Six ordres professionnels demandent un appel sur l’aide à mourir

Les divers ordres professionnels déplorent la confusion autour de l'aide à mourir. 
Photo: iStock Les divers ordres professionnels déplorent la confusion autour de l'aide à mourir. 

Les ordres professionnels des médecins, pharmaciens, infirmières, avocats, notaires et travailleurs sociaux pressent en bloc la ministre de la Justice du Québec de renvoyer prestement la loi fédérale sur l’aide à mourir en cour d’appel. En raison de l’« insécurité juridique » et de la confusion dans les pratiques générées par la cohabitation des lois fédérale et provinciale, ces ordres demandent des « actions rapides » et une rencontre avec la ministre.

Dans une lettre commune envoyée à la ministre Stéphanie Vallée et au ministre de la Santé, Gaétan Barrette, le Collège des médecins du Québec, l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, l’Ordre des pharmaciens du Québec, l’Ordre des travailleurs sociaux du Québec, le Barreau du Québec et la Chambre des notaires décrient la confusion qui continue de régner plus de six mois après l’adoption de la loi fédérale.

« Nous sommes vivement préoccupés par la confusion des normes qui encadrent l’aide à mourir au Québec », est-il écrit dans la lettre, obtenue par Le Devoir. Évoquant les deux lois adoptées après l’arrêt Carter de la Cour suprême, qui avait adopté une position beaucoup moins restrictive à l’égard de l’aide à mourir, les six ordres estiment que ces trois événements ont donné naissance à « une série de normes qui ne sont pas toujours conciliables », « notamment sur les critères d’accès à l’aide à mourir ».

Depuis l’adoption de la loi fédérale, le premier ministre Justin Trudeau, et le ministre provincial de la Santé, Gaétan Barrette, ont refusé catégoriquement de demander à un tribunal de haute instance le soin de statuer sur la compatibilité de cette loi avec l’arrêt Carter. Le ministre Barrette a même envoyé une directive en juillet dernier aux établissements de santé rappelant que la nouvelle loi instaurait un délai de dix jours avant d’autoriser une demande d’aide à mourir. Et ce, bien que la loi québécoise n’en prévoie aucun.

Dans ce contexte, le Barreau du Québec avait déjà invité, le 15 septembre dernier, la ministre Vallée à mettre fin à l’imbroglio et à « faire preuve de leadership » dans le dossier de l’aide à mourir en réclamant un renvoi en cour d’appel. La rencontre réclamée par lettre le 21 novembre dernier par les six ordres professionnels est depuis restée lettre morte. L’attachée de presse de la ministre Vallée n’a pas indiqué lundi quelle réponse la ministre entendait donner à cette demande.

Des impacts sur les patients

 

Non seulement la coexistence de plusieurs normes juridiques crée beaucoup de confusion chez les professionnels, mais elle cause des torts irrémédiables aux patients, estime Me Jean-Pierre Ménard, avocat spécialisé dans la défense des patients, notamment de ceux souhaitant obtenir l’aide à mourir.

« La loi fédérale a fait perdre à plusieurs personnes l’accès à l’aide à mourir. Elle a prépondérance sur la loi provinciale, notamment sur le délai de 10 jours qui n’était pas exigé dans la loi du Québec. Cela crée des difficultés d’applications importantes », insiste ce dernier.

Même si la validité de la loi fédérale est présentement contestée en cour par une patiente de la Colombie-Britannique atteinte de sclérose latérale amyotrophique, cette procédure fait peser tout le fardeau de la contestation sur les patients.

 

« Il n’y a pas de justifications pour attendre si longtemps. Nous sommes sollicités par de nombreux patients qui ne sont pas satisfaits de la loi fédérale », ajoute Me Ménard.

Selon cet expert, une action rapide comme un renvoi en cour d’appel serait beaucoup plus rapide et moins coûteuse pour statuer sur la constitutionnalité de la loi fédérale.

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