Des infirmières laissées à elles-mêmes à l'Institut en santé mentale de Québec

Vue sur l'Institut universitaire en santé mentale de Québec 
Photo: JOF photo CC Vue sur l'Institut universitaire en santé mentale de Québec 

À compter de la fin mars, il n’y aura plus de médecin le soir, la nuit et la fin de semaine à l’Institut universitaire en santé mentale de Québec (IUSMQ). Une décision qui fait craindre aux infirmières une nouvelle surcharge de travail.

« On sait très bien que, dans les départements de psychiatrie, il y a beaucoup de débordements actuellement. Le personnel est déjà à bout de souffle », explique la vice-présidente du Syndicat des professionnels en soins de la capitale nationale affilié à la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ), Johanne Boies.

« Ça va être une surcharge de travail pour les professionnels en soins. […] C’est comme si on mettait sur leurs épaules la responsabilité du patient. »

Ces révélations surviennent une semaine après la rencontre du ministre de la Santé, Gaétan Barrette, avec la présidence de la FIQ pour régler les problèmes de surcharge déjà présents dans le réseau.

L’IUSMQ compte un peu plus de 300 patients hospitalisés pour des problèmes de santé mentale. Jusqu’à présent, il y avait toujours un médecin généraliste sur place pour intervenir au besoin sur des problèmes de santé physique imprévus.

Or, désormais, ce ne sera plus le cas à compter de 16 h la semaine, ainsi que la fin de semaine. En guise de remplacement, des médecins seront sur appel, mais pourront dormir chez eux.

Ce changement n’inquiète pas seulement les infirmières. Dans une lettre dont Le Devoir a obtenu copie, la chef de service par intérim du Service de psychiatrie d’urgence plaide qu’un tel changement est « inacceptable ».

« Une solution doit absolument être mise en place rapidement, car il ne sera plus sécuritaire d’admettre des patients en psychiatrie sans cette couverture de garde », dénonçait, le 17 janvier, Édith Labonté dans une lettre aux chefs du Département de psychiatrie du Centre intégré de santé et de services sociaux de la capitale nationale (CIUSSS).

La chef de service signalait que « de nombreuses situations médicales aiguës » peuvent survenir à l’IUSMQ, notamment des manoeuvres de réanimation. Elle soulignait que « la population souffrant de troubles psychiatriques est plus lourdement atteinte en matière de santé physique que la population générale ».

Un service jugé non nécessaire

 

Au CIUSSS, on explique que cette décision découle du départ à la retraite de plusieurs médecins, mais qu’on aurait probablement fait des changements de toute façon pour « moderniser » les soins.

« Ce n’est plus absolument nécessaire », explique le Dr Pierre Laliberté, directeur des services professionnels. « On peut organiser le service pour répondre à des situations d’urgence. »

M. Laliberté ajoute que les patients qui arrivent à l’Institut ont déjà été évalués du point de vue de la santé physique et sont « en situation de stabilisation ».

Selon lui, le changement ne pose aucun danger pour les patients. « Le chef du Département de psychiatrie et le chef de service de médecine familiale disent que c’est bien organisé. […] Il y a peut-être des craintes de certains, mais […] c’est tout à fait acceptable. »

D’emblée, dit-il, en cas d’urgence, l’hôpital de l’Enfant-Jésus, lequel offre des soins spécialisés « est à peu près à 5 minutes d’ambulance ». « Si un patient fait un infarctus du myocarde ici, on ne le traite pas sur place, on le traite selon les normes minimales des corridors de services, puis il s’en va vers un centre de cardiologie comme l’Institut de cardio ou l’Hôtel-Dieu et il est pris en charge. »

Or, pour Mme Boies, « on ne fait que déplacer le problème ». « Pour un patient avec des symptômes de problèmes cardiaques, le généraliste pouvait ausculter le patient, prescrire un traitement. Ça nous permettait d’éviter beaucoup de transferts vers l’urgence. » Mme Boies se demande en outre si le médecin sur appel « va vraiment se déplacer » ou dire à l’infirmière de transférer le patient à l’urgence.

À voir en vidéo