Quel est le risque de réinfection par Omicron?

Des centaines de milliers de Québécois ont contracté le variant Omicron dans les derniers mois. Après une accalmie, les cas semblent maintenant repartir à la hausse dans la province, tandis que le sous-variant BA.2 devient de plus en plus dominant. Quels sont les risques de se faire réinfecter ? Le Devoir fait le point avec des experts.

La version BA.2 d’Omicron représente maintenant près de la moitié des cas de COVID-19 recensés au Québec, selon le dernier bilan de la Santé publique. Celui-ci se transmettrait de 30 % à 50 % plus vite que son prédécesseur.

Depuis le début de la pandémie, trois millions de Québécois ont eu la COVID-19. Le Québec considère qu’une personne est « adéquatement protégée » contre le risque de réinfection pour une période de trois mois après avoir contracté le virus. Benoit Barbeau, virologue et professeur au Département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), explique qu’il est possible de se faire réinfecter pendant cette période.

« Si vous avez été infecté par Omicron, vous pouvez être infecté par Delta ou par BA.2 », dit-il. Trois sous-variants d’Omicron se seraient développés depuis aussi loin que les premiers mois de 2021, souligne l’expert. « Il y a BA.1, qui est celui qu’on appelle le variant Omicron. Il y a BA.2, qu’on subit présentement. Et un autre qui s’appelle BA.3, qui ne semble pas aussi compétitif que les autres. »

Les deux sous-variants sont reliés, mais ils sont différents, car ils ont eu le temps d’évoluer, de changer et de se différencier. « Il ne faut pas penser qu’Omicron, qui a généré la précédente vague, a donné lieu à BA.2. Ils ont été créés au même point d’origine », dit-il.

« Ils sont suffisamment différents pour que le risque de réinfection ne soit pas à zéro, surtout si les anticorps ont eu le temps de diminuer. »

Quelles seraient les chances de contracter le BA.2 demain matin si, par exemple, quelqu’un a attrapé Omicron il y a quelques mois ? L’état de la connaissance scientifique n’est pas encore clair, mais Benoît Barbeau estime qu’une personne pourrait être protégée de 70 à 80% contre une infection.
 
Une étude du Danemark montre que les personnes non-vaccinées ou inadéquatement vaccinées ont un risque d’être infectées à nouveau par BA.2 de 20 à 25%, mentionne le Dr Donald Vinh, microbiologiste-infectiologue au CUSM. Une autre étude en provenance du Qatar suggère qu’une personne qui a attrapé Omicron a de 5 à 12% de risque d’être réinfectée avec BA.2 après un mois et demi, souligne le Dr Vinh. « C’est un taux élevé », dit-il.

Pierre Talbot, professeur au Centre Armand-Frappier Santé Biotechnologie de l’INRS, affirme de son côté que le même type d’immunité se développe avec BA.1 et avec BA.2. « Le système immunitaire a une mémoire immunologique, donc l’immunité va se réactiver s’il revoit un virus similaire. C’est peu probable de ravoir une infection d’un des deux sous-variants. »

Il reste toutefois des zones floues, souligne le Dr Vinh, car il est difficile de savoir si quelqu’un a, par exemple, contracté Delta ou Omicron en décembre, comme les deux souches circulaient à ce moment. « Quelqu’un qui n’a pas été infecté par Omicron, mais plutôt par Delta, a un risque élevé d’attraper [un sous-variant], dit-il. Les personnes qui n’ont pas été infectées par BA.1 sont sous la menace de l’avoir cette fois-ci, et ils peuvent tomber malades. »

Quelle virulence ?

Lionel Berthoux, professeur dans les domaines de la virologie et des maladies infectieuses au Département de biologie médicale de l’Université du Québec à Trois-Rivières, nous met de son côté en garde contre ce qui est considéré comme une période de trois mois d’immunité.

« En réalité, deux semaines après une infection ou un vaccin, nous avons un niveau d’immunité à son maximum, qui, ensuite, va diminuer progressivement au cours des mois. L’immunité diminue plus vite après un vaccin qu’après une infection naturelle. Mais il n’y a pas de date magique avant laquelle on serait complètement protégé. Ça ne marche pas du tout comme ça, et c’est un mauvais message que la Santé publique envoie. »

Quelqu’un peut être exposé à nouveau au virus, mais les risques de complications sont faibles, pense-t-il. Selon lui, l’immunité des gens qui ont déjà contracté le BA.1 va rester bonne. « Le sous-variant BA.2 ne va pas faire une vague aussi grosse que celle de décembre et janvier » derniers, croit-il.

