Tir groupé contre un «projet gaétanesque»

La loi 10 sur la réforme administrative en santé a rendu le système « plus malade qu’il y a un an »… et le ministre Gaétan Barrette en est le principal responsable, ont lancé dimanche Québec solidaire et des intervenants du milieu.
Le ministre de la Santé soutenait samedi au Devoir qu’il ne sera pas possible de bien évaluer la réforme avant deux ans. Mais le premier bilan tracé par différents acteurs du réseau lors d’une conférence de presse commune n’est pas reluisant : improvisation et précipitation dans l’application, confusion sur le terrain, diminution des services sociaux ou spécialisés, pression pour offrir les soins plus rapidement, centralisation des pouvoirs par le ministre : les critiques fusent.
« C’est un projet “gaétanesque” », a raillé Sylvain Lirette, de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux au Bas-Saint-Laurent. « Le ministre s’est attribué l’ensemble des pouvoirs [de nomination] et il n’y a plus rien qui est décidé localement. C’est un projet centralisateur et autoritaire. »
L’organisme Ex aequo, qui défend les droits des personnes handicapées, a noté une diminution de services pour sa clientèle. Des gens ont perdu leur aide à la préparation aux repas et des soins infirmiers à domicile ont été supprimés, dénonce l’organisme, qui a recueilli plusieurs témoignages à cet égard.
Confusion
Chef de l’urgence à l’hôpital Laurentien, à Sainte-Agathe-des-Monts, et membre du Regroupement des omnipraticiens pour une médecine engagée (ROME), Simon-Pierre Landry dit que ses collègues et lui « constatent depuis l’entrée en vigueur de la loi 10 une improvisation et de la confusion sur le terrain, avec le ministère qui dicte d’en haut sans consulter les gens qui donnent des services ». Il a donné l’exemple d’appels de candidatures pour des postes de chefs de service où les candidats doivent postuler sans avoir la description de tâches de l’emploi.
Le président de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, Claude Leblond, a pour sa part mis l’accent sur les impacts négatifs de la réforme par rapport à la capacité de « garantir l’accessibilité, la qualité et la quantité des services sociaux ». « Nous avons dit il y a un an que la concentration des pouvoirs entre les mains du ministre risquait d’accentuer la marginalisation des services sociaux par rapport à l’approche curative. Nos craintes étaient fondées », soutient-il.
Tout mis ensemble, le député de Québec solidaire Amir Khadir affirme que « l’objectif ultime derrière la loi 10 est d’affaiblir au maximum le système de santé public, universel et gratuit ». Selon lui, le premier geste à faire pour redresser la barre de cette réforme serait de ralentir son rythme d’implantation. « Même si on accepte le dogme de la loi, ses conséquences vont être plus néfastes à cause de la précipitation dans laquelle elle se fait », pense-t-il.
S’il prévenait samedi qu’il faudra attendre pour mesurer pleinement les effets de la réforme, Gaétan Barrette s’est dit satisfait des résultats obtenus « sur le plan de la structure » — de même qu’en matière « d’autorité sur le réseau ».