Québec remboursera les tests au privé

Le Dr Gaétan Barrette, présentement candidat pour la CAQ dans Terrebonne, affirme qu’il était prêt à rendre l’entente publique en juillet, mais que le Dr Yves Bolduc a refusé.
Photo: Agence France-Presse (photo) Paul Chiasson Le Dr Gaétan Barrette, présentement candidat pour la CAQ dans Terrebonne, affirme qu’il était prêt à rendre l’entente publique en juillet, mais que le Dr Yves Bolduc a refusé.

Le ministre de la Santé Yves Bolduc a dans ses cartons une entente pour la couverture des échographies en clinique privée. Le ministère de la Santé (MSSS) et la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) étaient à deux doigts de la signer au moment où la campagne électorale a été déclenchée.

 

Le Dr Gaétan Barrette, qui a négocié le tout pour la FMSQ avant de faire le saut en politique, affirme qu’il était prêt à rendre l’entente publique en juillet, mais que le Dr Yves Bolduc a refusé.

« Nous étions sur le point de nous entendre en juin, dit plutôt le Dr Bolduc, en entrevue avec Le Devoir. Puis les élections sont arrivées. Il y avait encore des étapes à franchir. Si j’avais pu signer cette entente en juin, je l’aurais fait », assure-t-il.

Dépistage du cancer, patientes enceintes, tests diagnostiques : la RAMQ rembourserait désormais les médecins, et les patients pourraient présenter leur carte soleil plutôt que leur chéquier, a appris Le Devoir. De nombreux patients acceptent de payer des centaines de dollars pour une échographie au privé lorsqu’ils sont confrontés aux importantes listes d’attente dans les hôpitaux.

Selon ce qu’a appris Le Devoir, il en coûterait environ 16 millions par an au MSSS pour assurer ce service. Mais le Dr Bolduc ne veut pas fixer de plafond, alléguant que les cliniques répondront simplement à la demande.

À Montréal, l’attente atteint un an pour certains examens échographiques.

« Nous voulons éliminer les listes d’attente. Certains médecins se gardent une longue liste d’attente au public [au profit du privé], estime le Dr Bolduc. D’ailleurs, dans des villes où il n’y a pas d’offre au privé, les listes d’attente sont moins longues. Je veux faire comme la fécondation in vitro et rendre l’échographie accessible à tous. »

De telles ententes existent déjà, que ce soit pour les avortements ou la fécondation in vitro, par exemple.

L’entente sur le remboursement des échographies devait être la première étape dans le règlement d’autres dossiers où l’expertise est disponible au privé pendant que les listes d’attentes s’allongent au public. On pense par exemple au traitement de la dégénérescence maculaire ou aux coloscopies. Ces dernières sont couvertes par la RAMQ, mais des cliniques facturent des frais accessoires souvent exagérés. « Nous allons payer les frais accessoires », promet d’ailleurs le Dr Bolduc, qui souhaite mettre fin à cette surfacturation.

 

La CAQ s’engage

Des centaines de milliers de patients pourraient subir leur examen plus rapidement, selon le Dr Barrette. C’est lui qui a négocié l’entente avec le ministère, avant de faire le saut en politique active la semaine dernière, défendant les couleurs de la Coalition avenir Québec.

Interrogé par Le Devoir, le Dr Barrette soutient avoir appelé le ministère « aux deux jours » en juillet pour savoir si le projet de règlement serait publié dans la Gazette officielle avant le déclenchement de la campagne électorale. Selon lui, les négociations étaient complétées à 90 %. « Le gouvernement pouvait l’annoncer, j’avais donné l’assurance qu’on allait s’entendre sur les formalités restantes. Yves Bolduc a refusé. »

Si la Coalition avenir Québec est élue, le Dr Barrette promet que le remboursement de l’échographie serait une réalité en quelques semaines.

C’est sur le tarif final consenti aux médecins que les négociations se sont terminées. Les médecins recevraient moins de 85 % des profits engrangés actuellement par le paiement direct par les patients. Le Dr Yves Bolduc soutient même que pour certains examens, la RAMQ consentirait de quatre à cinq fois moins que le tarif actuel, trop élevé.

Les discussions allaient bon train entre le ministère et les médecins spécialistes, qui s’entendaient. Mais ce serait entre la FMSQ et l’Association des radiologistes du Québec (ARQ) que les discussions auraient connu un blocage.

La FMSQ et le MSSS ont fait appel à une firme externe pour évaluer le juste coût des échographies en clinique privée.

L’Association des radiologistes du Québec s’est dite dans l’impossibilité de répondre aux questions du Devoir, tout comme la Fédération des médecins spécialistes du Québec, les porte-parole étant en vacances.

En septembre dernier, le président de l’ARQ, le Dr Frédéric Desjardins, avait affirmé que « si le gouvernement offre le prix du marché, on est pour. Mais s’il réduit les prix de 40 %, on est contre ».

Grâce à une augmentation anticipée de la demande, le Dr Barrette estime que l’échographie demeurera rentable et que la plupart des médecins seront contents de voir leurs patients obtenir leurs examens. « Ce sera encore rentable pour eux et l’État paiera le juste prix », assure-t-il.

Médecins québécois pour le régime public (MQRP), qui milite depuis de nombreuses années en ce sens, se réjouit de cette avancée et presse le gouvernement de l’officialiser. Dans un rapport publié en juillet, MQRP accusait le privé de drainer les ressources et d’ainsi gonfler les listes d’attente du public. Pour eux, il s’agit d’une preuve de l’impossibilité de la mixité privé-public en santé.

« C’est une excellente nouvelle pour les patients et les médecins de première ligne », dit son président, l’urgentologue Alain Vadeboncoeur.

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