Au front durant la pandémie, des urgentologues sont épuisés

Les urgences se suivent et ne se ressemblent pas. Les spécialistes de la question — les urgentologues — peuvent nous aider à composer avec les dangers imminents, quoiqu’ils soient, à leur propre regret, « des cordonniers mal chaussés ».
« Quand on pense à la pandémie, quand on pense à la guerre, dans nos vies quotidiennes, on vit des stress. Il faut apprendre à contrôler ce qu’on peut contrôler, conseille le Dr Patrick Archambault, spécialiste en médecine d’urgence à l’Hôtel-Dieu de Lévis. Ça veut dire bien manger, bien dormir. Essayer de vivre des vies actives, où l’on dépense de l’énergie sainement. Il faut rester actif. Et se protéger : il faut apprendre à être capable de parler, à ne pas garder les émotions à l’intérieur de soi. Il faut être capable d’en parler avec quelqu’un de proche. Souvent, on n’est pas seul dans nos cercles. Il faut apprendre à dire non. Et il faut aller chercher de l’aide quand on en a besoin. »
« C’est facile à dire », se désole à regret l’expert. Il vient tout juste de cosigner une publication qui établit à 60 % la proportion d’urgentologues qui présentaient des signes d’épuisement professionnel.
« C’est malheureusement un autre cas de cordonniers mal chaussés. Il y a une certaine attitude dans le milieu, une posture d’invincibilité, qui fait que demander de l’aide ne vient pas spontanément », explique-t-il.
L’isolement, les masques et les distances en tout genre depuis deux ans pèsent lourd pour ces spécialistes aux nerfs d’acier. « [Avec des combinaisons sanitaires], c’est moins facile d’exprimer de l’empathie. Avec des masques, on est moins capables de lire les expressions sur le visage des patients. Tout le côté humain de la médecine est réduit. »
De plus, les exigences ont atteint des sommets périlleux. « À plusieurs moments durant la pandémie, on est arrivés très près de la cassure, avec des simulations de triage, où l’on doit simuler et prendre des décisions de vie ou de mort… heureusement, on n’en est jamais arrivés là. »
« Je ne crois pas que les 60 % soient très différents pour les autres professionnels de la santé », souligne d’ailleurs le Dr Archambault.
Cette étude a été réalisée lors de la deuxième vague, à l’automne 2020. Tout indique que ce nombre de travailleurs de la santé épuisés professionnellement doit être plus élevé aujourd’hui, selon son « impression ».
Le Programme d’aide aux médecins du Québec constitue une excellente option pour obtenir du soutien en tant que professionnel de la santé.
Ce texte est tiré de notre infolettre « Le courrier du coronavirus » du 28 février 2022. Pour vous abonner, cliquez ici.