Dubé ouvre la porte à une refonte de la répartition régionale des médecins

Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a ouvert la porte mercredi à une réforme du système qui répartit les postes de médecin entre les différentes régions du Québec. En révisant ainsi le modèle des plans régionaux d’effectifs médicaux (PREM), il espère convaincre la relève de se tourner davantage vers la médecine familiale.
C’est du moins le message qu’il a voulu transmettre à un groupe d’étudiants lors d’un webinaire organisé mercredi par son ministère. « On vous a déjà écoutés pour implanter différents changements, et on va aussi vous écouter sur les PREM », a-t-il déclaré.
Peu avant, Christian Dubé leur avait demandé si les PREM faisaient partie « des freins pour accéder à la pratique de la médecine familiale » et « en quoi les PREM pourraient être revus ». Le ministre a aussi voulu savoir s’il serait « suffisant » de les « assouplir ».
Pas moins de 412 nouveaux PREM ont été octroyés en médecine de famille à travers le Québec en 2023, dont un nombre déterminé pour chaque région : 85 pour Montréal, 21 à Laval, etc. Or, de plus en plus d’étudiants boudent ces postes — et la médecine familiale en général. Ces deux dernières années, 140 de ces postes n’ont pas été pourvus au Québec. Pendant ce temps, le nombre de patients en attente d’un médecin de famille a dépassé les 800 000 personnes, soit 11 % de la population québécoise.
À la Fédération des médecins résidents du Québec (FMRQ), on confirme que le sujet des PREM « intéresse grandement » la relève. « On pense que ça fait partie de la solution », avance sa présidente, Jessica Ruel-Laliberté.
La FMRQ ne souhaite pas que les PREM soient abolis, dit-elle, mais plutôt assouplis. À titre d’exemple, lorsqu’un nouveau médecin de famille hérite d’un poste, l’État exige qu’il consacre quelques heures par semaine à une « activité médicale particulière » (AMP) dans un lieu qui lui est imposé (à l’urgence, en obstétrique, en CHSLD…).
« Ça peut être contraignant pour une personne qui n’a pas prévu de faire des suivis en CHSLD dans un contexte de pratique, note Mme Ruel-Laliberté. Mais en même temps, si les AMP n’existent pas, comment on s’assure qu’il y a assez de médecins en CHSLD ? » Peut-être, dit-elle, qu’on pourrait « valoriser les AMP » sans qu’ils soient obligatoires.
Un irritant parmi d’autres
Une préoccupation que partage la Fédération médicale étudiante du Québec (FMEQ). Les nombreuses « restrictions » touchant à la pratique de la médecine familiale sont pour beaucoup dans le désintérêt des étudiants, signale la déléguée aux affaires politiques de l’association, Vanessa Bisson-Gervais. « Certains des étudiants ont la perception qu’ils ne pourront pas entamer leur pratique à Montréal et qu’ils vont devoir s’expatrier en région », mentionne-t-elle.
Or, les PREM sont « un irritant parmi d’autres », dit la porte-parole de la FMEQ. Les étudiants ont aussi « peur du bureau » et de la charge administrative qui vient avec le métier. Les nombreux articles dans les médias sur les médecins de famille « surchargés » contribuent aussi à la démotivation, dit-elle. Il y a une dizaine de jours, le quotidien Montreal Gazette révélait d’ailleurs que 47 % des finissants en médecine familiale de l’Université McGill ne comptaient pas pratiquer dans le réseau public québécois en 2023.
La sortie du ministre sur les PREM survient alors qu’il se prépare à déposer un projet de loi sur l’efficacité du système de santé et sur la création d’une nouvelle agence extérieure au ministère.
Dans son message aux étudiants mercredi, M. Dubé a dit vouloir « débureaucratiser » leur pratique.
Le ministre de la Santé n’est par ailleurs pas le plus grand partisan des PREM, dont il n’a pas hésité à réviser les modalités dans le passé. Le Devoir avait révélé en octobre 2021 que le tiers des postes de médecin de famille octroyés à Montréal pour l’année 2022 avaient été transférés vers les régions du 450. Le ministre a répété l’exercice à moindre échelle pour l’année 2023 : la métropole a alors perdu 4 des 89 postes qui lui étaient destinés.
Le système des PREM a été instauré au début des années 2000 pour contrer la pénurie de médecins en région. La répartition des postes est déterminée par un comité formé de représentants du ministère de la Santé et des fédérations médicales, qui se base sur différents calculs pour trancher.