La Caisse de dépôt confronte Alfonso Graceffa à ses «manquements éthiques»

L’ex-dirigeant d’Otéra Capital Alfonso Graceffa a répondu mercredi aux questions de l’avocat de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) dans le cadre du procès qu’il a intenté contre l’institution. Il a notamment dû s’expliquer sur son rôle non déclaré au sein de l’entreprise de construction de son frère, ainsi que sur sa rencontre avec un individu au passé criminel.
Me Mason Poplaw a mis l’ancien dirigeant de la filiale de prêts immobiliers de la CDPQ sur la sellette en l’interrogeant sur les « manquements éthiques graves » qui lui sont reprochés et qui ont motivé son congédiement.
Parmi eux : celui d’avoir progressivement pris le contrôle d’une entreprise — en l’occurrence Construction Sainte-Gabrielle, la compagnie de son frère — sans le déclarer.
Ce dernier lui devait deux millions de dollars, et il a accepté d’échanger une partie de sa créance contre l’équivalent de 50 % des actions avec droit de vote de la compagnie, a reconnu l’ex-dirigeant d’Otéra devant le tribunal.
M. Graceffa a toutefois assuré qu’il ne prenait pas de décisions au sein de l’entreprise. « C’est à mon frère. C’est un one-man show. C’est une petite compagnie », a-t-il déclaré en tentant de convaincre le juge Andres Garin qu’il ne contrôlait pas l’entreprise, et ce, même s’il a obtenu le pouvoir d’agir légalement à la place de son frère, « qui n’allait pas bien » à un certain point.
« Je n’ai jamais exercé [ce pouvoir] », a dit M. Graceffa, avant de se faire interrompre par le magistrat. « Désolé, mais j’ai vu un document que vous avez signé en vertu de ce pouvoir », lui a-t-il répondu.
Rencontre avec un individu au passé criminel
Interrogé sur sa connaissance du passé criminel de Jean-Denis Lamontagne, des mains duquel il a accepté un paiement de 15 000 $ — un autre « manquement » relevé par la Caisse de dépôt —, M. Graceffa a répété qu’il n’en savait rien. « Sur la tombe de mère, je n’étais pas au courant », a-t-il lâché, reconnaissant qu’il n’avait pas procédé à des vérifications avant de rencontrer M. Lamontagne dans ses bureaux.
Confronté par l’avocat de la Caisse de dépôt quant au fait qu’il avait reçu des indications de la mauvaise situation financière de M. Lamontagne avant leur rencontre, M. Graceffa a répété : « Je ne m’en souviens pas. »
L’ex-dirigeant d’Otéra a également plaidé qu’il ne savait pas que cette somme, qui était destinée au remboursement d’un montant dû au frère de M. Graceffa, serait remise en argent comptant.
« D’un point de vue éthique, et considérant ce que pourrait en penser le public, ne vous est-il pas venu à l’esprit que vous devriez refuser cette enveloppe ? » lui a demandé Me Poplaw. « Si j’avais su qui il était, je n’aurais même pas rencontré ce monsieur », a assuré M. Graceffa.
Alfonso Graceffa a également été questionné sur l’éthique de ses liens avec son « ami d’affaires », le promoteur et courtier Thomas Marcantonio, qui a reçu un prêt de 44 millions de dollars d’Otéra pour la construction de résidences pour retraités à Saint-Jean-sur-Richelieu. Le contre-interrogatoire mené par l’avocat de la CDPQ doit se poursuivre jeudi.
M. Graceffa, qui estime avoir été injustement congédié et diffamé par la Caisse de dépôt, poursuit son ancien employeur pour 6,9 millions de dollars.