Recherche - Une nouvelle voie s’avère prometteuse pour traiter la maladie de Parkinson

Claude Lafleur Collaboration spéciale
L’exercice pourrait retarder l’évolution du Parkinson. Ci-dessus, une classe de tango pour gens atteints de cette maladie, donnée dans le cadre du Symposium annuel du Parkinson Study Group.
Photo: François Pesant - Le Devoir L’exercice pourrait retarder l’évolution du Parkinson. Ci-dessus, une classe de tango pour gens atteints de cette maladie, donnée dans le cadre du Symposium annuel du Parkinson Study Group.

Ce texte fait partie du cahier spécial Santé - Réseau

Une équipe de chercheurs de l’Université du Québec à Montréal a repéré une seconde voie par laquelle la dopamine active notre système de locomotion. Or les personnes atteintes de la maladie de Parkinson souffrent d’une diminution progressive de la dopamine, ce qui fait qu’elles ont de plus en plus de difficulté à se mouvoir. Il s’agit d’une découverte fondamentale qui pourrait éventuellement changer les façons d’aborder cette terrible dégénérescence du système nerveux. Surtout, cette découverte augure peut-être une nouvelle compréhension de la maladie de Parkinson.

 

Les recherches menées par l’équipe de Réjean Dubuc, professeur au Département de kinanthropologie de l’UQAM et professeur associé au Département de neurosciences de l’Université de Montréal, montrent, pour la première fois, que les neurones contenant la dopamine peuvent agir directement sur les centres de contrôle de la locomotion. « Ces résultats changent considérablement notre compréhension du rôle de la dopamine dans le contrôle de la marche, dit-il, et pourraient avoir d’importantes implications pour le traitement des troubles du mouvement dans la maladie de Parkinson. »

 

Pour illustrer en termes simples la nature de cette découverte, le professeur Dubuc propose l’analogie suivante : imaginons que la partie du cerveau d’où émane la dopamine soit l’île de Montréal et que les centres de contrôle de la locomotion se trouvent à Drummondville. « On connaissait une voie qu’emprunte la dopamine, disons qu’il s’agit de la route qui passe par Saint-Hyacinthe. Or, nous, nous venons peut-être de découvrir l’autoroute qui mène directement à Drummondville ! »

 

Réjean Dubuc et son équipe sont en quelque sorte les spécialistes mondiaux de cette région locomotrice. Or il s’agit d’une région qui, dans certains traitements utilisés pour contrer les effets de la malade de Parkinson, commence à être stimulée afin de favoriser la locomotion des parkinsoniens, « mais sans grand succès », relate le chercheur. Sa découverte pourrait donc « tout changer ».

 

« Nous sommes peut-être les seuls au monde à travailler sur cette région du cerveau, poursuit-il. Ce qui nous intéresse, ce sont les mécanismes fondamentaux qui gouvernent la locomotion, qui font qu’on se déplace. On pensait avoir compris comment ça fonctionne, mais nous, nous venons de découvrir que ça ne se passe pas exactement comme ça. »

 

Le spécialiste en profite pour souligner que, dans le domaine de la neurologie, la recherche canadienne est à la fine pointe. « C’est extraordinaire, ce qui se fait ici, dit-il, et Montréal est la deuxième capitale des neurosciences au monde. On n’a vraiment rien à envier à qui que ce soit », dit-il fièrement.

 

Tant de choses à savoir

 

Le professeur Dubuc rappelle que la maladie de Parkinson est la première maladie neurologique dont on a compris le mécanisme de base : les symptômes sont dus à la disparition progressive de la dopamine. « Le problème avec cette maladie, c’est qu’elle n’est probablement pas liée uniquement à un groupe de cellules, mais à quantité d’autres qui se détériorent avec le temps, pose-t-il. Et, plus le Parkinson évolue, plus il y a des neurones qui disparaissent… »

 

Il rappelle en outre que le cerveau compte 100 milliards de cellules nerveuses et que chacune d’elles établit au moins 10 000 connexions avec ses voisines ou avec d’autres cellules plus éloignées (il faudrait plus de 3000 ans pour compter une à une ces 100 milliards de cellules, à raison d’une cellule par seconde !).

 

Réjean Dubuc précise davantage : « Si on imagine que la source de la dopamine, c’est Montréal, chez un parkinsonien, celle-ci finit par disparaître complètement, ce qui fait que la voie secondaire et la voie directe subissent d’importants dommages. On pourrait éventuellement imaginer qu’on parviendra à compenser cette absence de dopamine et à améliorer ainsi les fonctions locomotrices du patient qui sont les plus atteintes. » Le chercheur espère donc que sa découverte mènera à de nouvelles façons de stimuler les centres de locomotion chez les parkinsoniens, afin de faciliter leurs déplacements.

 

« Comme certains traitements s’intéressent déjà à cette région, notre découverte pourrait possiblement trouver des applications pratiques assez “rapidement”, dit-il. Mais dans combien de temps ? Ça, personne ne peut le dire ! »

 

« Selon moi, notre façon de percevoir les choses autrement devrait changer certaines conceptions de la maladie de Parkinson, poursuit-il. Nous, nous continuons sur notre lancée et nous cherchons à savoir comment la dopamine agit. Autrement dit : on a décrit une nouvelle voie — une autoroute qui descend vers les centres locomoteurs — mais comment cela fonctionne-t-il exactement ? Ça, on ne le sait pas encore… Et là, il y a du pain sur la planche pour le reste de ma carrière ! », lance-t-il en riant.

 

Mieux vaut prévenir…

 

Réjean Dubuc est par ailleurs le directeur d’un nouveau centre de recherche créé à l’UQAM : le Groupe de recherche en activité physique adaptée, ou GRIPA. « Il s’agit de lier les recherches fondamentales aux applications concernant les bienfaits de l’activité physique adaptée », explique-t-il.

 

En fait, pour contrer bon nombre de maladies, il est nécessaire de faire de la prévention, c’est-à-dire avoir de saines habitudes de vie et faire l’exercice physique nécessaire, rappelle M. Dubuc. Son groupe cherche donc à appliquer les plus récentes connaissances en cette matière. « Comment faire de la prévention ou encore améliorer la condition des personnes malades ?, pose-t-il. Par des méthodes efficaces ! Voilà les objectifs du GRIPA. »

 

Les chercheurs s’intéressent par conséquent à tous les groupes d’âge — des jeunes enfants jusqu’aux personnes âgées — et aux avancées sur la sensorimotricité, le métabolisme et l’obésité, ainsi qu’à la promotion des activités physiques adaptées. « Nous nous intéressons beaucoup aux facteurs qui font que les gens font ou non de l’exercice physique, indique le directeur du GRIPA, ce qui est un beau défi ! »

 


Collaborateur

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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