Les patrons du CHSLD de Sainte-Dorothée montrés du doigt

Sainte-Dorothée est l’établissement où il y a eu le plus de pertes humaines au Québec pendant la COVID-19 avec pas moins de 100 décès.
Photo: Ryan Remiorz La Presse canadienne Sainte-Dorothée est l’établissement où il y a eu le plus de pertes humaines au Québec pendant la COVID-19 avec pas moins de 100 décès.

Le personnel du CHSLD de Sainte-Dorothée, où 100 personnes sont mortes de la COVID-19, a été laissé à lui-même par la direction du Centre intégré de la santé et de services sociaux (CISSS) de Laval, selon un rapport rendu public mercredi.

« Dès le 18 mars, la situation préoccupante au CHSLD aurait dû faire l’objet d’un appel pressant en haut lieu », écrit l’enquêteur Yves Benoît dans un rapport remis au ministère de la Santé. M. Benoît s’étonne en outre de l’absence de gestionnaires de niveaux supérieurs sur place au plus fort de l’éclosion.

Sainte-Dorothée est l’établissement où il y a eu le plus de pertes humaines au Québec pendant la COVID-19 avec pas moins de 100 décès.

Le 18 mars, la moitié des responsables d’unité étaient en arrêt maladie, en plus d’employés malades ou en attente de dépistage, explique-t-on dans le rapport. Le personnel d’agence refusait de travailler en zone chaude et désertait les lieux tandis que les aidants naturels étaient privés d’accès au site. Quant aux médecins, la plupart d’entre eux avaient quitté pour privilégier la télé-consultation.

La premières éclosions surviennent six jours plus tard, mais ce n’est que le 2 avril que de nouveaux gestionnaires arrivent en renfort. À ce moment-là, le CHSLD était dans l’œil de la tempête. « Plus de cinq niveaux hiérarchiques séparent le p.-d.g. du CISSS de Laval du premier répondant gestionnaire », a constaté l’enquêteur Yves Benoît. « La réalité terrain demeure à grande distance et les communications d’alerte ne semblent pas considérées à leur juste importance. »

Des envois papiers et plus de 600 employés différents

 

Autre défaillance majeure : le roulement de personnel. Dans son enquête, M. Benoît a découvert que pas moins de 601 personnes différentes étaient venues travailler à Sainte-Dorothée entre la mi-mars et la fin juin, dont 60 % venaient de l’extérieur.

Étant donné que cela a contribué à la propagation du virus, l’enquêteur plaide pour qu’on stabilise davantage les ressources humaines sur un même site. L’auteur souligne par ailleurs le « courage » dont a fait preuve le personnel qui a tenu le fort pendant la crise.

Enfin, la désorganisation des ressources humaines était d’autant plus grande à Sainte-Dorothée que le système informatique ne fonctionnait pas, révèle le document.

« Les communications, essentielles en pareille situation, sont compliquées du fait que les chefs d’unité […] sont des remplaçants qui n’ont pas les accès requis pour consulter la banque de données informatisées », peut-on lire. Dans ce contexte, on devait miser sur des « envois papier » pour informer le personnel.

Quelles suites ?

Le ministère de la Santé a le rapport en main depuis juin. Dans un communiqué de presse, le gouvernement a fait savoir qu’il en avait tenu compte pour élaborer son plan d’action pour une deuxième vague de la COVID-19.

Le communiqué souligne que contrairement au CHSLD Herron, Sainte-Dorothée offrait des soins de qualité avant la crise de la COVID-19. « Des enjeux d’ordre technique et un manque de personnel ont mené à la situation déplorable que l’on connaît », a écrit le service des communications du ministère.

Par ailleurs, d’autres enquêtes sont en cours sur la crise de la COVID-19 dans les résidences pour aînés. Les bureaux du Coroner et du Protecteur du citoyen doivent aussi présenter des rapports à ce sujet.

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