Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec - Pour la FIQ, «les CHSLD sont les soins intensifs pour personnes âgées»
Ce texte fait partie du cahier spécial Santé - Réseau
Il y a de ces dossiers sur lesquels la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) est particulièrement interpellée, en raison de la composition même de ses membres : infirmières, infirmières auxiliaires et inhalothérapeutes apportent des soins directs aux usagers du réseau de la santé. Parmi ceux-ci, il y a l’assurance autonomie, le sort réservé aux personnes âgées dans les CHSLD et le projet de loi 52 concernant les soins en fin de vie.
Au début du mois, la FIQ a pris position sur l’épineuse question de la création d’une assurance autonomie, dans un mémoire déposé devant la Commission de la santé et des services sociaux. Difficile d’être contre la vertu, mais Régine Laurent n’en exprime pas moins certaines mises en garde à ce sujet. « On a tenu à dire qu’on devait faire quelque chose et je me suis même exprimée de la sorte : il est honteux de constater à quel point on ne prend pas soin de nos personnes âgées. On est, par conséquent, d’accord avec plusieurs principes de ce projet et il est clair que chacun de nous, en vieillissant, voudrait bien vivre chez soi, dans un monde idéal. »
Les réserves émises sont de cet ordre : « Elles ont, pour beaucoup, trait au financement. On doit comprendre que, au moment de notre intervention en commission parlementaire, on ne connaissait pas le cadre financier, on ne savait pas comment allait être financée cette caisse de l’assurance autonomie. Est-ce qu’il y aura une tarification accrue des personnes en perte d’autonomie ? Il importe de le savoir, parce que, parmi ces gens, il n’y en a pas beaucoup qui ont un revenu de 150 000 $ par année ; on craint, pour notre part, les effets pervers d’une surtarification. »
De son côté, le ministre Réjean Hébert semble pencher pour le financement à l’activité, ce sur quoi elle fait valoir ce point de vue : « Ils vont examiner quelles sont les tâches à accomplir et déterminer quels sont les montants d’argent à débourser pour les remplir ; par la suite, c’est le Centre de santé et de services sociaux qui va assumer les coûts liés aux besoins en recourant, par exemple, à des organismes communautaires à but non lucratif. On n’est pas contre cela, mais on veut que rien en provenance du secteur privé ne soit à but lucratif pour dispenser les services ; on a surtout affirmé que les soins doivent demeurer du ressort du financement public. » En parlant de ceux-ci, elle craint le traitement qui leur sera réservé sur le plan financier : « Il faut faire attention aux heures-soins, car, dans ce cas, c’est comme si on voulait mettre un code-barres sur tout ; or ces heures-là mesurent la maladie, sans faire partie d’une approche globale. » Elle assure tout de même que, « si le projet est financé correctement, il peut être porteur ».
La vraie réalité des CHSLD
Les soins à apporter aux personnes résidant dans des CHSLD font l’objet de controverses depuis quelque temps déjà ; les propos sur l’utilisation des différents personnels soulèvent l’indignation de la présidente. « Les déclarations sur ce plan-là, ça m’a fait mal au coeur sur le coup, mais essayons de regarder les choses froidement : une personne doit avoir besoin de trois heures-soins par jour pour être admise dans ces établissements, mais, une fois franchies les portes des CHSLD, on constate que ça ne compte plus, les heures-soins, parce que vous avez tout juste besoin de préposées aux bénéficiaires ; il est certain qu’on en a besoin, mais ce sont d’abord des milieux de soins. »
Elle recourt à cette image pour se faire comprendre : « Les CHSLD, ce sont les soins intensifs pour personnes âgées. On ne peut donc pas dire à la fois que c’est un véritable milieu de soins et qu’on a besoin de moins en moins de professionnels pour les dispenser. Les CHSLD ne sont plus des lieux de résidence mais des lieux de soins ; c’est le ministère de la Santé lui-même qui a fixé cette norme obligatoire : si vous n’avez pas besoin de trois heures-soins au minimum par jour, vous ne pouvez pas entrer dans un tel centre. »
Elle prône cette solution : « Dans un monde idéal, il faudrait qu’on prenne le temps d’examiner quels sont les besoins de chaque centre d’activité ou chaque unité de soins ; le nombre requis d’infirmières et d’infirmières auxiliaires n’est pas le même dans le cas d’une personne souffrant de problèmes de santé multiples que dans celui d’une personne se trouvant dans l’errance. Il est anormal qu’on puisse affirmer qu’une infirmière pour 140 patients, c’est correct ; ça n’a tout simplement pas de bon sens. »
Un sujet traité dans la dignité
La Fédération considère que la ministre Hivon a piloté de façon admirable le dossier des soins à apporter en fin de vie ; sa présidente, Régine Laurent, en est convaincue : « Elle a réussi à obtenir l’unanimité à ce propos à l’Assemblée nationale. Le sujet a été traité avec beaucoup d’écoute, d’humanité, de discernement et de respect ; si tous les projets de loi étaient menés de la même façon, ça irait mieux. »
Elle reconnaît aujourd’hui qu’il faut savoir prendre le temps de faire les choses : « On a vraiment applaudi à ce projet de loi 52. On a fait certaines recommandations qui visaient davantage à resserrer des choses ; par exemple, on veut s’assurer que le consentement soit libre et que, dans le cas des soins palliatifs, il y ait une uniformisation à travers toute la province : peu importe où la personne est en train de mourir, on veut qu’elle puisse obtenir la même qualité de soins et le même accompagnement d’un endroit à l’autre. »
La ministre s’est montrée sensible aux recommandations apportées par de nombreux groupes : « On l’a donc aussi informée du fait qu’il importe que les ordres professionnels établissent et précisent des normes de pratique et des normes déontologiques relatives au rôle de leurs membres dans le continuum des soins en fin de vie. » Elle soulève un autre point : « On sait aussi que les personnes âgées vont également se retrouver en fin de vie là où elles sont dans les CHSLD ; il faut prévoir des mesures pour que ces gens aient vraiment une fin digne. »
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