Récolter des données pour améliorer les récoltes

Ce texte fait partie du cahier spécial Intelligence artificielle
Une serre avec le pouce vert
Des légumes qui poussent presque d’eux-mêmes chez soi à longueur d’année ? Ce rêve pourrait bientôt devenir une réalité. Du moins, le Centre d’innovation en microélectronique du Québec (CIMEQ) s’affaire à le concrétiser. Le centre collégial de transfert technologique rattaché au cégep Lionel-Groulx, qui a développé une expertise dans les environnements connectés et les systèmes prédictifs, souhaite mettre au point d’ici deux ans un prototype de serre intelligente de petit format. Le but ? Produire des légumes à domicile à moindre coût. Si l’Internet des objets offre déjà des solutions pour l’ouverture de volets, le contrôle de la température et l’arrosage à des moments précis, « on veut aller plus loin », assure Michel Chabot, directeur général du CIMEQ.
Le projet aura recours à des capteurs qui mesurent la température, l’humidité et l’éclairage, mais il devra aussi en concevoir d’autres, notamment pour analyser les sols et les minéraux. Pour maximiser les conditions de croissance, une plateforme informatique sera développée afin de traiter l’ensemble des données et de rendre la serre quasi autonome, notamment en arrosant d’elle-même les plantes lorsqu’elle détectera un manque d’humidité. « L’IA permettra de mieux contrôler les éléments pour les néophytes qui ne connaissent pas bien l’agriculture », explique M. Chabot.
Beaucoup de travail reste à faire, mais les répercussions d’une telle technologie pourraient être énormes, comme réduire le transport de la nourriture, améliorer la logistique pour préserver des aliments et éliminer le gaspillage. Sans parler de la possibilité de manger des légumes frais à tout moment de l’année.
Prédire les rendements agricoles
Quelle quantité de tomates sera cueillie la semaine prochaine ? Voilà le genre de question auquel l’intelligence artificielle (IA) développée par MotorLeaf pourrait répondre. Cette jeune entreprise montréalaise a créé une solution informatique pour prédire le rendement d’une serre une à trois semaines à l’avance. Sa technologie répond à la demande d’agriculteurs qui se retrouvaient à devoir verser des indemnités s’ils livraient à leurs clients moins de légumes que promis ou à devoir vendre au rabais, voire à gaspiller, des surplus lorsque leur production était supérieure aux attentes.
« Nous disons à nos clients que nous voulons toutes les données qu’ils enregistrent », explique Scott Dagondon, directeur de la section Intelligence artificielle chez MotorLeaf. Leurs algorithmes détectent ensuite les données qui se révèlent pertinentes ou non. Une fois entraînée, l’IA envoie de manière automatisée un rapport chaque semaine aux agriculteurs. L’entreprise californienne SunSelect aurait ainsi diminué de moitié les erreurs dans ses prédictions pour une serre d’une trentaine d’hectares.
Cette IA devrait en théorie fonctionner avec tous les légumes cultivés en serre, mais elle n’a pour l’instant été expérimentée qu’avec des cultures de tomates, de poivrons et de concombres. Après une campagne de financement de 2,9 millions de dollars en mai 2018, l’entreprise montréalaise a signé en février dernier un partenariat avec Cultilene, une filiale de l’entreprise française Saint-Gobain spécialisée dans les fournitures pour les serres. De quoi prévoir aussi des rendements pour MotorLeaf !
Des ruches connectées
La technologie de Nectar essaimera du quartier Griffintown jusque dans l’ouest de l’Amérique du Nord. La jeune entreprise montréalaise a mis au point un système qui permet de comprendre ce qui se passe à l’intérieur d’une ruche, sans avoir à l’ouvrir et à perturber le cycle de travail des abeilles. Des capteurs enregistrent et transmettent les fréquences du bourdonnement, le poids de la ruche, l’humidité et les variations de température. Des corrélations sont ensuite établies grâce à ces données à l’aide d’apprentissage machine supervisée et automatique. L’intelligence artificielle permet ainsi de détecter la mort d’une reine ou un essaimage, afin d’aviser l’apiculteur avant que ces situations n’entraînent l’effondrement d’une colonie. Cette solution a déjà été mise à l’essai chez une dizaine de clients et fait l’objet d’un projet au Centre de recherche en sciences animales de Deschambault.
Cet été, le Quartier de l’innovation (QI) installera plus d’une dizaine de ces ruches connectées dans son Laboratoire à ciel ouvert de la vie intelligente situé dans Griffintown. Pour Nectar, il s’agira d’un terrain de jeu pour tester de nouveaux capteurs et collaborer avec des universités partenaires du QI pour améliorer sa technologie. « On pourra se permettre plus de liberté et de créativité par rapport à ce qu’on veut tester », signale Marc-André Roberge, cofondateur de la jeune pousse.
En parallèle, les analyses devraient se raffiner, alors que Nectar prévoit la production de milliers d’appareils à partir de cet été. De retour d’une tournée dans l’Ouest canadien, le Midwest américain et la Californie, où se concentre l’essentiel de la production de miel en Amérique du Nord, l’entreprise a garni son carnet de commandes. Ces nouveaux clients signifient une entrée massive de données, qui permettra à l’entreprise de réaliser un apprentissage profond. Peut-être que Nectar arrivera ainsi à mieux comprendre le comportement des abeilles… et à mieux assurer leur survie.
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