Un hôpital torontois entend construire des logements pour ses employés

Le réseau souhaite s’assurer que le personnel essentiel « peut avoir un équilibre travail-vie de haute qualité » selon une porte-parole du University Health Network (UHN).
Photo: Doug Ives archives La Presse canadienne Le réseau souhaite s’assurer que le personnel essentiel « peut avoir un équilibre travail-vie de haute qualité » selon une porte-parole du University Health Network (UHN).

L’un des plus grands réseaux hospitaliers du pays, le University Health Network (UHN) de Toronto, envisage de bâtir des appartements pour ses employés, une initiative qui pourrait aider ses quatre hôpitaux à recruter et à mieux retenir son personnel dans une ville de plus en plus inabordable.

Le loyer moyen d’un logement d’une chambre à Toronto a atteint 2500 $ au mois de mars, une augmentation de 21 % par rapport à pareille date l’an dernier. Au printemps 2022, un sondage de la chambre de commerce de Toronto auprès de ses membres révélait que le coût de la vie était l’enjeu le plus important auquel les entreprises faisaient face. Aujourd’hui, il s’agit de la pénurie de main-d’oeuvre, mais celle-ci est aussi liée au coût du logement.

La situation inquiète Jan De Silva, la p.-d.g. de la chambre de commerce. « Les travailleurs essentiels — les infirmières, les enseignants et les paramédicaux — choisissent des emplois plus près de chez eux, où ils ont les moyens de vivre, au lieu de Toronto », observe-t-elle. Le projet du réseau UHN pourrait en partie pallier le problème. La p.-d.g. imagine un scénario où une infirmière habite dans un logement de l’hôpital quatre jours, puis retourne chez elle pour la fin de semaine.

Le réseau UHN souhaite s’assurer que le personnel essentiel « peut avoir un équilibre travail-vie de haute qualité », dit une porte-parole de UHN, Gillian Howard. Le réseau travaille actuellement avec la Ville de Toronto. « Un nombre important de promoteurs du secteur privé nous ont approchés », poursuit Mme Howard. « La Ville et le UHN reconnaissent la nécessité de créer des occasions de logements abordables pour attirer et garder du personnel clé, comme les infirmières », écrit Valesa Faria, directrice du secrétariat du logement de la municipalité.

Modèle américain

De petits hôpitaux canadiens ont acheté ou bâti des logements pour leur personnel au cours des dernières années, mais le projet du UHN — qui est associé à l’Université de Toronto — pourrait être d’une tout autre échelle : le réseau compte près de 18 000 employés.Celui-ci dit s’inspirer de grands réseaux au sud de la frontière, comme celui de la New York University ou de l’University of San Francisco, qui emploie lui aussi 18 000 personnes.

Michael Hurley, le président du Conseil des syndicats d’hôpitaux de l’Ontario, qui compte des membres au sein du réseau, indique que le UHN « pense de la bonne façon ». L’idée, dit-il, est « éclairée ». L’inabordabilité à Toronto, explique-t-il, fait en sorte que nombre de personnes choisissent de trouver un emploi dans les hôpitaux des villes environnantes, comme Hamilton ou Brampton.

Ce type de projet soulève toutefois des questions sur la séparation entre la vie personnelle et professionnelle, d’après Shauna Brail, professeure de l’Université de Toronto à Mississauga qui étudie la transformation des villes. Un employé pourrait par exemple perdre son logement en changeant d’emploi à l’hôpital, dit-elle. Cette dernière n’est pas surprise de l’initiative par contre, puisque le réseau UHN a déjà annoncé la construction de logements assistés pour des patients.

Pas seul

Le UHN ne serait pas la première organisation torontoise ou ontarienne à innover pour mieux servir ses employés. En 2021, l’Université de Toronto a inauguré trois maisons, dont deux bâties dans des ruelles du campus. Deux familles étudiantes ainsi qu’un membre du corps professoral et sa famille y ont emménagé il y a deux ans. L’université est propriétaire de suffisamment de terrains pour construire jusqu’à 40 autres maisons dans des ruelles de la ville.

Dans la province, certaines entreprises subventionnent les mises de fonds ou le loyer de leurs employés, explique Paola Accettola, p.-d.g. de la firme de ressources humaines True North HR. « Même dans les petites villes, on voit une augmentation du coût de la vie et du logement. Les entreprises doivent reconsidérer leurs pratiques de rémunération », dit la résidente de Collingwood.

Ce reportage bénéficie du soutien de l’Initiative de journalisme local, financée par le gouvernement du Canada.

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