Science - Un pas de plus dans la compréhension du lupus
Des chercheurs montréalais ont participé à la découverte de trois nouveaux gènes liés à l'apparition du lupus chez la femme. Cette découverte qui fait l'objet d'une publication dan la revue Nature Genetics devrait permettre une meilleure compréhension des causes de cette maladie complexe et la mise au point de médicaments mieux adaptés.
Communément appelé lupus, le lupus érythémateux systématique (LES) affecte 31 personnes sur 100 000. Les femmes sont neuf fois plus nombreuses que les hommes à en souffrir. Elles sont frappées par la maladie souvent tôt dans leur vie, dès la vingtaine ou la trentaine. «La maladie se présente très différemment d'une personne à l'autre, ce qui fait qu'on la confond souvent avec d'autres maladies», prévient le généticien et immunologiste John Rioux de l'Institut de cardiologie de Montréal qui est l'un des auteurs de cette découverte.Maladie auto-immune, le lupus se caractérise par un dérèglement du système immunitaire qui s'attaque soudainement à des tissus sains, tels que la peau, les muscles, les articulations, le coeur, les poumons, les reins, le cerveau, voire les vaisseaux sanguins. Les tissus qui deviennent la cible du système immunitaire souffrent d'inflammation qui se traduit par de l'enflure, de la douleur et parfois des rougeurs, plus visibles quand la peau est atteinte. Les seuls traitements offerts, des stéroïdes, s'attaquent uniquement aux symptômes et visent à contrôler l'inflammation.
Variations génomiques
En collaboration avec des chercheurs des États-Unis, du Royaume-Uni et de la Suède, le professeur John Rioux de l'Université de Montréal a comparé le génome de 720 femmes victimes de lupus à celui de 2337 femmes non atteintes servant de témoins. Ces généticiens ont analysé quelques 317 000 régions du génome où la séquence d'ADN différait d'une personne à l'autre. Ils ont alors tenté d'identifier les variations qui étaient plus souvent portées par les femmes souffrant de lupus que par les femmes indemnes. Quatre variations génomiques sont apparues comme étroitement associées au lupus après vérification sur un groupe de 1846 femmes atteintes de la maladie. Parmi ces variations figurent trois gènes connus, dont l'un (l'ITGAM) joue un rôle dans la faculté qu'ont les cellules de l'immunité d'adhérer au tissu présent au site d'inflammation. Les deux autres, KIAA1542 et PXK, interviennent dans des processus plus généraux de traduction du code génétique en protéine et de signalisation cellulaire.
Cette découverte s'ajoute à celle du gène TNFSF4 qui joue un rôle important dans la communication entre deux catégories de cellules du système immunitaire, et de celle du gène PTTN22 présent dans plusieurs autres maladies auto-immunes, telles que l'arthrite rhumatoïde, la maladie de Crohn et le diabète de type I.
«Même si la dernière étude couvrait l'essentiel du génome, elle n'a pas suffisamment de poids statistique pour nous permettre de trouver tous les gènes impliqués dans le lupus, prévient toutefois John Rioux. Il reste probablement à découvrir plusieurs douzaines de gènes qui seraient reliés au lupus.» Et les quelques gènes mis au jour ne sont pas suffisants et assez déterminants pour permettre la mise au point d'un test de dépistage ou de diagnostic, avoue le spécialiste de la génétique des maladies inflammatoires. «Par contre, ils nous indiquent des processus biologiques qu'il faudrait étudier plus en profondeur pour comprendre comment ils interviennent dans la maladie ou l'induisent. Ces informations pourront aussi nous guider dans la conception de médicaments.»