Sondage SOM commandé par l'AMQ - 75 % des médecins se sont vu offrir de pratiquer hors Québec
Pas moins de 75 % des médecins québécois se sont vu offrir au cours des deux dernières années d'aller pratiquer la médecine hors du Québec, et la moitié d'entre eux ont envisagé sérieusement la possibilité de répondre à ces offres.
Ces résultats étonnants, obtenus au terme d'un sondage réalisé auprès de 1500 médecins québécois entre le 23 septembre et le 3 octobre par la firme SOM, ont été dévoilés hier par l'Association médicale du Québec (AMQ), qui y voit l'expression d'un ras-le-bol généralisé dans la profession médicale.«On savait cela de façon empirique, mais ces chiffres confirment nos perceptions. J'ai été étonné de voir combien de mes collègues depuis deux mois ont entrepris des démarches pour réclamer leur licence pour pouvoir travailler ailleurs au Canada. En dix ans de carrière, je n'avais jamais vu cela», a soutenu hier le Dr Stanley Vollant, président de l'AMQ.
Ce dernier estime que ces résultats sont le tribut de la méfiance qu'a engendrée l'adoption de la loi 114 cet été, et les projets de réforme du statut professionnel des médecins, envisagés par le ministre de la Santé, François Legault depuis cet été.
Selon le Dr Vollant, le mécontentement des médecins, conjugué aux pénuries d'effectifs médicaux qui sévissent aussi en Ontario et ailleurs au Canada et aux États-Unis, crée un climat particulièrement favorable au maraudage dans la profession médicale. Selon le même sondage, 86 % des médecins d'urgence, ceux-là mêmes visés par la loi 114, ont été sollicités pour aller pratiquer hors Québec.
«Même si seulement une petite proportion d'entre eux décident de passer aux actes, ce serait catastrophique pour la population du Québec», estime le Dr Vollant.
On ne s'étonnera pas que 97 % des médecins se disent en désaccord avec la loi 114, et que 95 % d'entre eux soient opposés à une loi qui leur imposerait des obligations contractuelles avec les hôpitaux du réseau. On apprend qu'un médecin sur 10 se dit inscrit sur les listes de dépannage forcé instituées par la loi 114 et que le tiers d'entre eux se montrent prêts à désobéir à la loi et à écoper des amendes s'ils sont dépêchés en région.
L'AMQ, qui terminera une tournée de cinq villes québécoises le 17 octobre prochain, entend soumettre ces résultats au ministère de la Santé pour l'inciter à retirer sa loi et à trouver des solutions négociées. «Le gouvernement doit arrêter de gérer par crise et trouver des solutions durables aux problèmes du réseau de la santé», affirme le Dr Vollant, chirurgien à l'hôpital de Baie-Comeau.
À son avis, la loi 114, qu'on a adoptée à toute vapeur pour assurer des services d'urgence en région, est en passe de créer plus de torts que de bien dans plusieurs régions éloignées du Québec, dont la Côte-Nord.
«Baie-Comeau était une des urgences menacées en juin. Mais les gens n'ont pas attendu la loi pour rallonger leurs heures et reporter leurs vacances. Quand la loi a été imposée, ils se sont sentis trahis et ont été très frustrés d'avoir cette matraque au-dessus de la tête. Aujourd'hui, des médecins refusent d'y venir dépanner et d'autres ont renoncé à s'y installer. La loi 114 devait aider les régions, mais c'est le contraire qui se produit», conclut-il.