cardinal dans le cadre des premières étapes d’un immense chantier de construction à venir. Le site pourrait en fait accueillir jusqu’à 2800 maisons dans les prochaines années au terme de la réalisation du projet immobilier à basse densité METTA. Celui-ci prévoit aussi le prolongement de plusieurs rues existantes, ce qui créera un tout nouveau quartier au cœur de Sainte-Dorothée, un secteur en pleine ébullition, qui compte actuellement environ 36 000 résidents.
En prévision de ces travaux, plusieurs résidents ont reçu dans les derniers jours un détecteur de monoxyde de carbone, un gaz inodore potentiellement mortel. C’est notamment le cas des résidents de la rue Bonaventure, qui comprend deux rangées d’immeubles résidentiels de quelques étages à quelques mètres de ce terrain de golf.
« Ils nous disent que, si ça se déclenche [l’alarme], il faut appeler le 911 et évacuer tout de suite, donc c’est beaucoup de stress pour moi », raconte Lucia, une résidente d’âge mûr rencontrée sur place jeudi dernier. Une inquiétude que partage sa voisine, Gracilda.
« Ça me stresse parce que j’ai un chien. Si je ne suis pas à la maison [quand l’alarme va sonner] , qu’est-ce qu’il va se passer ? » demande-t-elle avec anxiété. D’autres résidents joints par Le Devoir craignent par ailleurs que ces travaux endommagent la structure de leur logement. « Je suis très inquiète pour ça », dit Isabelle Gagnon, qui demeure également rue Bonaventure.
Le président du groupe immobilier BMP, un des trois promoteurs à l’origine de ce projet, se veut pour sa part rassurant. En entrevue, Jon Morrison précise que ces travaux de dynamitage sont « très mineurs » et se font à une faible profondeur. Quant aux avertisseurs de monoxyde de carbone, ils n’ont été fournis qu’à titre préventif, affirme un sous-traitant de l’entrepreneur général responsable de ce chantier, David Habib.
« Il y a un infime risque qu’avec la déflagration des explosifs, il y ait du monoxyde de carbone qui rentre dans les résidences. Ça peut arriver, mais ça demeure extrêmement rare », explique M. Habib, qui écarte par ailleurs tout risque de répercussions sur les structures des logements voisins du chantier.
Un boom immobilier
Ce projet immobilier fait écho à l’arrivée d’ici quelques années du Réseau express métropolitain (REM), qui comptera une gare à Sainte-Dorothée. Les promoteurs immobiliers du projet METTA misent d’ailleurs en partie sur la proximité de cette future station de train léger pour promouvoir leur mégaprojet immobilier en ligne. Le REM stimule ainsi le développement immobilier dans l’ouest de Laval, comme dans plusieurs secteurs de la région de Montréal, où ce nouveau mode de transport en commun suscite l’intérêt.
« Ce projet-là, c’est vraiment un exemple de la façon dont on peut faire du développement durable et innovant » afin de répondre « aux besoins des familles du futur », fait ainsi valoir Jon Morrison.

Ce projet immobilier, comme d’autres qui pourraient voir le jour sur d’autres espaces verts de l’ouest de l’île de Laval, soulève toutefois plusieurs inquiétudes à long terme auprès des citoyens.
« C’est déjà un secteur qui a de la congestion routière dans les heures de pointe, et on n’a fait aucune analyse de l’impact que pourraient avoir les gros projets » immobiliers à venir sur celle-ci, évoque notamment Jonathan Tremblay, qui demeure depuis plus de 12 ans à Sainte-Dorothée
Plusieurs résidents de longue date éprouvent aussi une certaine nostalgie devant la transformation accélérée que subit le quartier. « L’ouest de Laval a toujours été reconnu comme un secteur champêtre » et tranquille, rappelle M. Tremblay. Or, d’ici quelques années, « on ne le reconnaîtra plus », redoute-t-il.
« Il y a des gens ici depuis longtemps qui vont déménager », entrevoit pour sa part la résidente du secteur et ancienne cheffe du parti Action Laval, Sonia Baudelot. « C’est malheureux, mais ça va arriver ici aussi », ajoute celle qui appréhende un « exode vers la banlieue nord » de plusieurs résidents du quartier.
Protéger les golfs
Le maire de Laval, Stéphane Boyer, assure pour sa part vouloir allier développement du territoire et protection de l’environnement. Il a d’ailleurs pris l’engagement électoral de protéger un minimum de 50 % des espaces verts sur les golfs qui seront vendus.
« S’il y a des développements, on va vouloir qu’une forte proportion du territoire vert soit protégée », affirme-t-il. Un nouveau règlement d’urbanisme devrait d’ailleurs être adopté par les élus l’été prochain pour que cette promesse soit concrétisée. « En attendant, on n’a pas le choix d’appliquer le vieux règlement », comme cela a été le cas pour certains contrats reliés à la première phase du projet METTA, qui ont été approuvés par la Ville, indique le maire.
La Ville fait d’ailleurs face à un défi de taille, puisque la croissance démographique est importante à Laval. « C’est sûr qu’il faut que la croissance de la population aille quelque part, donc c’est sûr [que les projets immobiliers], ça répond à un certain besoin », relève-t-il.
Le biologiste et chargé de projet au Conseil régional de l’environnement de Laval Alexandre Choquet s’attend cependant à ce que la Ville fasse preuve de fermeté pour protéger les milieux humides que l’on trouve sur plusieurs golfs de l’ouest de l’île.
« En fait, la principale question, c’est qu’il faut s’assurer d’avoir des espaces qui sont naturels et protégés, avant de décider où on construit », souligne la biologiste et porte-parole de la coalition Les terrains de golf en transition, Catherine Vallée, qui appelle ainsi la Ville à sauvegarder des espaces verts en amont des développements immobiliers à venir.