Il était une fois... le Soleil

Notre système solaire ne se serait pas formé lentement et silencieusement à l'abri d'un nuage de poussière mais bien dans le sillage éblouissant d'une supernova née de l'effondrement d'une étoile massive, avance un groupe d'astrophysiciens américains dans un article à paraître aujourd'hui sous la rubrique «Perspectives» du prestigieux magazine Science.

Cette nouvelle théorie, appuyée à la fois par des images astronomiques et des analyses chimiques, pourrait avoir de profondes implications sur le monde de l'astrophysique. La plupart des astronomes adhèrent en effet à l'idée voulant que le Soleil et le système solaire se sont formés dans un relatif isolement, enfouis dans un coin noir et silencieux d'un nuage interstellaire.

Nenni, prétend ce groupe de chercheurs de l'Arizona State University (ASU), qui croit plutôt que le Soleil s'est formé dans l'environnement violent d'une nébuleuse, un milieu né du chaos résultant de l'explosion et de la radiation ultraviolette qui marquent la fin de la vie courte, mais intense, d'une étoile massive et lumineuse.

«Il y a deux sortes d'environnements où peuvent se former des étoiles de masse plus petite comme le Soleil», explique l'auteur principal de cet article, l'astronome Jeff Hester, dans un entretien accordé à Newswise. «Dans le premier cas, vous avez un processus presque passif au cours duquel un paisible nuage moléculaire s'effondre lentement, formant une étoile ici, une étoile là. L'autre environnement est radicalement différent et donne naissance non seulement à des étoiles de petite masse mais également à des étoiles massives et lumineuses.»

La preuve du fer-60

Selon cet article, que cosignent Steve Desch, Kevin Healy et Laurie Leshin, notre soleil serait né dans un tel environnement. Leur principal argument? La découverte de modèles d'isotopes causés par la décomposition radioactive du fer-60, un isotope instable qui a une courte durée de vie de un million et demi d'années. Le fer-60 ne se formant qu'au coeur des étoiles massives, sa présence dans notre jeune système solaire laisse croire que lorsque le Soleil s'est formé, il y a 4,5 milliards d'années, une étoile massive était à proximité.

Quand une étoile massive naît, son intense radiation ultraviolette forme une région HII (pour hydrogène ionisé) comme les nébuleuses de l'Aigle, d'Orion et Trifid. De ces nébuleuses naissent des étoiles de petite masse qui, à l'intérieur de 100 000 ans, seront dévoilées et exposées directement à la radiation ultraviolette de cette étoile massive.

«Nous voyons de tels objets émerger des limites des régions HII, poursuit Jeff Hester. Ce sont des globules gazeux d'évaporation [EGG, pour evaporating gaseous globules] que l'on a pu observer grâce aux images de la nébuleuse de l'Aigle prises par Hubble.» Un EGG a une vie très courte. Il s'évapore en 10 000 ans, laissant derrière lui une étoile de petite masse et un disque protoplanétaire.

Ce disque s'évapore à son tour, formant une structure en forme de goutte, un proplyde. 10 000 ans plus tard, le proplyde commence lui aussi à s'éroder. Ne reste plus que l'étoile elle-même, entourée de la partie intérieure de son disque, dont le format serait comparable à... notre système solaire.

À la mort de l'étoile massive, la petite étoile et son disque sont soumis à la violence d'une supernova qui laisse dans son sillage une foule d'éléments, dont ce fameux fer-60. Une découverte qui fait dire aux chercheurs américains que l'environnement de la nébuleuse de l'Aigle, par exemple, serait similaire à celui qui a donné naissance au Soleil et au système solaire, il y a de cela 4,5 milliards d'années. Un terrain d'investigation inespéré que se promet d'étudier plus en profondeur l'équipe de l'ASU.

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