Des cliniques privées appelées en renfort dans les Laurentides

Le CISSS des Laurentides fait appel à des cliniques privées pour désengorger ses urgences et rattraper le retard dans ses chirurgies. Dès octobre, le Centre chirurgical de la région des Laurentides (CCRL) réalisera des opérations d’un jour et des endoscopies pour le compte de l’établissement de santé. Le centre d’urgences pédiatriques UP, déjà présent à Brossard, ouvrira, pour sa part, une nouvelle antenne à Saint-Eustache en juin, afin d’y soigner des enfants de la région.
Environ 4000 chirurgies d’un jour et 6000 endoscopies doivent être réalisées chaque année au CCRL. Le CISSS prévoit utiliser quatre salles d’opération pour effectuer des interventions chirurgicales dans diverses spécialités (chirurgie générale, plastique, vasculaire, orthopédique, etc.) ainsi que deux salles d’endoscopie. « C’est le CIUSSS qui va avoir le contrôle de ce qui va s’opérer chez nous », précise le Dr Patrice Makinen, cofondateur du CCRL, situé à Saint-Jérôme.
Ce projet n’est pas nouveau. Le CISSS des Laurentides a signifié son intention de conclure un contrat avec le centre chirurgical dès septembre 2021. L’initiative a toutefois dû être repoussée en raison d’un long délai pour obtenir un permis d’exploitation de centre médical spécialisé auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux. « On a attendu 18 mois », affirme le Dr Makinen.
Le dossier a finalement débloqué en février. « On avait tout arrêté la construction de l’aménagement locatif à l’intérieur, poursuit le chirurgien orthopédiste, qui pratique à l’hôpital de Saint-Jérôme. Depuis la signature [du contrat], on a reparlé au constructeur de l’édifice qui doit nous dire si on peut ouvrir au mois d’octobre. C’est ça notre plan. »
Grâce à cette entente, le CISSS des Laurentides veut réduire ses listes d’attente « importantes » en interventions chirurgicales et en endoscopie dans les Basses-Laurentides. Le contrat est d’une durée initiale de trois ans, avec une possibilité de renouvellement de deux ans. « Les médecins spécialistes partageront leur temps entre l’hôpital et la clinique médicale spécialisée », précise l’établissement de santé dans un courriel.
Dans son avis d’intention de conclusion de contrat, le CISSS des Laurentides rappelle l’état de « vétusté avancée » des installations à l’hôpital de Saint-Jérôme. Québec a réservé 450 millions de dollars pour la modernisation du centre hospitalier, notamment du plateau technique chirurgical. Or, « en fonction des échéanciers actuels et de la surchauffe du marché de la construction, la fin des travaux […] est prévue à la fin de 2030 », écrit le CISSS des Laurentides.
Une urgence pédiatrique
Déjà présent à Brossard, le centre d’urgences pédiatriques UP ouvrira une nouvelle clinique à Saint-Eustache le 5 juin. Elle sera accessible 365 jours par année, de 8 h à 20 h. Les parents pourront prendre un rendez-vous en ligne pour une urgence mineure ou se rendre sur place en cas de problème plus grave. Des patients seront réorientés à partir des urgences des hôpitaux des Basses-Laurentides.
« On va toujours accepter les enfants avec un bras cassé, une lacération ou une crise majeure d’asthme », souligne le Dr Alexander Sasha Dubrovsky, urgentologue pédiatrique et cofondateur du centre UP.
En plus de réaliser des prélèvements et des imageries, la clinique pourra offrir de l’oxygénothérapie, un « traitement qui ne se fait actuellement que dans une salle d’urgence », précise, à titre d’exemple, le CISSS des Laurentides.
Selon le Dr Dubrovsky, le modèle du centre d’urgences pédiatriques UP a déjà fait ses preuves. Il a été lancé à titre de projet-pilote à Brossard en 2019, en partenariat avec le CISSS de la Montérégie-Centre. « Dernièrement, on a une moyenne de 225 patients par jour, sur 12 h, dit-il. 98 % des patients sont vus par le médecin en 90 minutes. »
Le CISSS des Laurentides prévoit quelque 40 000 visites au centre UP dès la première année de fonctionnement, 50 000 dans la deuxième et 60 000 à partir de la troisième. Le contrat est d’une durée de cinq ans, avec une possibilité de renouvellement de cinq ans.
L’établissement souligne que les 0 à 17 ans « représentent 20 % de la population totale » des Laurentides, « soit la plus grande population de jeunes au Québec ». « L’accroissement de cette population est au-delà de la moyenne québécoise, avec 4,3 %, contrairement à 2,8 % pour l’ensemble du territoire », ajoute-t-on.
La Coalition Santé Laurentides, qui milite pour un meilleur accès aux soins dans la région, accueille favorablement ces deux initiatives, même si elles impliquent le privé. « Moi, ce que je veux, c’est d’avoir des services pour mes citoyens, dit son président, Marc L’Heureux, préfet de la MRC des Laurentides. L’important, c’est qu’il faut toujours que ce soit gratuit pour le patient et qu’il y ait une reddition de comptes sur comment se déroulent les opérations. »
Son regroupement réclame de Québec un rattrapage financier dans les Laurentides afin que les infrastructures hospitalières soient rénovées et adaptées aux besoins de la population, qui a doublé depuis 30 ans.
Pas de marge de profit garantie pour les mini-hôpitaux privés
Le premier ministre François Legault assure que les futurs mini-hôpitaux privés ne bénéficieront pas de marge de profit garantie, comme c’est actuellement le cas des cliniques privées qui réalisent des interventions chirurgicales pour le compte du réseau public. C’est ce qu’il a affirmé lors de l’étude des crédits budgétaires du ministère du Conseil exécutif mercredi. « Ce sera au privé à travailler de façon assez efficace pour dégager une marge de profit, a-t-il répondu au chef parlementaire de Québec Solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois. Mais ce n’est pas nous qui allons garantir des profits. On va payer par épisode de soins un montant équivalent à ce que ça nous coûte dans le secteur public. » Québec finance les coûts directs et indirects des cliniques privées, en plus d’une marge de profit, passée de 10 % à 15 % lors de la pandémie.