La mauvaise gestion forestière en cause

Les villes les plus exposées aux feux de forêt sont invitées à revoir leur planification urbaine en créant des zones de terrains de jeu, de golf ou des prés en périphérie des zones habitées qui serviront de coupe-feu et à se doter de multiples voies d’évacuation. 
Photo: Jason Franson La Presse canadienne

Les villes les plus exposées aux feux de forêt sont invitées à revoir leur planification urbaine en créant des zones de terrains de jeu, de golf ou des prés en périphérie des zones habitées qui serviront de coupe-feu et à se doter de multiples voies d’évacuation. 

« Nous écopons actuellement du mode de gestion de la forêt des 100 dernières années et devons apprendre de ces erreurs », affirme Kelly Johnson, directeur associé de Partners in Protection (PiP), qui administre le programme FireSmart à travers le Canada.

Alors que le feu ravage toujours la région de Fort McMurray, laissant des milliers d’habitants sans toit et des maisons fumantes en ruines, cet expert affirme qu’il presse de revoir l’aménagement urbain et les règlements dans les communautés de plus en plus populeuses implantées en zone forestière. Plusieurs d’entre elles paient actuellement le lourd tribut de la mauvaise gestion des ressources forestières du dernier siècle.

« Quand les gens se sont implantés ici, ils combattaient tous les feux pour sauver le bois, éliminant 92 % à 95 % des brasiers en abattant et en bulldozant les arbres. Ces amoncellements au sol ont contribué à créer au fil des décennies des conditions propices aux feux de forêt qui sont un phénomène naturel. Et aujourd’hui, le réchauffement accentue ce risque », affirme M. Johnson, joint à Edmonton.

À son avis, une volte-face dans la gestion des ressources forestières suppose non seulement de laisser brûler de grands espaces, mais de nettoyer de tout « combustible » (branches, souches, bois morts) les aires boisées situées à proximité des zones habitées.

Repenser les villes en milieu forestier

 

Le programme FireSmart est né en 1998, quelques années après que des brasiers eurent causé d’imposants dommages en Alberta, explique le directeur associé de PiP. Globale, cette approche préventive de réduction de risques, développée avec des chercheurs du Canada et des États-Unis, s’attaque tant aux modes de construction qu’à l’aménagement du territoire.

FireSmart préconise non seulement le choix de matériaux plus résistants au feu pour les maisons, mais aussi l’élimination des toits ventilés qui se mutent en trappe à feu quand les tisons emplissent l’air et l’élimination de tout résineux à moins de 30 mètres des habitations. Dans les villes plus exposées aux risques d’incendie, on suggère l’éradication complète des espèces végétales autres que les trembles, faux trembles et peupliers. Les recommandations vont encore plus loin en décourageant toute construction dans les terrains montagneux en pente, où les feux de cimes se répandent rapidement. « Cela n’arrêtera pas tous les feux, mais les études démontrent que cela peut réduire de beaucoup les dommages et sauver des habitations », affirme Kelly Johnson.

Les villes les plus exposées aux feux de forêt sont même invitées à revoir leur planification urbaine en créant des zones de terrains de jeu, de golf ou des prés en périphérie des zones habitées qui serviront de coupe-feu et à se doter de multiples voies d’évacuation. Au contraire, elles ne devraient pas implanter de maisons de retraite, de camps de jour, de terrains de camping ou de pénitenciers, autant de lieux sensibles qui abritent des populations vulnérables.

Le hic, estime Kelly Johnson, c’est que de plus en plus de gens vont habiter dans ces milieux autrefois peu peuplés, attirés par des projets miniers ou pétroliers.

« Il faut changer la structure des forêts autour de ces communautés », dit-il. Une trentaine de communautés et de villages au Canada appliquent les principes prônés par FireSmart.

« Je ne peux pas me prononcer sur la situation à Fort McMurray, mais il est clair que nos guides prônent la présence de plusieurs routes d’évacuation, pense Kelly Johnson. À ce chapitre, on peut dire qu’ils ont dû faire face à plusieurs défis. »



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