Prévention du suicide: mieux accompagner les personnes à risque
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial 90e Congrès de l’Acfas
Plus de 1000 personnes mettent fin à leurs jours chaque année dans la province. La prévention du suicide sera le thème d’un colloque le 12 mai, au Congrès de l’Acfas. On regardera l’état des connaissances actuelles sur l’efficacité des différents types d’intervention au Québec, mais aussi en France et auprès de certaines populations aux besoins particuliers.
Infirmière de formation, Jessica Rassy, maintenant professeure à la Faculté de médecine et des sciences de la santé à l’Université de Sherbrooke, a compris dans sa pratique qu’il fallait adapter les services aux urgences pour mieux répondre aux besoins des personnes suicidaires qui s’y retrouvent pour demander de l’aide. Elle se penche principalement sur les urgences générales plutôt que sur les urgences psychiatriques.
« Quelqu’un en danger immédiat qui se présente aux urgences ne reçoit pas toujours le même type de service d’un hôpital à l’autre, explique la chercheuse. Parfois, la personne vit une expérience difficile qui ne lui donne pas envie d’y retourner. Nos travaux visent à améliorer les soins et les services reçus, en collaboration avec le milieu communautaire. »
Parce que si une personne ne représente pas un danger imminent, il est possible que d’autres ressources soient plus appropriées pour l’aider. « Certaines personnes se retrouvent aux urgences parce qu’elles n’ont pas réussi à obtenir de l’aide autrement, regrette Mme Rassy. L’objectif est de les envoyer au bon endroit. Certains suivis peuvent être faits, par exemple, dans un centre de prévention du suicide, ou dans un centre de crise. Il faut mieux faire connaître ces ressources auprès de la population et des professionnels de la santé, puis faciliter leur accès. »
La chercheuse, qui donnera la conférence « Prévention du suicide à l’urgence : Comment ? Où ? Quand ? », a développé avec son équipe un protocole clinique d’évaluation et d’accompagnement baptisé SécUrgence.
« Des collaborateurs de différentes régions ont aussi mis l’épaule à la roue, comme des psychologues, des travailleurs sociaux, des intervenants sociaux, des policiers, des premiers répondants, des personnes qui se sont retrouvées aux urgences pour un risque suicidaire ou leurs proches, énumère-t-elle. Nous voulions vraiment avoir une vision globale de la situation. »
L’équipe réalise maintenant un projet pilote à l’Hôpital général juif de Montréal. « Le protocole permet de standardiser la pratique, explique-t-elle. Il cible les éléments essentiels pour assurer la santé et la sécurité de ces personnes, mais il peut être modifié en fonction de la situation particulière de l’hôpital. »
Par exemple, certaines régions sont plus choyées que d’autres en matière de présence d’organismes communautaires. Il y a aussi des ressources en ligne qui peuvent être utilisées.
« Une fois que nous aurons les résultats de notre projet pilote, qui devrait durer un an ou deux, nous les présenterons pour ensuite implanter le protocole dans d’autres urgences du Québec », indique Jessica Rassy.
Réunir l’expertise
Le colloque présentera aussi une conférence de Charles-Edouard Notredame, psychiatre de l’enfant et de l’adolescent au CHU de Lille, qui coordonne le 3114, le numéro national de prévention du suicide en France.
Les autres conférenciers font partie de l’équipe de recherche Papageno, spécialisée en prévention du suicide, fondée l’an dernier grâce à du financement obtenu du Fonds de recherche du Québec — Société culture.
La directrice de l’équipe, Marie-Claude Geoffroy, professeure adjointe du Département de psychiatrie à l’Université McGill, est responsable du colloque. Elle présentera les résultats d’une revue de littérature avec méta-analyse qu’elle a réalisée pour estimer la prévalence des idées suicidaires chez les enfants de 6 à 12 ans.
« J’ai cherché dans toutes les études rapportées qui touchent à la problématique du suicide chez les enfants pour essayer de calculer quel pourcentage d’entre eux y a pensé, explique la chercheuse. Les études proviennent principalement des États-Unis, mais certaines viennent du Canada. Avec cet état de la situation, nous nous pencherons sur ce que cela implique pour la prévention. »
L’épidémiologiste et psychiatre du développement Camille Davisse-Paturet viendra pour sa part parler des pensées suicidaires chez les jeunes des communautés LGBTQ, qui sont particulièrement vulnérables.
« Il est important de réunir toute cette expertise, affirme la professeure Geoffroy. Actuellement, le taux de suicide est relativement stable au Québec, mais les visites aux urgences pour tentatives de suicide sont en hausse chez les jeunes, particulièrement chez les filles, d’après les données de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). Il faut mettre en commun les connaissances et rehausser nos efforts de prévention. »
Ce contenu spécial a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.