Ensemble pour Côte-des-Neiges

Ce texte fait partie du cahier spécial Enseignement supérieur
La rue Jean-Brillant, artère bien connue de tous ceux qui fréquentent l’Université de Montréal, constituait jusqu’à récemment un énième espace gris où circuler dans le quartier Côte-des-Neiges. Jusqu’à ce que la Faculté de l’aménagement joigne ses forces à celles de la Ville pour réinventer l’endroit.
À l’automne dernier, Juan Torres, vice-doyen et professeur titulaire de la Faculté de l’aménagement de l’Université de Montréal, se joint au projet de réaménagement du très fréquenté tronçon de la rue Jean-Brillant, à un jet de pierre du pavillon du même nom. Hors pandémie, plus de 15 000 passants circulent chaque jour entre l’avenue Decelles et le chemin de la Côte-des-Neiges — sans compter les nombreuses voitures et bicyclettes. Dès 2019, l’arrondissement Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce avait entamé un projet évolutif et participatif de réaménagement du tronçon, mais ce n’est qu’en octobre que les étudiants de la Faculté ont été invités à s’y joindre lors d’une charrette de design, une forme d’appel à idées spécialement conçue pour eux.
« Quand on a eu vent de la démarche, on a sauté sur l’occasion, d’autant qu’avec l’enseignement à distance, on était à la recherche d’activités qui pourraient nourrir le sentiment d’appartenance de nos étudiants », explique le vice-doyen. Intitulé « Notre œuvre sur Jean-Brillant », le concours intensif s’adressait à tous les étudiants de la Faculté de l’aménagement, qui compte trois départements et autant d’expertises : design, architecture et urbanisme et architecture du paysage. L’appel comportait une contrainte choisie par les résidents de l’arrondissement, soit la convergence sociale, qui, on le devine, est au centre du quartier multiethnique et multifonctionnel qu’est Côte-des-Neiges.
« Ce n’est pas un projet sur le campus, c’est un projet sur la rue », précise M. Torres. Plusieurs critères déterminés à la fois par le corps professoral et les instances de la Ville jalonnaient également la demande faite aux participants : l’utilisation de matériaux recyclés et recyclables, la protection à l’égard du vandalisme, l’intégration au paysage… et la rudesse hivernale. « La nordicité de Montréal devait évidemment être prise en compte », indique M. Torres. Le vice-doyen et son équipe ont enfin travaillé de concert avec le centre d’écologie urbaine afin de concilier la nécessité de transit pour les différents utilisateurs. « Une partie est restée accessible en voiture, mais on a réussi quand même à recalibrer le partage de cet espace pour les personnes qui se déplacent à pied », souligne le professeur.
Finalement, sept propositions ont été déposées par des équipes mixtes formées complètement virtuellement. Lesdites soumissions, toutes d’ordre conceptuel, ont été remises à un jury de représentants de l’Université de Montréal et de l’arrondissement, mais également de citoyens, afin de déterminer quel projet se verrait réalisé rue Jean-Brillant. « Le prix le plus intéressant, ce qui motivait le plus les étudiants, c’était aussi de savoir que l’arrondissement voulait aller de l’avant avec la proposition », note-il.
Un kaléidoscope urbain
Signée par les étudiantes Nadia Carvajal (architecture de paysage), Naomi Morel (design d’intérieur), Adalie Creton (design industriel) et Isabella Tonello Ramos (design industriel), l’œuvre Mosaïque abstraite a finalement remporté le prix du jury, assorti d’une bourse de 3000$ remise par le Fonds Peter Jacobs. Composée de morceaux de plexiglas colorés de différentes tailles, l’installation souhaite refléter la dynamique multiethnique de l’arrondissement.

« On trouvait important de souligner symboliquement la présence de cette richesse culturelle. Les différentes pièces colorées symbolisent les différentes sociétés et, en les assemblant, on représente le quartier », explique Nadia Carvajal.
Installée à la croisée des chemins, Mosaïque abstraite pourra ainsi refléter au sens propre et au sens figuré le paysage humain, mais également permettre les rencontres grâce à la mobilité de ses pièces, qui peuvent être manipulées par les passants. La nuit, des pigments phosphorescents intégrés à même les pièces de plexiglas promettent de faire scintiller l’œuvre sous les lueurs de la lune, des phares et des lampadaires.
« On voulait un point de rassemblement pour les personnes. En bougeant l’œuvre, c’est là qu’il peut y avoir une interaction entre deux inconnus », poursuit Isabella Tonello Ramos, qui souligne au passage la difficulté technique de la conception d’une telle installation. La mise en place et la fabrication de l’œuvre, elles, sont prévues au printemps prochain et seront prises en charge par l’arrondissement. D’ici là, l’équipe lauréate espère pouvoir se voir « face à face » pour profiter des rayons du soleil qui font chatoyer leur création multicolore… et peut-être faire connaître aux passants la signification de leur œuvre.
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