La nouvelle version du troisième lien serait moins risquée, selon un ingénieur

Un tunnel sur le nouveau site choisi pour relier les centres-villes de Québec et de Lévis parait une option moins incertaine d’un point de vue financier, selon le professeur Bruno Massicotte de l’école Polytechnique de Montréal.
Photo: Ministère des Transports du Québec Un tunnel sur le nouveau site choisi pour relier les centres-villes de Québec et de Lévis parait une option moins incertaine d’un point de vue financier, selon le professeur Bruno Massicotte de l’école Polytechnique de Montréal.

Moins cher ? Pas nécessairement. Moins risqué ? Assurément !

Le professeur Bruno Massicotte de Polytechnique Montréal, spécialiste des mégaprojets d’infrastructure, ne peut dire si le nouveau scénario du troisième lien de Québec serait moins dispendieux à réaliser que l’ancien projet passant par l’île d’Orléans.

Il juge par contre qu’un tunnel sur le nouveau site choisi pour relier les centres-villes de Québec et de Lévis paraît une option moins incertaine d’un point de vue financier.

« Le tunnel coûterait moins cher à cet endroit, dit-il en entrevue au Devoir. Il serait moins long. Mais en rajoutant du transport en commun, on dépenserait plus. Il faudra construire des gares, des stations, des ascenseurs à des profondeurs importantes. Peut-être que le tunnel va coûter un milliard de moins, mais peut-être que de nouveaux ajouts vont coûter un milliard de plus. Mettons un ordre de grandeur : ce ne sera pas deux milliards et ce ne sera pas dix. »

Le terrain est en roc, plus facile à creuser que le mixte de roc et d’argile. Plusieurs compagnies possèdent l’expertise nécessaire et pourraient donc soumissionner pour réaliser les travaux.

Le gouvernement caquiste a d’abord favorisé une percée sous-fluviale plus à l’est avant d’annoncer mercredi une nouvelle hypothèse de travail privilégiant un tunnel de neuf kilomètres entre l’autoroute 20 (sortie Monseigneur-Bouget) et l’autoroute Laurentienne sur la Rive-Nord.

Ce nouveau projet inclut des connexions avec le réseau de tramway en développement dans la capitale. Il propose aussi des couloirs réservés aux autobus électriques.

 

« La solution qui semble préconisée maintenant me semble comporter beaucoup moins de risques, dit le professeur. Le site envisagé présente beaucoup moins d’incertitudes, ce qui a un impact sur les coûts. Le terrain est en roc, plus facile à creuser que le mixte de roc et d’argile. Plusieurs compagniespossèdent l’expertise nécessaire et pourraient donc soumissionner pour réaliser les travaux. »

Un choix plus acceptable

 

Le site change, l’idée du tunnel demeure. Ce choix semble plus acceptable au professeur qu’un pont au même endroit. « Je suis plus favorable aux ponts de manière générale, dit-il. Ils coûtent moins cher à construire et à entretenir que les tunnels. Mais un pont près du château Frontenac, ce n’est pas une option. »

Le jumelage avec du transport en commun amène une plus-value, note le professeur, en ajoutant que, d’un point de vue environnemental, l’impact du nouveau chantier envisagé serait moins grand. « L’autre projet, sur la pointe est de l’île d’Orléans, impliquait beaucoup de travaux dans le fleuve. Le nouveau n’en prévoit pas. Ça me semble plus réfléchi. »

Bruno Massicotte se spécialise dans le génie des structures, la conception des ponts, la modélisation des tunnels, l’évaluation des mégachantiers.

Il a été mandaté par Québec en 2016 pour réaliser une nouvelle étude de coût et de faisabilité d’un éventuel lien de transport entre les deux rives du Saint-Laurent dans la région de la Capitale Nationale, un troisième lien s’ajoutant aux deux ponts existants. Son travail actualisait une première enquête réalisée par un autre groupe en 1998.

Une facture de 6,3 milliards

 

La nouvelle étude se concentrait sur un lien sous-marin d’environ 7,8 km passant par la pointe orientale de l’île d’Orléans. Le professeur chiffrait alors la construction à 4 milliards de dollars en précisant que la facture grimperait à 6,3 milliards en considérant son entretien sur un siècle.

« Mon rapport disait que c’était faisable, mais ajoutait le risque des dépassements de coûts, dit-il. Il y a beaucoup d’incertitudes à cet endroit liées par exemple à la nature du sous-sol. Je questionnais aussi le choix de l’emplacement, par exemple pour faciliter la mobilité. »

Le maire Labeaume de Québec, opposé à l’ancienne mouture, se range maintenant devant le projet de troisième lien. « Honnêtement, on est très heureux », a-t-il dit en conférence de presse mercredi. « Je pense que c’est le meilleur des deux mondes. » Il a toutefois souligné l’impact possible du projet sur la congestion au centre-ville de Québec.

La députée de Québec solidaire Catherine Dorion a insisté sur cet aspect pour rejeter la nouvelle proposition comme elle s’opposait à l’ancienne.

« L’absurdité du projet reste d’un point de vue fiscal, environnemental, urbanistique, dit la députée de Taschereau. C’est mauvais. »

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