Lent décollage pour la vaccination au Québec

Le Québec n’a vacciné que 19 643 personnes contre la COVID-19, deux semaines après la réception du premier vaccin de Pfizer. À un rythme de 1403 doses administrées par jour, en moyenne, cela prendrait plus de 16 ans et demi pour vacciner toute la population de la province. Une cadence que promet d’accélérer le gouvernement Legault.

À court terme, le système de santé devra mettre les bouchées doubles s’il veut atteindre son objectif de 57 000 personnes vaccinées au 4 janvier. Alors que le Canada a dépassé lundi le cap des 15 000 décès liés à la pandémie de COVID-19, un nouveau vaccin s’est ajouté à son arsenal. Le vaccin de Moderna, qui peut être administré à partir d’un plus grand nombre de sites, devrait accélérer considérablement le rythme de vaccination.

Malgré ce départ de tortue, le Québec est bien en selle pour devenir le champion canadien de la vaccination, selon les données consultées par Le Devoir qui ont été compilées par le COVID-19 Canada Open Data Working Group, mené par des doctorants de l’Université de Toronto. La province surpasse ainsi les 13 200 doses administrées en Ontario, en date de lundi, ainsi que les 8178 en Colombie-Britannique et les 4711 en Alberta, selon des données préliminaires datant de dimanche.

Accélération en vue

 

Le gouvernement québécois compte bien augmenter sa cadence de vaccination, confirme l’attachée de presse du ministre de la Santé, Christian Dubé. « Comme prévu, les opérations s’accélèrent grâce aux 21 nouveaux sites de vaccination qui sont en déploiement depuis la semaine dernière et elles continueront de s’accélérer dans les prochains jours et prochaines semaines, a indiqué Marjaurie Côté-Boileau. L’ajout du vaccin Moderna permettra certainement de recevoir plus de doses afin de vacciner plus de personnes, toujours selon la priorisation des groupes recommandés par le Comité sur l’immunisation du Québec. »

   

« Ça dépend toujours de si on a les ressources, a avancé Benoît Mâsse, professeur et chercheur à l’École de santé publique de l’Université de Montréal. Ça prend quand même du personnel médical avec de la formation. » Or, avec le nombre de cas quotidiens qui ne donne aucun signe d’essoufflement, le personnel de la santé en a déjà plein les bras. « Tout ça devient ambitieux, a-t-il ajouté. Est-ce qu’ils ont les ressources humaines pour couvrir tout ça ? »

Le gouvernement a « tout le personnel en place, et disponible, nécessaire à l’opération de la vaccination contre la COVID-19 », a indiqué Mme Côté-Boileau, en rappelant qu’il avait fait appel à 30 ordres et associations professionnelles pour « élargir le bassin de vaccinateurs ».

Vitesse variable

 

Rendu disponible le 14 décembre au pays, le vaccin de Pfizer était initialement livré par boîtes de 975 doses directement aux quelques sites de vaccination. Les données fournies par Québec montrent qu’au total, 292 doses ont été administrées cette première journée médiatique, avant qu’une vitesse de croisière qui fluctue énormément d’une journée à l’autre soit atteinte. Hormis la pause du jour de Noël (aucune vaccination), le système de santé québécois a vacciné chaque jour un nombre de personnes variant entre 115 (le dimanche 20 décembre) et 3942 (le jeudi 24 décembre).

Les trois régions où le plus grand nombre de doses ont été administrées sont Montréal (4353), la Montérégie (4230) et la Capitale-Nationale (3460). Cette dernière a reçu en tout 4875 doses réparties entre deux établissements : le CHSLD Saint-Antoine et l’Institut universitaire de santé mentale de Québec. Les résidents et le personnel ont déjà été vaccinés. Les autres doses iront au personnel des CHSLD, des ressources intermédiaires et des ressources de type familial. On commencera à administrer les secondes doses à compter du 4 janvier.

« C’est sûr que la tâche devient un peu plus lourde plus on avance, parce que les trois semaines [avant l’injection de la deuxième dose] vont arriver » à échéance, a constaté Benoît Mâsse. Les personnes qui ont reçu une première dose du vaccin doivent en effet en recevoir une deuxième 21 jours plus tard, pour maximiser l’efficacité de l’inoculation.

Le gériatre David Lussier, qui a reçu son vaccin lundi à Montréal, a déjà son prochain rendez-vous. « On nous donne tout de suite le rendez-vous pour la deuxième dose dans trois semaines, donc, comme ça, il y a un contrôle qui est fait, a-t-il dit. C’était un peu mon inquiétude de savoir comment on va gérer ça pour la deuxième dose : est-ce qu’il va falloir appeler, est-ce qu’on va avoir de la difficulté à avoir le rendez-vous au bon moment ? » Le médecin de l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal s’est porté volontaire pour aller travailler en zone chaude à l’Hôtel-Dieu de Montréal durant la période des Fêtes.

Le système de santé du Québec et ceux des autres provinces devront accélérer le pas pour suivre la vitesse à laquelle le Canada s’attend à recevoir ses cargaisons de vaccins en 2021. En comptant les doses déjà arrivées au pays, dont quelque 168 000 doses livrées par Moderna le 24 décembre et une livraison identique prévue d’ici deux semaines, les provinces se partageront un total de 1,2 million de doses des compagnies Pfizer et Moderna d’ici la fin du mois de janvier.

Si tout se déroule comme prévu, et que les vaccins sont administrés à un rythme beaucoup plus soutenu qu’en ce moment, la population générale peut s’attendre à recevoir le vaccin dès avril, une fois les populations prioritaires vaccinées. La plus vaste opération d’inoculation de l’histoire du pays doit se dérouler jusqu’à la fin de l’année 2021.

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