L’aide de la Croix-Rouge ralentie par la pénurie de main-d’oeuvre

L’aide réclamée par Québec dans les milieux de vie pour aînés devra attendre encore un peu. La Croix-Rouge se heurte, elle aussi, à la pénurie de main-d’œuvre, a appris Le Devoir, et peine à recruter les intervenants appelés en renfort fin décembre.
Après l’effort de guerre offert en début de pandémie dans les CHSLD, la Croix-Rouge a accepté juste avant les Fêtes de prêter main-forte à nouveau en mettant à disposition des centres pour aînés 300 intervenants pendant quatre mois.
Or, trois semaines après le début de ce déploiement entamé le 10 janvier, 46 personnes ont été dépêchées dans trois milieux de vie (à Montréal, Saint-Hyacinthe et Trois-Rivières). À ce chiffre s’ajouteront bientôt environ 25 autres intervenants, qui devraient terminer leur formation la semaine prochaine. La Croix-Rouge comptera alors quelque 70 intervenants, après un mois de sa nouvelle mission qui doit prendre fin le 1er mai.
« Ce ne sont pas des chiffres qui sont énormes à ce moment-ci. Le recrutement est assez difficile », convient le vice-président Québec de la Croix-Rouge, Pascal Mathieu, qui ne peut pas prédire à quelle date l’ensemble des effectifs sera sur le terrain.
« La pénurie de main-d’œuvre retarde nos opérations », a-t-il expliqué en entrevue au Devoir.
Un contexte plus difficile
Pendant neuf mois, entre juillet 2020 et mars 2021, l’organisme avait fourni plus de 1000 intervenants dans les centres de soin de longue durée du Québec, en prenant ainsi le relais de l’armée canadienne qui venait d’être déployée pour calmer la crise dans les CHSLD.
À l’époque, le recrutement avait été rapide, se souvient M. Mathieu. Le Québec était en confinement presque complet, ce qui a fait qu’une grande part de la population était sans emploi et disponible pour contribuer. Une part de ce déploiement s’est également faite l’été, lorsque les étudiants étaient eux aussi disposés à travailler.
« L’an dernier, on a trouvé 1000 personnes en quelques mois. On trouvait notre monde plus vite que les milieux de vie ne pouvaient nous recevoir. Maintenant, c’est un peu l’inverse », relate le vice-président Québec de la Croix-Rouge.
La majorité de la population active est de nouveau à l’emploi. Les étudiants sont de retour en classe pour le début de la session d’hiver. Et s’ajoutent à ces défis les efforts de recrutement intensifs du réseau de la santé, qui offre quant à lui des postes permanents avec avantages sociaux.
« On est un peu les pompiers du réseau, illustre Pascal Mathieu. Je peine à trouver mes pompiers. »
Le bureau du ministre de la Santé, Christian Dubé, s’est dit conscient que la Croix-Rouge, comme le réseau de la santé, « connaît des enjeux de recrutement de personnel ». « Nous reconnaissons leurs efforts », a commenté l’attachée de presse du ministre, Marjaurie Côté-Boileau.
Le ministère de la Santé jongle lui-même avec une baisse des effectifs dans le réseau, puisque de nombreux travailleurs sont absents en raison du virus. Mme Côté-Boileau note que le gouvernement poursuit ses propres efforts de recrutement, en vue de stabiliser le réseau, et que 1000 fonctionnaires « ont levé la main et pourront être complémentaires au réseau de la santé ».
Des effectifs déjà sollicités
Le ministre Dubé a appelé l’armée canadienne et la Croix-Rouge à l’aide, au début de la vague de cas entraînés par le variant Omicron fin décembre, pour pallier le manque d’employés disponibles dans le réseau de la santé ainsi que dans les centres de vaccination et de dépistage.
Les Forces armées canadiennes ont déployé 200 militaires dans les centres de vaccination de dix municipalités québécoises.
Le gouvernement de François Legault avait en outre réclamé l’aide d’au moins 300 intervenants de la Croix-Rouge. L’organisme s’est engagé à atteindre ce nombre, mais a averti qu’il ne pourrait pas l’excéder.
Car la Croix-Rouge doit en outre maintenir ses autres opérations pandémiques, comme la prévention d’infections et d’épidémies dans les CHSLD et autres centres pour aînés, de l’aide au Nunavik et le soutien offert à la population itinérante de Montréal. L’organisme répond aussi en moyenne à trois ou quatre incendies résidentiels par jour au Québec.
« La Croix-Rouge répond à mille et une urgences. Mais finalement, à chaque fois, ça pige dans nos troupes », résume Pascal Mathieu.