Des variants bien présents à l’étendue encore inconnue

La transmission communautaire de variants préoccupants du coronavirus est bien en marche au Canada. Les autorités fédérales de santé publique ne sont toutefois pas en mesure de détailler la prévalence réelle de ces versions plus transmissibles de la COVID-19 au sein de la population ni de circonscrire l’étendue de leur propagation.
« Même si peu de cas ont été recensés au Canada jusqu’à présent, nous constatons les premiers signes d’une transmission communautaire, ce qui est très inquiétant », a déclaré Guillaume Poliquin, le directeur général intérimaire du Laboratoire national de microbiologie de l’Agence de la santé publique du Canada, dans une conférence de presse tenue mardi.
À titre d’exemple, on rapportait lundi une éclosion de COVID-19 dans une usine de viande de Toronto. Au moins 2 des 78 cas relèvent du variant B.1.1.7, qui a d’abord été détecté au Royaume-Uni, et d’autres tests sont en cours. Aucun indice ne laisse croire qu’une introduction depuis l’étranger soit la cause de cette éclosion.
En tout, on compte au Canada 135 cas du variant B.1.1.7 et au moins 13 cas du variant B.1.351, qui a d’abord été découvert en Afrique du Sud. Le variant P.1, d’abord vu au Brésil, n’a pas encore été trouvé au Canada. Au Québec, on rapporte 8 cas imputables au variant B.1.1.7.
« Il est un peu tôt en ce moment pour spéculer [et estimer] quelle proportion [des cas imputables aux variants préoccupants] serait non détectée », a dit le Dr Poliquin. Une analyse exhaustive en Ontario, réalisée pour tous les cas de COVID-19 détectés lors d’une journée donnée, est toutefois en cours. Les résultats de ce coup d’œil transversal devraient être disponibles « d’ici quelques jours », selon le haut fonctionnaire.
Le variant B.1.1.7 est environ 50 % plus transmissible que les versions les plus communes du SRAS-CoV-2. Il domine actuellement l’épidémie en Angleterre. Aux États-Unis, plus de 400 cas y ont été associés. Les autorités américaines de santé publique estiment qu’il pourrait être majoritaire dans ce pays dès la mi-mars.
Les laboratoires canadiens redoublent d’efforts pour surveiller la présence et l’émergence de variants préoccupants. En janvier, ils ont réalisé le séquençage génétique de 5000 échantillons, par rapport à environ 3000 par mois l’automne dernier.
La capacité en la matière du Canada permet de décoder le génome viral d’environ 5 % des tests positifs, ce qui est « similaire à plusieurs autres pays meneurs à ce chapitre », a défendu le Dr Poliquin.
Les variants émergents suscitent aussi des questions au sujet de l’efficacité des vaccins. Certaines de leurs mutations pourraient éventuellement diminuer l’efficacité de l’immunité induite par le vaccin, a reconnu Charu Kaushic, la directrice scientifique de la division de l’infection et de l’immunité des Instituts de recherche en santé du Canada, qui participait aussi au breffage technique.
Heureusement, juge la Dre Kaushic, rien n’indique pour l’instant que les variants fassent tomber l’efficacité des vaccins sous la barre des 50 %, à laquelle il faudrait commencer à se poser des questions. « Je ne crois pas qu’on doive s’en inquiéter, pour le moment, mais il faut garder un œil là-dessus », a-t-elle dit.
Notons que le vaccin élaboré par Novavax n’atteint pas tout à fait ce critère. Selon les essais cliniques, ce sérum, qui sera produit à Montréal dans quelques mois, est efficace à 95 % contre les souches principales de coronavirus, à 89 % contre le variant britannique, et à 49 % contre le variant sud-africain.