Revacciner les Québécois contre la COVID-19 ou pas?

Continuer à vacciner la population générale contre la COVID ou pas ? En ce début de 2023, Québec n’a pas tranché sur la suite à donner au vaccin bivalent, mais tout laisse croire que le Comité sur l’immunisation du Québec (CIQ) ne prônera pas une vaccination étendue, mais plutôt une action ciblant en priorité les personnes vulnérables qui n’ont jamais été infectées.

Alors que les cas de COVID-19 se multiplient aux États-Unis, poussés par l’arrivée du nouveau sous-variant XBB.1.5 — encore plus contagieux que ces prédécesseurs —, bien des gens se demandent si l’immunité conférée par un vaccin (monovalent ou bivalent) reçu à l’automne ou par une infection suffira à les protéger cet hiver.

Le CIQ, qui relève de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), a déjà transmis son avis au gouvernement, qui décidera sous peu quelles suites lui donner et quelles recommandations formuler aux Québécois. 

32 %
C’est le pourcentage d’efficacité du vaccin contre la COVID grave après une dose chez ceux qui n’ont jamais été infectés, alors qu’il est de 74 % après cinq doses.

Mais à l’orée de 2023, plusieurs autorités de santé dans le monde sont encore dubitatives par rapport à l’étape qui suivra le vaccin bivalent octroyé il y a trois ou quatre mois. « Qu’est-ce qu’on fait pour 2023 ? C’est la question que plusieurs se posent. Personne n’a encore tranché. Chose certaine, ceux qui ont reçu le vaccin bivalent en octobre au Québec ont encore de l’immunité pour un bon bout de temps », affirme le Dr Gaston De Serres, membre du CIQ et médecin-conseil à l’INSPQ.

Alors, faut-il une nouvelle dose de vaccin pour affronter l’hiver ? Il semble bien que la réponse actuelle soit non… pour la population générale.

Les non-infectés sous le radar

Sans dévoiler ce que recommandera le comité, le Dr De Serres affirme que l’avis scientifique du CIQ sera guidé par les mêmes données qui formaient les bases de celui de novembre dernier.

À ce moment, le comité d’experts ne recommandait pas l’octroi du vaccin bivalent à la population en santé, mais plutôt aux seules personnes n’ayant jamais été infectées et faisant partie de groupes à risque — les résidents des CHSLD et des RPA, les plus de 60 ans et les personnes immunodéprimées ou atteintes de maladies chroniques, notamment. Or, Québec a malgré tout continué d’inviter les gens vaccinés depuis plus de six mois à « rester à jour ». « Le CIQ ne recommandait pourtant pas de nouvelle dose pour les plus jeunes ou les personnes en santé déjà infectées. Le gouvernement a quand même décidé de rendre le vaccin accessible à tous », dit-il.

Les données actuelles démontrent que les personnes en santé qui ont une immunité hybride (vaccin et infection) n’ont pas besoin d’une dose additionnelle

 

Sur le plan scientifique, les données récoltées au Québec chez les plus de 60 ans depuis l’arrivée d’Omicron démontrent toutefois que l’immunité hybride (conférée par une infection ainsi qu’un vaccin monovalent) offre toujours une très bonne protection contre les hospitalisations dans les six à huit mois suivants (plus de 90 %), et ce, peu importe le nombre de doses reçues (deux, trois, quatre ou cinq doses).

« L’efficacité des vaccins a augmenté entre les doses parce que les vaccins étaient donnés dans un court laps de temps. Mais avec le temps, la protection diminue, et nos données démontrent que finalement, l’efficacité est la même après six mois, peu importe le nombre de doses reçues », explique le Dr De Serres.

Il en est tout autrement des personnes n’ayant jamais été infectées, qui, elles, gagnent à avoir une vaccination répétée si elles sont dans un groupe à risque, ajoute l’expert. Dans cette population, l’efficacité du vaccin à prévenir la COVID grave passe de 32 % après une dose à 74 % après cinq doses. Une donnée importante puisque, selon le Dr De Serres, jusqu’à 50 % des gens de plus de 60 ans n’ont jamais été infectés, tandis que 75 % des jeunes l’ont été.

« Les données actuelles démontrent que les personnes en santé qui ont une immunité hybride (vaccin et infection) n’ont pas besoin d’une dose additionnelle », affirme-t-il.

XBB.1.5 et la Chine

Mais plusieurs observateurs estiment que le variant XBB.1.5, à l’origine du bond actuel des hospitalisations aux États-Unis, milite en faveur d’une relance vaccinale. Le ministre de la Santé Christian Dubé a qualifié jeudi d’« inquiétante » la situation vécue au sud de la frontière et a affirmé surveiller de près son évolution. D’autres ajoutent que la virulence de l’épidémie en Chine, favorable à l’émergence de variants aptes à déjouer l’immunité actuelle, milite aussi en faveur d’un rappel.

« Si un variant émergent s’avère capable de contourner le vaccin… on n’arrivera à rien à relancer le vaccin, répond le Dr De Serres. Mais si les mêmes sous-variants sont en cause, il serait beaucoup plus logique d’augmenter la couverture vaccinale des personnes vulnérables jamais infectées que d’offrir une énième dose à tout le monde. Ça ne sert à rien de courir après des gens pour qui le vaccin ne changera rien. »

Il faudra attendre l’avis du CIQ pour connaître la position précise qu’il adoptera. Mais en fin de compte, quelle qu’elle soit, ce sera Québec qui décidera si les citoyens seront appelés ou non à tendre le bras de nouveau.


Une version précédente du texte, qui indiquait que le CIQ devrait transmettre sous peu au gouvernement son avis en matière de vaccination contre la COVID, a été modifiée. Le CIQ l'a, en réalité, déjà fait parvenir à Québec. 

À voir en vidéo