Oser l’intelligence artificielle à l’école

Catherine Couturier Collaboration spéciale
L’école doit développer des compétences complémentaires aux machines — créativité, collaboration, communication, etc.
Photo: Collège Sainte-Anne L’école doit développer des compétences complémentaires aux machines — créativité, collaboration, communication, etc.

Ce texte fait partie du cahier spécial Intelligence artificielle

« Le futur métier des deux tiers des élèves aujourd’hui au primaire n’existe pas en ce moment, rappelle Ugo Cavenaghi, président-directeur général du collège Sainte-Anne. On doit préparer les étudiants à une société où la machine va prendre de plus en plus de place. » L’intelligence artificielle (IA) est ainsi appelée à occuper une place importante dans un avenir proche, y compris à l’école. Autant s’y préparer, croient les auteurs de l’ouvrage Osons l’IA à l’école, publié en septembre dernier.

« L’intelligence artificielle demeure très abstraite. Il reste plein d’incompréhension et de craintes : est-ce qu’on va être envahis, est-ce que ça remplacera les enseignants ? » confie Isabelle Senécal, directrice de l’innovation pédagogique au collège Sainte-Anne. C’est pour démystifier l’IA et pour documenter les usages potentiels et les expérimentations du collège en ce sens qu’elle et Ugo Cavenaghi ont écrit Osons l’IA à l’école.« L’IA nous intéresse parce qu’elle nous donne de formidables moyens pour mettre en œuvre les principes pédagogiques auxquels nous croyons », écrit Mme Senécal.

La technologie ne remplacera pas l’humain, tiennent à assurer les auteurs. L’école doit plutôt développer des compétences complémentaires aux machines — créativité, collaboration, communication, etc. — et éduquer les jeunes à la citoyenneté numérique, de façon à ce que la technologie reste au service du bien commun. « On doit éduquer les individus à être empathiques et tournés vers les autres », ajoute M. Cavenaghi.

L’IA sous toutes ses formes

« Les algorithmes vont, à long terme, permettre des parcours personnalisés, explique M. Cavenaghi. Afin de se préparer et d’être proactifs, on a implanté des initiatives sur plusieurs plans dans les trois niveaux scolaires offerts au collège Sainte-Anne [primaire, secondaire et cégep] : agents conversationnels, plateforme de réactivation des connaissances, activités de familiarisation, cours sur l’IA au cégep. »

L’application B12, développée en partenariat avec une entreprise privée, veut par exemple aider l’élève à réactiver ses connaissances, pour favoriser un apprentissage à long terme. « Nous nous appuyons sur la recherche en neuroscience, qui montre que, pour apprendre, on doit pratiquer plusieurs fois la notion », explique Mme Senécal. L’école travaille à y intégrer le contenu du cours de science de 4e secondaire. B12 enverra bientôt des questions aux élèves, à raison de quelques fois par semaine, en vue de les préparer aux examens du ministère. Les données ainsi accumulées ouvrent également une fenêtre sur les habitudes des étudiants et leur parcours d’apprentissage, et pourraient mettre en lumière les difficultés du groupe. « On pourrait imaginer que l’IA propose un contenu approprié au moment où l’élève apprend le mieux », avance la directrice à l’innovation pédagogique.

Des chabots, quant à eux, accompagnent l’élève lorsqu’il a une question : au lieu de lui donner la réponse, l’assistant virtuel le guide plutôt dans la résolution de problème. « On pourra à terme introduire l’IA quand on aura assez de données, ce qui permettra de suggérer des vidéos ou de mettre en relation deux élèves », donne comme exemple Mme Senécal.

Au niveau collégial, un cours sur l’IA vise à développer une réflexion sur le sujet et à améliorer la compréhension des étudiants. « L’objectif est de leur faire comprendre comment l’IA fonctionne, sur le plan de la technologie, mais aussi ses répercussions sur le plan éthique », ajoute Isabelle Senécal. Différents ateliers permettent de plus aux élèves de tous les niveaux de s’initier à la programmation et à la production d’algorithmes.

Des défis qui demeurent

 

Alors qu’on parle depuis des années de médecine personnalisée, mais qu’on attend toujours sa réalisation, verra-t-on la même chose en éducation ? « L’IA est complexe, concède Mme Senécal, et demande énormément de ressources et d’expertise, qu’on n’a pas toujours sous la main. On reconnaît les possibilités, mais on n’est pas encore en train de les vivre. »

À ces ressources limitées s’ajoute la délicate question de la protection des données provenant de mineurs. Le personnel enseignant doit également être mobilisé et davantage formé. « Dans plusieurs écoles, il y a encore très peu d’intégration technologique en classe. Il faut convaincre de l’utilité de ces outils, comme nous l’avons fait auparavant avec l’ordinateur », affirme M. Cavenaghi.

Pas question que le milieu de l’éducation reste en arrière : « L’éducation, c’est la base de tout », poursuit-il. En attendant, le collège Sainte-Anne, pionnier en la matière, espère pouvoir mettre à la disposition de toutes les écoles des trousses éducatives, pour faciliter la compréhension et l’intégration de l’IA en milieu scolaire. « On essaie de tirer le wagon », conclut le président-directeur général.

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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