Du rôti de boeuf cloné servi à la table américaine

La décision est finale. La Food and Drug Administration (FDA), l'équivalent de Santé Canada aux États-Unis, a affirmé hier que la viande d'animaux clonés, mais aussi leurs produits dérivés, comme le lait, pouvait désormais être commercialisée sans problème puisque ces aliments sont «aussi sécuritaires» que ceux issus d'élevages conventionnels. L'organisme demande toutefois à l'agro-industrie de ne pas y aller trop vite afin de ne pas brusquer les consommateurs actuellement «anxieux» à l'égard du clonage, a-t-il indiqué hier.

Cette prise de position a par ailleurs été jugée «intéressante» par le Canada, qui, par l'entremise de son ministère de la Santé, a précisé hier qu'il n'était pas encore question pour lui d'emboîter le pas à son voisin du Sud en autorisant dans un avenir proche la vente de viande d'animaux clonés sur son territoire.

N'empêche, «après des années d'études détaillées et d'analyses, [les États-Unis concluent] que la viande et le lait destinés à la consommation humaine provenant des bovins, des porcs et des chèvres clonés, mais aussi de leur descendance, sont sans danger», a souligné la FDA dans un communiqué diffusé hier. L'organisme américain a toutefois précisé qu'il ne pouvait étendre ses conclusions à d'autres espèces animales, dont les moutons par exemple, en raison de «données insuffisantes».

En réaffirmant sa confiance dans la viande d'animaux clonés, la FDA vient mettre un terme à une évaluation amorcée en 2002 des risques liés à l'introduction de ce type de viande dans la chaîne alimentaire humaine. Au coeur de ses travaux, en décembre 2006, une analyse préliminaire avait d'ailleurs déjà amené les instances sanitaires américaines à reconnaître l'innocuité de ce type d'aliments.

Tout en donnant son feu vert à cette commercialisation, les États-Unis ont par contre demandé au secteur de la biotechnologie animale de prendre son temps avant de mettre en vente des aliments issus du clonage. Ce moratoire volontaire serait justifié non pas par des «raisons de sécurité», mais par des «raisons de marketing», a souligné Bruce Knight, du département américain de l'Agriculture (USDA), qui estime qu'une période de transition est nécessaire «afin de permettre au marché de s'ajuster», a-t-il indiqué à l'Associated Press.

Notons qu'au regard de la décision rendue hier par la FDA, les produits issus du clonage pourraient être commercialisés en sol américain sans obligation pour les marchands de préciser la vraie nature de ces aliments par l'entremise d'un étiquetage spécifique. La Food and Drug Administration a justifié cette mesure en évoquant l'absence de différences sanitaires entre les animaux clonés et ceux qui ne le sont pas.

Pour le spécialiste en transgénèse animale François Pothier, de l'Université Laval, l'ouverture par la FDA des marchés à la viande d'animaux clonés est sans doute «une bonne nouvelle pour l'industrie américaine du clonage, qui depuis des années exerce des pressions pour pouvoir commercialiser la progéniture ou les produits dérivés de ses animaux clonés, a-t-il expliqué au Devoir. Au Canada, cette industrie est beaucoup moins développée, certes, mais la décision américaine risque de forcer les autorités canadiennes à se prononcer sur cette question.»

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