Pour ou contre le report de la seconde dose des vaccins contre la COVID-19?

Trois semaines pile après sa première dose, l’infirmière Sandra Lindsay recevait lundi sa dose de rappel. Mi-décembre, elle était la première personne vaccinée dans le cadre d’un programme régulier contre la COVID-19 aux États-Unis.
Photo: Shannon Stapleton Archives Agence France-Presse Trois semaines pile après sa première dose, l’infirmière Sandra Lindsay recevait lundi sa dose de rappel. Mi-décembre, elle était la première personne vaccinée dans le cadre d’un programme régulier contre la COVID-19 aux États-Unis.

La semaine dernière, Québec a décidé de retarder l’administration de la seconde dose des vaccins contre la COVID-19. Le Royaume-Uni aussi a récemment adopté cette approche, mais pas les États-Unis. Que penser de cette stratégie qui permet de frapper plus fort, plus vite?

D’abord, il est important de rappeler que la dernière phase des essais cliniques du vaccin de Pfizer, portant sur environ 40 000 participants, a été réalisée avec un délai de 21 jours entre les deux doses. C’est sur cette étude clinique que sont basées toutes les autorisations réglementaires pour ce vaccin. S’écarter du protocole éprouvé est nécessairement une idée qui comporte une bonne dose d’inconnu. Pfizer s’y oppose publiquement. En temps de crise sanitaire, une telle proposition peut néanmoins être soupesée.

Au 21e jour après la première piqûre (juste avant la seconde injection), les participants de l’étude clinique ayant reçu le vaccin de Pfizer étaient beaucoup moins susceptibles d’attraper la COVID-19 que ceux ayant reçu le placébo. Il y a fort à parier que cette protection dure au moins une, deux ou trois semaines de plus, indiquait la semaine dernière en entrevue au DevoirAndrés Finzi, professeur de virologie et d’immunologie à l’Université de Montréal. Aucune donnée publiée ne permet toutefois de confirmer cette hypothèse.

Stephen Griffin, un virologiste de l’Université de Leeds, au Royaume-Uni, souligne quant à lui sur la plateforme Science Media Centre qu’il vaut mieux ne pas s’écarter du protocole très strict testé pour le vaccin de Pfizer. Pour l’instant, ce sérum sert surtout à protéger les plus vulnérables, comme les aînés. Dans ce contexte, le vaccin de Pfizer, utilisé comme indiqué par le fabricant afin d’en tirer une efficacité maximale, est idéal.

«Souvent, les décisions visant à protéger la santé publique doivent être prises dans l’incertitude», déclare pour sa part la biostatisticienne britannique Sheila Bird. La réputée scientifique propose de mener rapidement un essai clinique randomisé qui permette de confirmer en 12 semaines que la décision prise par son gouvernement fonctionne. Un quart des patients vulnérables pourraient recevoir la seconde dose 3 semaines après la première. Les trois quarts restant la recevraient à 12 semaines. (Au Québec, l’INSPQ a indiqué qu’il mènerait des études «en temps quasi réel» pour évaluer la qualité de la protection sans deuxième dose.)

Aux États-Unis, les autorités de santé publique s’opposent catégoriquement au report des deuxièmes doses. Certains spécialistes commencent toutefois à croire que la situation pourrait l’imposer: «Vaccinons le plus grand nombre de personnes maintenant, et donnons-leur les doses de rappel quand elles seront disponibles», a par exemple déclaré l’immunologue Akiko Iwasaki, de l’Université Yale.



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