Les données sur la virulence du BA.2 ne sont pas encore claires, mais il ne serait pas plus dangereux qu’Omicron. « La majorité des études indiquent qu’il n’est pas associé à des symptômes plus graves, mentionne Benoit Barbeau. Il y a même une étude qui laisse croire qu’il est peut-être moins dangereux. »

Selon lui, il y a une « certaine immunité » au Québec, étant donné la couverture vaccinale et le nombre de personnes qui ont été infectées. « Ça va certainement nous donner un coup de main face à BA.2 », poursuit le professeur de l’UQAM. Elle peut protéger contre les risques d’infection et d’hospitalisation, croit-il, tout en ajoutant qu’il faut éviter d’être trop laxiste dans les mesures sanitaires contre la COVID-19.

Le Dr Vinh juge toutefois que la couverture vaccinale à trois doses, qui se chiffre à 52 % dans la province, n’est pas élevée. Il ajoute qu’il faut également prendre en considération le moment où la personne a reçu sa dernière dose. « Si quelqu’un a eu une troisième dose il y a quatre mois, il se peut que l’immunité ait diminué, et la personne peut se trouver à risque. »

Selon Benoit Barbeau, il ne faut pas penser que les prochains variants et sous-variants auront une virulence égale ou moindre à celle d’Omicron. « Il y a des chances que le prochain soit plus dangereux. On doit rester vigilants. »

Une version précédente de ce texte indiquait que Benoît Barbeau estimait les risques d'infection au BA.2 à 20% ou 30% pour une personne qui a contracté Omicron il y a quelques mois. Il estime plutôt qu'une personne dans cette situation est protégée de 70% à 80% contre une infection.

La CIQ recommande «une nouvelle stratégie vaccinale»

Le Comité sur l’immunisation du Québec (CIQ) s’est prononcé jeudi sur la « stratégie vaccinale » à adopter pour « optimiser le contrôle de la COVID-19 à plus long terme ». « Plutôt que de vacciner le plus rapidement possible le maximum de personnes avec le nombre le plus élevé possible de doses, une vision à plus long terme doit être envisagée dans une optique de transition d’une situation épidémique à une situation endémique », soulignent les experts dans un avis d’une vingtaine de pages.

Étant donné la reprise actuelle des infections, le CIQ juge « justifiable » de déployer « rapidement » la quatrième dose auprès des personnes plus âgées, et donc, plus vulnérables. Mais advenant un nouveau variant, il est « très vraisemblable » qu’une dose de rappel soit nécessaire pour davantage de personnes. Dans ce cas, une campagne de vaccination avant la prochaine rentrée scolaire doit être envisagée. L’autre option consiste à combiner les injections contre la grippe saisonnière avec celles contre la COVID-19. Cette façon de faire « présenterait des avantages notables en termes d’acceptabilité et de faisabilité », en plus de viser toutes deux le même type de clientèle vulnérable.


François Legault atteint de la COVID-19

Le premier ministre du Québec, François Legault, a été déclaré positif à la COVID-19.

Dans une publication sur les réseaux sociaux, il a dit avoir commencé à ressentir des symptômes de la maladie ce jeudi après-midi, mais a ajouté se sentir « bien ». « On le voit avec la montée des cas dernièrement : le virus est présent au Québec. Continuons d’être prudents. On va s’en sortir ensemble », a écrit le premier ministre.

Il travaillera à distance pendant les cinq prochains jours. « Pour le moment », aucun cas n’a été signalé parmi les autres députés de la CAQ, selon le cabinet du whip du gouvernement. Tout le personnel a toutefois été prié de suivre les consignes de santé publique « selon l’exposition qu’ils ont eue avec le premier ministre ».

Depuis la semaine dernière, l’ensemble des députés siègent en personne au Salon bleu, à condition de porter le masque. Seule la personne qui parle peut le retirer temporairement. Les séparateurs de plexiglas ont été retirés entre les parlementaires.



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