Le Groupe Maurice aurait obligé des aînés à aller mourir à l’hôpital

Le Groupe Maurice a forcé la main de personnes âgées en fin de vie, atteintes de la COVID-19, en les poussant à quitter la résidence de L’Île-des- Sœurs, L’Ambiance, pour être transférées à l’hôpital, dénonce la Dre Eveline Gaillardetz, chef de soins à domicile du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal. Ce que nie avec vigueur le promoteur.

La Dre Eveline Gaillardetz déplore qu’un résident de 93 ans, souffrant de la COVID-19, se soit retrouvé sur une civière à l’urgence après avoir été transféré à l’hôpital de Verdun, contre l’avis de son épouse, il y a près de deux semaines. D’autres familles ont subi de la pression pour que leur proche soit transféré, soutient la Dre Eveline Gaillardetz. « C’est une éviction en douce », dit la médecin. Ces « gens frêles et vulnérables » souhaitaient obtenir des soins de confort et mourir dans leur appartement, dit-elle.

La luxueuse résidence L’Ambiance est aux prises avec une éclosion de la COVID-19. Vingt-trois résidents en sont atteints. Six d’entre eux ont été hospitalisés. Une personne est morte de la maladie dans les murs de l’établissement. Des employés sont malades ou en isolement.

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Réaction de la direction

 

« Il n’y a pas eu de cas de transfert de résident à l’hôpital contre le gré des familles », assure Rita Kataroyan, vice-présidente marketing du Groupe Maurice. Cette décision, dit-elle, a été prise afin d’assurer la sécurité des autres résidents et du personnel.

« Ça n’a pas été fait de gaieté de cœur », ajoute-t-elle.

Le Groupe Maurice dit s’appuyer sur une directive gouvernementale selon laquelle il faut transférer à l’hôpital les résidents atteints de la COVID-19, qui « sont à risque d’errance ».

Or, dans ses directives aux résidences privées pour aînés (RPA), le ministère de la Santé et des Services sociaux indique que « l’établissement recommandera un transfert vers un milieu de confinement situé dans un lieu préalablement déterminé » dans deux cas de figure : lorsque « la personne n’est pas autonome pour s’occuper d’elle-même ou la RPA ne dispose pas de personnel formé ayant accès aux équipements de protection individuelle pour donner l’assistance requise en toute sécurité » ; ou lorsque « la personne n’est pas en mesure de se conformer de façon stricte aux consignes de confinement à la chambre (par exemple, en présence de troubles neurocognitifs) ».

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C’est le nombre de résidents atteints de la COVID-19 dans la luxueuse résidence L’Ambiance, située à L’Île-des- Soeurs.

La mère de Marianne (nom fictif) réside dans l’unité de soins de L’Ambiance. Atteinte d’un stade avancé de la maladie d’Alzheimer, elle souffre de la COVID-19. La maladie l’a affaiblie.

« Elle prend un petit médicament pour ne pas faire d’errance, précise Marianne, qui témoigne sous le couvert de l’anonymat par crainte de représailles. Elle reste tranquille dans sa chambre. »

Sa mère a fait le souhait de mourir à L’Ambiance, sans acharnement thérapeutique. Malgré tout, elle a bien failli être transportée à l’hôpital de Verdun, s’indigne Marianne.

Marianne dénonce le manque « flagrant » de préparation du Groupe Maurice à une éclosion. « La direction aurait pu et aurait dû se préparer pour pouvoir faire en sorte qu’elle puisse garder tous les [résidents] », dit-elle. Marianne souligne que sa mère paye son loyer plus de 6500 $ par mois. « Est-ce une question d’image ? demande-t-elle. Ils ne veulent pas avoir de gens mourir chez eux ? »

Le Groupe Maurice dit qu’il fait face à une pénurie de main-d’œuvre, comme d’autres résidences ou CHSLD. Pour soutenir L’Ambiance, le CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal a dépêché mardi un microbiologiste, un conseiller en prévention des infections et un gestionnaire en soins à domicile.

Le CIUSSS dit aussi être « en train d’aménager un site » pour accueillir les malades atteints de la COVID-19, venant de résidences privées pour aînés. 



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