Barrette ne voit pas l’intérêt de faire évaluer sa réforme

Le ministre Gaétan Barrette juge qu’une évaluation serait prématurée. Les modifications donneront selon lui des résultats significatifs en décembre 2017.
Photo: Jacques Boissinot La Presse canadienne Le ministre Gaétan Barrette juge qu’une évaluation serait prématurée. Les modifications donneront selon lui des résultats significatifs en décembre 2017.

Le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, ne voit pas l’intérêt de confier à la vérificatrice générale le mandat d’évaluer les impacts de la réforme du réseau de la santé, comme le réclament d’ex-fonctionnaires. Il estime que ces derniers « font de la politique » et qu’il est trop tôt pour juger un processus qui ne fait que débuter.

Trois hauts fonctionnaires retraités du ministère de la Santé ont fait parvenir une lettre vendredi à la vérificatrice générale du Québec, Guylaine Leclerc, lui demandant de procéder à une lecture « neutre et objective » de la situation actuelle.

Le réseau est dans une période de transformation et je ne crois pas que ce soit dans le mandat de la vérificatrice générale de faire ce genre d’analyse là

 

Ils affirment que les instances susceptibles de critiquer la transformation en cours dans le réseau ont été abolies ou muselées. Ils lui demandent donc d’évaluer les conséquences de la réforme et de déterminer si les économies promises sont au rendez-vous.

« Attendons que la transformation du réseau soit complète avant de passer des commentaires, a rétorqué le ministre Barrette, en entrevue au Devoir. Le réseau de la santé est dans une période de transformation et je ne crois pas que ce soit dans le mandat de la vérificatrice générale de faire ce genre d’analyse là. »

En entrevue, les trois signataires de la lettre ont dit agir en tant que citoyens « informés », et non de manière partisane. M. Barrette n’y croit pas.

« Des analyses indépendantes, il s’en fait dans le gouvernement, dit-il. Et si vous considérez que la lettre des ex-fonctionnaires de l’État n’est pas politique, vous m’expliquerez ce qui est politique et ce qui ne l’est pas. Rien n’est plus politique que cette lettre-là. »

« Le moment où on devrait voir des changements significatifs, c’est au 31 décembre 2017, poursuit-il. Alors, il est beaucoup trop précoce, un, pour conclure que ça ne fonctionne pas, deux, pour conclure qu’il y a un problème engendré par la réforme dans le réseau et, trois, pour procéder à des analyses qui évalueront les résultats. C’est une évidence. »

L’expérience des signataires de la lettre envoyée à la vérificatrice générale — qui ont occupé différents postes de direction au cours de leur carrière — n’impressionne pas l’actuel ministre de la Santé. « Ce sont des gens qui ont déjà été dans le gouvernement, et peu importe les postes haut placés qu’ils ont occupés, ils n’ont pas résolu les problèmes », remarque-t-il.

Vérification nécessaire

 

Le député de Québec solidaire Amir Khadir estime au contraire que les auteurs de la lettre visent juste. « Je pense que ces administrateurs-là ont parfaitement raison. Ça rejoint des préoccupations qui ont été exprimées par de nombreux intervenants. »

« Dans les meilleures organisations, l’évaluation d’une transformation se fait au fur et à mesure, ajoute-t-il. On ne peut dire “ croyez-moi sur parole, tout va bien aller dans un an et demi ”. Ce n’est pas sérieux. On ne joue pas avec le jardin ou le décor intérieur de M. Barrette, on joue avec le système de santé du Québec. »

Selon M. Khadir, la vérificatrice générale est la personne tout indiquée pour se pencher sur la réforme du réseau de la santé, de la même manière qu’elle vérifierait l’utilisation des ressources d’une société d’État. « Je pense que la vérificatrice générale peut avoir le mandat de vérifier si, dans sa réforme, le ministre n’est pas en train de détruire la principale ressource sur laquelle s’appuie l’État pour dispenser son service de santé, c’est-à-dire le personnel », explique-t-il.

Au bureau de la vérificatrice générale, on indique que toute communication transmise est analysée pour en évaluer la portée et décider si des actions doivent être entreprises.

 

« Des discussions auront lieu au cours de la semaine, précise la directrice du cabinet et des communications, Lucie Roy. Nous prendrons aussi en considération les autres sujets que nous avions déjà identifiés pour des travaux. »

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