Projet de revitalisation du boulevard Saint-Laurent - Tendre la Main
Le promoteur des grands projets immobiliers du boulevard Saint-Laurent ne se laisse pas démonter par les avis critiques du Conseil du patrimoine de Montréal (CPM) et annonce qu'il a déjà modifié ses plans et qu'il va de l'avant en maintenant ses échéanciers.
Selon les informations obtenues par Le Devoir, les nouvelles projections éloignent du Monument-National (MN) le futur gratte-ciel, également abaissé de 62 à 48 mètres. La perte de volume sera compensée par la densification de l'immeuble en tête d'îlot. Si tout se déroule comme prévu, la revitalisation du secteur névralgique sera complétée vers 2012.«Non seulement le projet n'est pas mort, mais il est en train d'être amélioré en fonction des critiques constructives: je l'avoue, il est plus beau et donc d'autant plus nécessaire», dit Christian Yaccarini, président-directeur général de la Société de développement Angus (SDA), promoteur de l'ensemble. «S'il le faut, je vais appeler une manifestation avec les gens qui appuient ce projet», ajoute-t-il comme pour prouver sa ferme détermination.
Le CPM a déposé ses avis sur le projet de Vitrine culturelle (le 2-22 Sainte-Catherine Est) et du quadrilatère au nord du Monument-National. Tel que révélé par Le Devoir, l'organisme consultatif juge sévèrement l'ouverture d'un passage entre le boulevard et la rue Clark, le déplacement des façades sur Saint-Laurent et l'effet d'écrasement de la tour sur le Monument-National (MN). Il s'interroge sur la valeur patrimoniale de la tête d'îlot du quadrilatère, l'immeuble Alco.
«C'est très décevant, tout ça, et assez convenu, dit Christian Yaccarini. Je trouve ça dommage que, dans ce comité, on n'essaie pas de pousser la réflexion un peu plus loin. L'avis nous dit que l'intersection Saint-Laurent et Sainte-Catherine est encore fortement fréquentée et mythique. Mythique, je veux bien. Fortement fréquentée, non. Il nous dit aussi que la rue Clark a des façades intéressantes. Nos propres études patrimoniales, jamais citées par le Conseil, jugent le contraire. La proposition de conserver les intérieurs des immeubles historiques est également absurde: il n'y a plus rien d'important dans ces lieux laissés à l'abandon et mal entretenus depuis des décennies.»
M. Yaccarini annonce tout de même certaines modifications essentielles. Ses architectes ont par exemple abandonné l'idée d'ouvrir un passage dans le quadrilatère. «Ça se fait à Barcelone ou Lyon, mais ici, non. Alors, on va mettre une porte sur le boulevard pour entrer dans la tour et c'est tout.»
Le président rappelle les dilemmes à résoudre. «On ne peut pas tout avoir, s'éloigner du MN, modifier le volume de la tour et conserver l'Alco, dit-il. On aurait aussi pu mener une bataille pour raser les façades et tout reconstruire à neuf. Le MN y aurait gagné. Mais je n'ai pas le courage de mener cette bataille.»
Le processus officiel suit son cours et d'autres appuis municipaux se manifestent. Dans sa propre évaluation du dossier du quadrilatère, la division de l'urbanisme de la Ville conclut que «le projet n'aura aucune conséquence notable sur les divers cônes visuels vers la montagne ou à partir de la montagne» et que «le volume proposé s'inscrit pleinement dans la silhouette du centre-ville».
L'impact éolien probable semble tout aussi minime pour cette instance. «Tout indique que ce projet offrira une forte valeur ajoutée pour ce secteur stratégique du centre-ville», résume l'analyse, qui juge la proposition «tout à fait conforme au plan de revitalisation du Quartier des spectacles».
Lundi, le conseil d'arrondissement et le comité exécutif ont adopté coup sur coup une résolution recommandant au conseil municipal de modifier le Plan d'urbanisme pour autoriser les constructions planifiées et de modifier en conséquence le programme particulier d'urbanisme du Quartier des spectacles. Les recommandations pointent également vers la tenue d'assemblées de l'Office de consultation publique de Montréal avant la fin du mois.
«Les gens veulent le projet, dit M. Yaccarini. On m'arrête dans la rue pour m'en parler et m'encourager. L'équipe va apporter les correctifs souhaitables et bientôt ce coeur de la ville va recommencer à battre dignement.»