Université de Sherbrooke - À la traque des gras pour mieux comprendre le diabète
Ce texte fait partie du cahier spécial Universités: recherche et industrie
Le diabète de type 2 est en constante progression. Qui plus est, ce type de diabète, dit adulte, est de plus en plus souvent diagnostiqué chez de jeunes patients, parfois même chez des enfants. On sait aussi que l'obésité est un facteur de risque pour ce type de diabète. Mais quel est le lien entre les deux et comment le gras affecte-t-il le diabète?
Voilà le genre de questions qu'André Carpentier, endocrinologue au CHU de l'Université de Sherbrooke et chercheur réputé dans le domaine du diabète, se pose depuis plusieurs années. Il pourra continuer à se les poser, mais il le fera maintenant au sein de la nouvelle Chaire de recherche IRSC-GSK sur les causes du diabète de type 2, dont il vient de prendre la direction.«La société pharmaceutique GlaxoSmithKline (GSK) a fait une dotation d'un million de dollars à l'Université de Sherbrooke pour la création de cette nouvelle chaire, raconte André Carpentier, ce qui permet à l'université d'assurer un financement annuel de 75 000 $ à la chaire. De plus, les Instituts de recherche en santé du Canada égalent cette somme pour les cinq prochaines années, ce qui nous donne une somme totale de 150 000 $ par année.»
Une somme qui, à première vue, peut sembler modeste. «Mais elle me permet de dégager le temps qu'il me faut pour mener mes recherches, explique celui qui est aussi chercheur au Centre de recherche clinique Étienne-Lebel du CHUS et professeur à la Faculté de médecine et des sciences de la santé. Et comme la somme donnée par GSK est placée par l'Université de Sherbrooke, cela assure la pérennité de la chaire et de nos recherches. Sans compter que la chaire agira comme levier pour éventuellement attirer de nouveaux subventionneurs.»
Le rôle du gras
«Mes recherches sur le diabète portent sur le métabolisme des lipides, en particulier des gras alimentaires, c'est le fil conducteur de mes recherches depuis 14 ans.» Les recherches menées par André Carpentier et ses collaborateurs ont démontré qu'il existe un dysfonctionnement du métabolisme des gras chez les personnes diabétiques ou prédiabétiques. Chez ces personnes, après un repas, le transport des gras alimentaires ne se fait pas d'une façon normale, c'est-à-dire vers les tissus adipeux, mais plutôt, par exemple, vers les organes, comme le coeur, où ils sont stockés, ce qui entraîne les complications cardiovasculaires associées au diabète. «Un organe comme le coeur qui carbure au gras est tout simplement moins efficace.»
Un second résultat de ce mauvais transport du gras alimentaire est qu'on le retrouve au niveau cellulaire. «Et nous savons que les gras, en particulier les gras saturés, altèrent au niveau cellulaire le signal de l'insuline et que cette résistance à l'insuline contribue à la hausse du taux de sucre dans le sang.»
Si le lien entre le gras alimentaire et le diabète semble ainsi mieux établi, le lien entre le diabète et l'obésité est moins net. «Chez les personnes obèses, et même chez les personnes atteintes d'obésité morbide, environ 25 % d'entre elles n'ont pas de diabète et ne présentent pas de dysfonctionnement métabolique des gras alimentaires.»
Recherche clinique et recherche fondamentale
Il reste donc beaucoup de choses à comprendre et beaucoup de questions à poser. Les recherches de la Chaire de recherche sur le diabète de type 2 permettront d'en savoir un peu plus. «La grande majorité de la recherche sera de la recherche clinique, c'est-à-dire sur des personnes, soit diabétiques ou prédiabétiques, à qui on fera consommer du gras alimentaire. Et, après le repas, on étudiera le transport de ce gras alimentaire. Cela nous permettra de poser une série de questions et de mieux documenter le métabolisme en cours. Les résultats de ces recherches cliniques alimenteront la recherche fondamentale. On peut dire que la chaire se situe aux confins des deux types de recherche.»
Évidemment, pour réaliser de telles études, il faut des méthodes d'investigation, ce qu'André Carpentier a déjà mis en place au fil des ans. «Nous utilisons l'imagerie médicale, la tomographie par émission de positrons, qui nous permet de tracer le devenir des différents lipides. Ce sont des méthodes d'investigation que nous avons développées dans nos laboratoires.» Certaines de ces études pourront être accompagnées d'interventions. «Par exemple, on met en place un programme de perte de poids chez le sujet et on regarde ensuite les effets de cette intervention sur le métabolisme et le transport des gras.»
Retombées attendues
Parmi les retombées des travaux menés au sein de cette Chaire de recherche sur le diabète de type 2, il y a en premier lieu les nouvelles connaissances qui en découleront et qui permettront de mieux comprendre la maladie et son lien avec le gras alimentaire. Mais André Carpentier espère que cela mènera aussi à une amélioration de la démarche thérapeutique, en particulier pour la prévention de la maladie. «Les connaissances issues de nos recherches pourraient mener à l'invention d'un test de tolérance au gras qui serait administré à des personnes à risque. Pareil test nous permettrait d'intervenir avant le déclenchement de la maladie.»
Autre retombée de la chaire: la sensibilisation du grand public. «Nous nous sommes engagés à organiser, en coopération avec le Musée des sciences de Sherbrooke, une conférence annuelle sur le diabète destinée au grand public. Chaque année, nous choisirons un thème différent. Cette année, il s'agira de l'obésité et du diabète de type 2.»
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Collaborateur du Devoir
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