Se préparer aux fêtes afin d’en sortir grandi

Martine Letarte Collaboration spéciale
L’important est de communiquer ses besoins à ses proches, selon la directrice de la Maison Monbourquette, Sophie Chartrand.
Photo: IStock JillVHP L’important est de communiquer ses besoins à ses proches, selon la directrice de la Maison Monbourquette, Sophie Chartrand.

Ce texte fait partie du cahier spécial Noël responsable

Le temps des fêtes n’est pas que réjouissances. Deuil d’un être cher, chicane de famille, séparation, sortie de cure de désintoxication : plusieurs épreuves vécues durant l’année peuvent venir teinter les soirées de Noël et du jour de l’An. Les lignes d’écoute observent d’ailleurs une augmentation des appels en décembre. Il y a des moyens à prendre afin de traverser cette période mieux que prévu. En voici quelques-uns.

Émilie Beauchesne a perdu son père il y a quelques années. Elle était très proche de lui. Chaque année, elle se rendait à la maison familiale pour faire le sapin de Noël avec lui. Il s’occupait des lumières, elle, des boules. Elle allait cuisiner avec lui et ses soeurs en prévision du réveillon. Une foule de petits deuils à faire. Le premier temps des fêtes vécu sans lui a été un moment très difficile, d’autant plus qu’elle se sentait responsable de sa mère. Elle ne voulait pas la laisser seule pendant la période des fêtes. Elle ne l’a pas lâchée d’une semelle. Elle a sacrifié sa traditionnelle soirée du 31 décembre avec ses amis pour la passer avec sa mère.

« Les fêtes ne sont jamais une période facile lorsqu’on a perdu un proche, témoigne-t-elle. On pense à lui immanquablement, mais la première année a été particulièrement difficile. »

« On observe une grande vulnérabilité chez les gens endeuillés dans le temps des fêtes et beaucoup de solitude émotionnelle, même chez ceux bien entourés, parce qu’on voit alors toute la famille réunie et qu’il ne manque souvent que cet être cher », affirme Sophie Chartrand, directrice de la Maison Monbourquette qui offre différents services pour les gens endeuillés, dont une ligne d’écoute.

 

Solitude et chicane de famille

Sans qu’on ait nécessairement vécu un grand drame, la solitude frappe aussi durement bien des gens durant la période des fêtes.

Chez Tel-Aide, par exemple, la solitude est un enjeu qui revient fréquemment à longueur d’année dans les appels, mais le 24 décembre, l’an dernier, ce type d’appels a connu une augmentation de 50 %.

« Certaines de ces personnes ont des problèmes de santé mentale et se sont isolées, explique Marcel, bénévole depuis 10 ans et responsable de la formation. D’autres personnes ont vu le vide se faire autour d’elles pour différentes raisons. Nous sommes souvent les seuls avec qui elles jasent dans la journée. Nous ne réglons rien, nous ne donnons pas de conseils, mais nous ne jugeons pas, nous avons une écoute active et empathique, ce qui est déjà beaucoup. »

Les appels chez Tel-Aide pendant le temps des fêtes sont aussi souvent liés aux conflits dans la famille. « Plusieurs personnes voient leur famille uniquement à cette période de l’année », précise Marcel.

La période des fêtes est aussi un moment où Tel-Aide reçoit plus d’appels qu’à l’accoutumée.

« Lorsqu’on a suffisamment de bénévoles pour assurer une présence tous les jours, les soirs et les nuits, ce qui n’est pas le cas actuellement, on a 15 % de plus d’appels en moyenne au mois de décembre », indique Marcel.

Se questionner sur ses besoins

 

Après un moment difficile, il est possible de ne pas avoir le coeur à la fête. On peut craindre de détonner parmi les autres en cette période de réjouissances. Ou, au contraire, on peut avoir envie de sortir, de voir des proches.

« Chacun est différent et il faut essayer de trouver un équilibre entre mettre un masque de bonne humeur pendant tout le temps des fêtes et s’isoler complètement », explique Sophie Chartrand.

Prendre le temps de réfléchir à ses besoins et à ses limites est un élément crucial. Vous recevez toujours toute la famille pour le réveillon ? C’est possible qu’en cette période plus difficile, vous n’en ayez pas envie. Ou que les décorations vivent un régime minceur cette année. Ou encore, que vous ayez envie de voyager pendant le temps des fêtes.

« L’important, c’est de communiquer vos besoins à vos proches, parce qu’ils ne peuvent pas les deviner, indique Sophie Chartrand. Il se peut par exemple que vous ayez envie de participer à un party de famille, mais que vous craigniez de ne pas être suffisamment en forme. Vous pouvez seulement avertir votre hôte qu’il est possible que vous vous décommandiez à la dernière minute, ou que vous partiez plus tôt que prévu en lui expliquant comment vous vous sentez. Ainsi, vous ne risquerez pas de créer de surprise. »

Le choix des personnes avec qui vivre ces moments est aussi capital.

 

« Dans la société actuelle, il faut toujours rapidement passer à autre chose, tourner la page, être productif et performant, remarque Sophie Chartrand. Il y a comme un déni de la souffrance. Mais certaines épreuves demandent du temps afin d’être surmontées. Il faut alors s’entourer de gens capables de nous accueillir dans cet état d’âme. Sinon, on risque de se faire brusquer, voire blesser. »

Oser parler de l’éléphant dans la pièce

Après une épreuve, on peut se demander s’il est préférable d’en parler ou pas lors de réceptions. Encore une fois, chacun est différent. Lors d’un deuil, d’ailleurs, c’est souvent toute la famille qui souffre et il faut prendre en compte les besoins de chacun.

« Une personne endeuillée peut avoir besoin qu’on honore le défunt dans la soirée, explique Sophie Chartrand. Cela peut-être en faisant un toast, en allumant une bougie près d’une photo de la personne, ou en préparant son plat préféré. Parfois, ce moment permet ensuite de passer à autre chose. Certaines personnes endeuillées ont l’impression de trahir le défunt en festoyant. Mais il faut aussi se donner le droit de rire, d’avoir du plaisir. C’est un pas dans le deuil, un pas dans la vie. »

D’autres ont besoin de s’accorder un moment seul avant de voir des gens, pour faire le point sur les derniers mois, pour se recueillir, pour faire un geste significatif.

« Ça peut alléger la suite des choses, remarque Mme Chartrand. Puis je constate que bien des gens ont des appréhensions quant au temps des fêtes, mais que finalement cela se passe souvent mieux qu’anticipé lorsqu’ils s’y sont préparés. »

 

En cas de besoin

Tel-Aide : 514 935-1105, en français et en anglais

Maison Monbourquette : 1-888-LE DEUIL (533-3845)

Pour trouver un centre d’écoute dans votre région : http://www.acetdq.org/ centres-ecoute

 

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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