Les retrouvailles de Vénus et du Soleil
Vénus a rendez-vous avec le Soleil aujourd'hui pour de fugaces retrouvailles après une séparation longue de 122 ans. Le passage de la plus brillante des planètes devant notre astre du jour sera visible du Québec dès le lever du Soleil, à 5h06 précises, un événement à la portée des initiés comme des néophytes, pourvu qu'on ait la protection oculaire nécessaire pour l'observer.
Le phénomène, appelé prosaïquement transit de Vénus, prendra concrètement la forme d'un petit point noir — une tache parfaitement ronde mesurant environ 1/32e de la taille du Soleil — qui se déplacera lentement sur la partie inférieure du disque solaire. Pas question toutefois d'observer le transit à l'oeil nu, sous peine de brûlures permanentes à la rétine.La solution? «Utiliser un filtre de soudeur numéro 14, au minimum, ou encore des filtres spécialement conçus pour l'observation du soleil», précise Pierre Chastenay, astronome au Planétarium de Montréal. Des précautions qui valent aussi pour ceux qui opteront pour les jumelles ou le télescope. À cet égard, l'astronome suggère plutôt de projeter l'image formée par le système optique sur un écran, ce qui permet d'affiner l'observation, tout en étant sans danger.
Le clou du spectacle pour le Québec est prévu entre 7h et 7h25. «Pendant cette période, Vénus quittera le disque du Soleil, ce qui nous donnera un point de repère qui nous permettra de vraiment voir le mouvement de la planète», poursuit M. Chastenay. Le phénomène sera aussi visible depuis l'Europe, le Proche-Orient et la majeure partie de l'Afrique et de l'Asie alors que nombre d'organismes entendent retransmettre le transit en direct sur Internet.
Plus que scientifique, l'événement est avant tout de nature historique. En effet, une véritable course aux passages de Vénus s'est engagée au XVIe siècle chez les astronomes, pour qui c'était alors le seul moyen de mesurer avec précision le diamètre de l'orbite terrestre. Depuis, l'invention des radars dans les années 40 et 50 est venu détrôner la belle pour arriver à ce savant calcul.
Ce qui n'enlève rien aux calculs précédents. «Non seulement on pouvait ainsi calculer la distance entre le Soleil et toutes les planètes du système solaire, mais aussi celle qui nous sépare des étoiles les plus proches. C'est en effet le premier barreau de l'échelle qui nous permet de mesurer les distances cosmiques, de la Lune jusqu'aux plus lointaines galaxies», confirme Pierre Chastenay, qui participe ce matin à une observation de groupe en face du stationnement de l'Insectarium de Montréal, organisée par le Planétarium.
Pour ceux qui auraient toutefois manqué le passage de Vénus dans notre portion de ciel québécois, le prochain rendez-vous est paraît-il fixé au 6 juin 2012. Cette fois, nous pourrons observer le début du passage de la planète qui aura lieu chez nous au coucher du Soleil. Sinon, il faudra attendre 105 ans et demi pour revoir le phénomène, soit au 11 décembre 2117. C'est que les passages de Vénus viennent toujours par paire, séparés de huit années presque jour pour jour. Mais, explique l'astronome, «chaque paire est séparée l'une de l'autre soit de 122 ans, soit de
105 ans et demi, en alternance».
Ce qui ne veut pas dire que la seconde planète dans l'ordre de distance à partir du Soleil ne passe pas souvent près du Soleil. Au contraire, elle le fait tous les 584 jours, mais, puisque son orbite est inclinée de 3,4 degrés par rapport à celle de la Terre, Vénus passe généralement au-dessus ou au-dessous du Soleil et ne peut donc être vue d'ici. Le moment est donc rarissime, profitons-en!