Arriver à réfléchir!

Les gouvernements disent avoir des principes, mais est-ce que ça paraît ? La réponse est « non » ! C’est en gros le constat que veulent faire partager les membres de la toute nouvelle Alliance Ariane, qui regroupe pour une première fois des organismes et des individus qui ont pour point commun une préoccupation majeure, qui reste pourtant toujours à conquérir : l’aménagement intelligent du territoire.

« On bricole notre territoire, on bricole nos villes », lançait d’entrée de jeu mardi Christian Savard, directeur général de l’organisme Vivre en ville. On ne saurait mieux dire, et depuis longtemps ! Les histoires d’horreur se renouvellent sans fin dans ce pays qui a toujours peur du beau, du réfléchi, du s’installer pour durer… Hier comme aujourd’hui, en matière d’urbanisme et d’occupation du territoire, il s’agit d’être efficace, pas cher et de faire le plein de taxes foncières.

Les autoroutes ont depuis des décennies coupé les terres agricoles, maintenant ce seront les pipelines. Les schémas d’aménagement sont contournés, ou ignorés, au grand plaisir des promoteurs — qu’ils construisent des résidences en plein champ ou des Quinze40. Les voies réservées sont loin d’être entrées dans les moeurs et bâtir une école en étant écoperformant coûte trop cher : coupons !

Pour contrer ces aberrations, pour faire le ménage dans le fouillis des lois, l’Alliance Ariane réclame donc l’adoption d’une Politique nationale de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme. L’idée avait été proposée au printemps dernier dans une lettre ouverte qui réunissait des acteurs-clés de ces questions. En créant un front commun, tous ces gens, auxquels s’ajoutent des groupes comme l’Ordre des architectes et l’Union des producteurs agricoles, croient arriver à se faire mieux entendre des élus. Ce n’est pas un mince pari à l’heure où, à Québec, on a moins de vision à long terme que jamais. D’autant que la déclaration d’Ariane réclame, mot dorénavant tabou !, des « ressources » pour mettre en oeuvre la politique souhaitée.

Il y a pourtant une prise pour rappeler le gouvernement libéral à ses devoirs. En 2012, un autre gouvernement libéral avait présenté son Plan d’action sur les changements climatiques 2013-2020. L’aménagement du territoire — le densifier, miser sur la mixité fonctionnelle — ouvre le document, y est inscrit comme priorité. À New York cette semaine, le premier ministre Philippe Couillard a réitéré son engagement dans la lutte contre les changements climatiques. Il ne tient qu’à lui de réactiver ce volet stagnant du Plan d’action, moins spectaculaire que la Bourse du carbone mais si structurant au quotidien. Ariane peut le guider.

Ce texte fait partie de notre section Opinion. Il s’agit d’un éditorial et, à ce titre, il reflète les valeurs et la position du Devoir telles que définies par son directeur en collégialité avec l’équipe éditoriale.

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